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Culture - Installation

Le miroir d’Alice et le monde de Maïa

Un rhinocéros souriant, deux cerfs aux cornes en feuilles, trois vaches, quelques papillons dorés à la feuille, et des oiseaux... petits, dodus, ventrus. Le parcours signé Maïa Tabet à la galerie Platform 39 (The Alternative Artspace)* sollicite le regard, l'imagination et la rêverie.

L’art de Maïa Tabet n’a pas d’âge, il est tout aussi bien celui de l’enfance naïve et émerveillée que celui de l’adulte qui joue de ses obsessions.

Adolescente, son père l'initie à l'art du bricolage et Maïa Tabet prend plaisir à jouer les petits apprentis à ses côtés. Changer une ampoule, affronter une tuyauterie capricieuse ou repeindre un plafond étaient pour elle des gestes ludiques et jamais ses petites mains ne lui faisaient défaut. Une dextérité au bout des phalanges qu'elle étoffera, des années plus tard, de poésie et d'humour. Après avoir obtenu un bac technique en architecture d'intérieur et publicité à l'Université de Kaslik, Maïa Tabet part pour la France où elle séjournera pour une période de 14 ans. Elle accomplit une formation en effets spéciaux et maquillage artistique et travaille en tant que directrice administrative au sein d'une grande société américaine. Elle accumule des petits jobs et creuse à petits pas son chemin artistique. De retour au Liban en 1994, elle occupe un poste de directrice artistique sur des tournages de films (publicité, clips...) et un champ de création s'offre à elle. L'artiste crée des ambiances, s'occupe de la décoration des plateaux et fabrique des accessoires quand il lui en manque. « Travailler de mes mains était une nécessité, un besoin. De la sculpture au collage, de la peinture décorative au moulage, j'ai tout essayé. »

 

(Lire aussi : Michel Harmouche, le goût des arbres...)

 

 

Darth Vader et Catwoman
Franchir le seuil de la galerie Platform 39 (The Alternative Artspace), c'est un peu traverser le miroir d'Alice et plonger dans le monde fantastique de Maïa Tabet. Les réminiscences de son enfance/adolescence ont gardé des traces et le parcours à travers son bestiaire ludique laisse un goût de nostalgie puérile. De ses délicates sculptures surgit toute son enfance. Elle confère à ses objets un aspect irréel mais énergique. Ainsi ses « culbutos » – comme elle se plaît à les appeler – bougent mais ne tombent jamais, leurs silhouettes bien arrondies, sans aspérité ni accroche, invitent au toucher et au jeu. Son art est requis par une dualité entre réflexion et dérision, entre sagesse et humour, entre narration et poésie. Mais l'artiste aura beau faire émerger les hippopotames de l'eau, ramener à la vie Bambi et ses cornes fleuries, dessiner un sourire à ses rhinocéros ou faire revivre la vache de son enfance dyslexique (qu'elle surnommait Azaf), elle est toujours rattrapée par ce qui figure l'âme de son enfance, le petit oiseau. Il trône, dodu et rondelet, et tantôt se pose sur l'épaule du rhinocéros, tantôt survole les bustes en papier et si, à défaut de voler, l'oiseau de Maïa Tabet bascule volumineux et présent, il n'en demeure pas moins aérien et léger. Et même Darth Vader, la princesse Leia, Catwoman ou Batman se voient tous affublés d'un petit bec.

Maïa Tabet pousse même l'exercice plus loin. Pour témoigner de son effroi face à l'injustice du monde, elle crée Restons groupés, une œuvre née de ses nuits blanches suite aux attentats de Paris : des oiseaux regroupés se réchauffent, se consolent et se rassurent. « J'ai évolué dans les volumes et aujourd'hui mon approche est moins timide et plus aboutie », confie celle qui a exposé pour la première fois en 2005. L'art de Maïa Tabet n'a pas d'âge, il est tout aussi bien celui de l'enfance naïve et émerveillée que celui de l'adulte qui joue de ses obsessions. Il est ouvert à tout un chacun pour qu'il y développe son propre imaginaire.

Pour la petite histoire : l'artiste avoue que ses œuvres sont réalisées par un assemblages de petites bandes de papier journal collées les unes aux autres qu'elle enduit ensuite de peinture. Ainsi, les nécrologies et les mauvaises nouvelles cèdent la place à la rêverie et à la poésie : « L'Orient-Le Jour a toujours été mon fournisseur principal en matière première, explique-t-elle... Et depuis que la qualité du papier a changé, j'ai dû m'adapter. »

Galerie Platform 39
(The Alternative Artspace)
Maïa Tabet, sculptures et reliefs
Jusqu'au 4 novembre 2017

 

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