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Moyen Orient et Monde - Jordanie

« Nous revivons le temps de la Nakba. Il y a eu 1948, il y a eu 1967 et il y a aujourd’hui »

À Amman, les manifestations se multiplient depuis la déclaration de Donald Trump sur la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël. Reportage dans le quartier palestinien de Haï Nazzal, où des manifestants se sont réunis devant la grande mosquée.

Manifestation en soirée dans le quartier palestinien de Amman. Khalil Mazraawi/AFP

« Jérusalem est la capitale de la Palestine ! Jérusalem est la capitale de la Palestine ! » Les habitants du quartier palestinien Haï Nazzal (sud-est de Amman) sont en colère. Ils étaient environ un millier, hier soir, à s'être donné rendez-vous pour protester contre la décision du président américain. Vers 18h, après la prière du soir, les manifestants se sont réunis devant la grande mosquée Nazzal. Impossible de circuler. Des hommes, des femmes et des enfants sont présents. Des jeunes et des plus vieux. Des générations entières de citoyens jordaniens d'origine palestinienne, qui n'ont jamais connu leur terre natale. Mais pour qui la Palestine reste, et restera à jamais leur pays. Avec pour symbole et capitale, Jérusalem.

Un homme d'une cinquantaine d'années, entouré de gamins, s'approche pour transmettre son message. « Je me sens comme un grand-père, comme un fils qui a été rejeté de son pays. Aujourd'hui, nous revivons le temps de la Nakba. Il y a eu 1948, il y a eu 1967 et il y a aujourd'hui. Je me sens nu, sans chaussures, comme ceux qui se sont fait expulser de la Palestine. » Mohammad est né et a toujours vécu dans le quartier de Nazzal. Ses enfants aussi. « Trump ? Il demande la guerre ! s'insurge-t-il. Il a lancé un feu qu'il ne maîtrise pas et qui peut lui retomber dessus. Il ne peut pas donner ce qui ne lui appartient pas ! Il ne peut pas donner une terre à des gens qui ne la méritent pas... Israël s'est incrusté en Palestine. Ce que Trump a fait ? Il nous réveille à la veille de l'anniversaire de la première intifada. » Entre ses mains, il tient une pancarte sur laquelle est inscrite la date de la première intifada : le 9 décembre 1987. Dans deux jours. Autour de nous, les slogans fusent.

« Ici, c'est le cri de Amman ! » Les habitants, en chœur, appellent à la troisième intifada. « La troisième intifada partira de Jordanie ! » Plus tôt dans la journée, les factions palestiniennes ont appelé les Palestiniens à lancer une nouvelle intifada. Ici, les drapeaux du Hamas se mélangent aux drapeaux palestiniens. Les discours sont radicaux : « Le seul futur, c'est la fin de l'existence d'Israël. Israël n'existe pas. La décision prise par Trump n'a pas été étudiée et mènera à la fin de l'existence d'Israël. La Jordanie est en feu ! »

 

(Lire aussi : « Jérusalem est à nous ! » : à Ramallah, la rue se soulève)

 

« On est nés avec l'espoir... »
D'autres expriment des discours plus modérés, comme Ahmad, qui s'exprime en français. « On respecte toutes les religions et notre but, c'est de garder toutes les parties pour les musulmans, les chrétiens et les juifs. Mais la capitale de l'État palestinien qui doit exister est Jérusalem. Elle a toujours été la capitale de la Palestine. C'est ce qui est écrit dans le Coran : la Palestine, c'est notre pays. Tous les gens, les femmes et les enfants sont prêts à mourir pour garder la Palestine. On accueille tout le monde comme visiteurs, car c'est une question de respect pour l'humanité tout entière. » Selon lui, « Israël a tout : la force, le nucléaire et le soutien des États-Unis. Mais nous on a le droit. » Et pour cela, il ne perd pas espoir. L'espoir est gravé dans le cœur des Palestiniens. « On est né avec l'espoir, c'est dans notre nature », conclut Ahmad.

Un peu plus loin, un professeur d'arabe explique : « Nous sommes présents ici car nous croyons que le rêve est possible. Jérusalem est dans nos cœurs et dans ceux de nos enfants. Nos enfants sont élevés avec l'idée que Jérusalem est notre capitale. Jérusalem est une ville sainte, dans le Coran, et ce n'est pas un petit papier de Trump qui changera cela. » Le professeur attend des autorités jordaniennes qu'elles annulent le traité de paix et qu'elles rappellent l'ambassadeur en Israël. À côté de lui, un enfant s'écrie : « La Palestine ou rien ! Que Trump aille se cacher ! »

L'espoir, oui, mais la naïveté, non. Âgé de 25 ans, Moustapha dit avoir eu les larmes aux yeux lorsqu'il a appris la nouvelle. « C'était un choc. C'est un scandale, dit-il. L'histoire s'en souviendra. Mais tant qu'il y a des accords sous la table, les États arabes ne feront rien. » Comme la plupart des manifestants, il a la nationalité jordanienne. « Mais mon cœur... il est en Palestine. »

 

 

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