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Liban - Droits des enfants

Le mariage précoce à l’étude en sous-commission parlementaire

Trois propositions de loi seront débattues cet après-midi lors de la réunion au siège du Parlement. L'une prône l'abolition du mariage des enfants, les deux autres acceptent les exceptions.

La campagne menée par le RDFL contre le mariage précoce montre une adolescente en robe de mariée. Photo RDFL

Le débat sur l'âge légal du mariage s'institutionnalise et s'installe. Cet après-midi à 17h, la sous-commission parlementaire chargée par le président de la commission de l'Administration et la Justice, Robert Ghanem, d'étudier le dossier doit se réunir au Parlement. Elle doit parvenir à étudier les trois propositions de loi sur la question et aboutir à un brouillon final qui sera réexaminé par la commission, avant son transfert en commissions mixtes ou au Parlement. La question qui se pose aujourd'hui est la suivante : Le Liban abolira-t-il le mariage des enfants (autrement dit des mineurs de moins de 18 ans) ? Sinon, acceptera-t-il les exceptions, telles que voulues par les différentes communautés religieuses, comme il l'a toujours fait, avec quelques amendements toutefois ?

Compte tenu que les affaires citoyennes liées au statut personnel sont régies par les communautés religieuses, il est essentiel de prendre conscience qu'aucune loi sur l'âge légal du mariage ne pourra être adoptée sans le consentement des chefs religieux. Il s'agit plus particulièrement des communautés de confession musulmane, sunnite et chiite, au sein desquelles le mariage d'adolescentes est encore couramment pratiqué.

 

Respecter les particularités libanaises
Parmi les trois propositions de lois en lice, deux se veulent « réalistes ». Acceptant les exceptions, autrement dit le mariage avant l'âge de 18 ans sous certaines conditions, elles peinent à répondre aux attentes des associations féministes qui veulent protéger au mieux les filles du mariage précoce. Présentée par le député Ghassan Moukheiber en 2014, la loi « visant à réglementer le mariage des mineures » entend « protéger les moins de 18 ans par le biais du juge des mineurs, tout en tenant compte des lois communautaires », avait expliqué le député à L'Orient-Le Jour. « Elle constitue la seule alternative actuelle, la modification des lois communautaires n'étant pas imminente », avait-il précisé. Cette loi stipule que tout mariage avant l'âge de 18 ans doit obligatoirement avoir l'accord du juge des mineurs, sur base d'une enquête, et non seulement l'autorisation parentale ou du tuteur. Elle était soutenue par la Commission nationale de la femme libanaise, présidée alors par Wafa' Sleiman, épouse du précédent chef de l'État.

Autre loi qualifiée de réaliste, celle que le ministre d'État pour les Droits de l'homme, Ayman Choucair, doit proposer incessamment. « Ma proposition de loi est prête. Elle fixe l'âge du mariage à 16 ans. Car j'estime qu'il faut protéger les mineurs et prévenir le trafic humain, tout en respectant les particularités de la société libanaise », explique-t-il à L'OLJ, précisant qu' « il faut bien commencer quelque part ».

 

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Pas avant dix-huit ans
Face à ces deux propositions, celle d'un député des Forces libanaises, Élie Keyrouz, n'admet aucune exception et fixe à 18 ans l'âge du mariage, pour les femmes et les hommes. Présentée par ce dernier en mars 2017, elle est intitulée « Loi de protection des enfants du mariage précoce ». Elle est aussi soutenue par les associations féministes les plus engagées, en tête desquelles le Rassemblement démocratique des femmes libanaises (RDFL) et Kafa. « La raison pour laquelle je refuse les exceptions, c'est que cela porte atteinte à l'esprit de la loi », explique le député à L'OLJ. Il rappelle aussi son attachement aux principes onusiens selon lesquels l'enfance prend fin à 18 ans révolus. Il observe enfin que « les exceptions appliquées dans les pays arabes ont toujours consacré le mariage des enfants ».

Mais il ne peut s'empêcher de craindre pour sa proposition « qui risque de ne pas passer ». « Certains chefs communautaires, soutenus par nombre de députés, considèrent que ma proposition de loi est anticonstitutionnelle. Ils estiment que j'outrepasse les prérogatives des communautés religieuses qui légifèrent en matière de statut personnel », regrette-t-il. « Mais, répond M. Keyrouz, marier sa fille de 10 ou de 15 ans est une atteinte aux droits de l'enfant, à la société libanaise et à l'État. Et l'État ne peut laisser faire, les bras croisés. Il a le devoir d'agir. »

La sous-commission parlementaire devra dire son dernier mot, si ce n'est demain, un jour prochain. Toutes les parties concernées y sont représentées, parmi lesquelles les trois législateurs. Mais un nouvel acteur s'est invité dans le débat, depuis la nomination de Claudine Aoun Roukoz à la tête de la Commission nationale de la femme libanaise. La fille du chef de l'État a parrainé en décembre dernier la création de la Coalition nationale pour la protection des enfants contre le mariage précoce, lancée par le RDFL. Elle entend bien mener le dossier à bon port et proposer, dit-on, « un compromis, entre toutes les parties »

 

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