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Nos Lecteurs ont la Parole - par Marie ONEISSI

An II : Transformer des partisans en citoyens

En un an, M. Michel Aoun et son gouvernement ont fait preuve d'une efficacité certaine en s'activant à gommer les séquelles de la guerre civile à coups de réformes et de normalisation de la vie quotidienne, dessinant ainsi les prémices d'une véritable deuxième République. Ils peuvent se targuer d'avoir abattu beaucoup de travail en moins de douze mois : des réformes difficiles ont été accomplies, d'autres sont en cours. MM. Aoun et Hariri ont semblé être habités par leur « mission » et s'en sont acquitté avec un sens national qu'on croyait définitivement perdu. Le mot d'ordre était au pragmatisme : laisser de côté les questions qui fâchent ; fermer les yeux sur les déviances politiques et partisanes pour obtenir un consensus autour des réformes et régler les problèmes quotidiens qui se sont amoncelés pendant des années. La preuve que tout n'est pas perdu et que la lumière est au bout du tunnel.
Mais le pragmatisme n'y suffira pas. Ainsi, l'affectif s'est invité à la table de l'exécutif avec la démission-surprise, voulue ou imposée, de M. Hariri. Le vif émoi suscité par cet événement tient autant du mystère qui l'entoure que du réveil de « réflexes » assoupis. Car le pragmatisme semble avoir aussi enfoui des questions importantes, telles que la légitimation du pouvoir aux yeux d'un « peuple » de « partisans » et la réconciliation nationale qui la sous-tend. Pour construire un État neuf, encore faut-il transformer les partisans en citoyens. Ou, en d'autres termes, remplacer les allégeances aux multiples chefs – et au-delà, aux États-parrains – par une conscience nationale.
Or les derniers événements laissent penser que le pouvoir n'a pas encore confiance en sa propre légitimité. Comment interpréter sinon le silence du président de la République s'abstenant de s'adresser solennellement à la nation pour la rassurer sur sa capacité à assumer le pouvoir ? Au risque que son silence soit constamment parasité par la prise de parole tantôt de M. Hassan Nasrallah, tantôt de M. Gebran Bassil, deux chefs de partis. M. Michel Aoun, dont les discours étaient attendus et écoutés avec ferveur par ses propres partisans pendant les différents épisodes de guerre, semble peiner à se poser aujourd'hui au-dessus des partis en faisant preuve de la même éloquence pour s'adresser désormais à toute la nation.
Difficile de ne pas faire le rapprochement entre l'émoi suscité par l'affaire Hariri et celui provoqué par les petites phrases jetées par-ci par-là par certains responsables politiques il y a encore quelques semaines. Car la conscience nationale à bâtir passe aussi par la légitimité du pouvoir à initier la réconciliation nationale. Si deuxième République il y a, elle ne pourra pas prendre son élan tant que personne ne se risque à aborder, sinon de biais, les sujets qui réveillent des souvenirs pénibles et douloureux. Ces petites phrases démontrent, s'il en était besoin, que des pages ont été tournées mais jamais refermées. Le silence retombe aussitôt alors même que la mémoire de ces « événements » reste vive dans l'esprit des victimes, de leurs proches et des témoins de cette guerre sans merci qui a fait une centaine de milliers de victimes, dévasté des pans entiers de l'économie et de l'architecture du pays, humilié ses enfants et nourri des ressentiments qui peinent à s'effacer.
On fait comme s'il suffisait de traiter les problèmes matériels en ignorant l'immatériel. Or la réconciliation nationale n'a pas eu lieu. Là aussi, il appartient au pouvoir central de l'initier, fort de sa légitimité à le faire.
La réconciliation nationale passe impérativement par la reconnaissance par les partis politiques et les milices actuelles ou passées de leurs crimes de guerre, assassinats politiques, massacres, vendettas.
Sans une réconciliation nationale, les efforts du régime pour assainir le pays buteront toujours sur la méfiance qui règne entre les factions politico-confessionnelles et qui empêche une légitimation totale d'un pouvoir pourtant de bonne foi. Il en faut du courage pour demander pardon mais le peuple n'est pas amnésique et ne pardonnera pas aux hommes au pouvoir s'ils se dérobent à ce devoir de mémoire, et la deuxième République en gestation continuera à se débattre dans les sables mouvants.
Une telle réconciliation nationale nécessite aussi un acte symbolique fort.
Pourquoi ne pas proclamer une journée nationale du souvenir de la guerre civile et ériger une statue à la mémoire des victimes au centre de Beyrouth ?
Elle ne déparera pas aux côtés de la statue des Martyrs (pendus par les Ottomans) qui a, elle, été curieusement épargnée (ou presque) par le déchaînement des violences et qui a été prise d'assaut un certain 14 mars par un peuple avide de symboles.

Marie ONEISSI
Éditrice

En un an, M. Michel Aoun et son gouvernement ont fait preuve d'une efficacité certaine en s'activant à gommer les séquelles de la guerre civile à coups de réformes et de normalisation de la vie quotidienne, dessinant ainsi les prémices d'une véritable deuxième République. Ils peuvent se targuer d'avoir abattu beaucoup de travail en moins de douze mois : des réformes...

commentaires (2)

C,EST TRANSFORMER DES MOUTONS EN ETRES HUMAINS... LE TRAJET EST ASTRONOMIQUEMENT IMPOSSIBLE DANS NOTRE ATOLL !

LA LIBRE EXPRESSION

18 h 25, le 10 janvier 2018

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Commentaires (2)

  • C,EST TRANSFORMER DES MOUTONS EN ETRES HUMAINS... LE TRAJET EST ASTRONOMIQUEMENT IMPOSSIBLE DANS NOTRE ATOLL !

    LA LIBRE EXPRESSION

    18 h 25, le 10 janvier 2018

  • RECONCILIATION AVEC comme condition INITIALE: ABNEGATION. ET elle requiert prendre les pas suivants: 1--declarations publiques unitaires DEMANDANT PARDON au peuple libanais , emanant de TOUTE personne physique & morale ayant participe a la guerre libanaise depuis 1967 a ce jour, TOUTES les guerres AU LIBAN, interlibanaises ou PAS, ayant eu lieu sur NOTRE sol, Y ayant participe directement ou par procuration. 2-le PARDON demande aussi par TOUS ceux qui ont fait main basse sur les finances publiques- pretes-noms inclus) 3--POURPARLERS pour une comprehension& une VISIION UNIQUES de notre Liban, PS.LES PERSONNES mentionnees par les # 1 & # 2ci-haut en seront EXCLUES. REGLE GENERALE MAIS PRINCIPALE : AUCUNE ALLEGEANCE A : a- personne etrangere ou pays etranger ( y compris arabes ) b- IDEE , IDEOLOGIE, THEORIE ETRANGERE , REVOLUTIONNAIRE, LIBERATION DE JERUSALEM pr ex . ( sauf apres referundum ) . 4--L'ABNEGATION = renonciation publique des personnes impliquees au # 1 & # 2 ci-haut a toute activite future politique, financiere , municipale publique, assuree par 1 clause incluse dans LA CONSTITUTION ( noms a l'appui )(( beaucoup trop demander ?)) 5--recouvrement dans la mesure du possible des sous voles par ces personnes

    Gaby SIOUFI

    09 h 57, le 10 janvier 2018

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