Rechercher
Rechercher

Premier bal

Pour sa première apparition sur la scène internationale, c'est plus d'un test qui attend le président Aoun à New York, où il doit se rendre demain pour prendre la parole devant l'Assemblée générale des Nations unies.

Test d'expression, d'éloquence, de capacité de persuasion pour commencer : exercice qui promet de tenir du funambulisme. Allié du Hezbollah et se voulant en même temps le président de tous les Libanais, Michel Aoun n'a pas toujours réussi en effet à résoudre, dans ses propos publics, la quadrature du cercle, à ménager équitablement la chèvre et le chou. De l'armée dont il fut pourtant le commandant, il disait ainsi, peu après son élection, qu'elle n'était pas assez puissante pour se passer du précieux appoint que constitue, selon lui, la milice. Or l'argument a peu de chances de convaincre une communauté internationale qui ne tient guère la formation pro-iranienne en odeur de sainteté et qui se fait déjà tirer l'oreille pour renouveler automatiquement le mandat de la force onusienne stationnée à la frontière avec Israël.

Test de stature supranationale ensuite, et ce n'est pas là le moins déterminant. L'Assemblée de l'ONU est souvent l'occasion d'interventions de la plus grande portée, voire historiques. Mais les beaux discours (Yasser Arafat affirmant brandir d'une main le fusil et de l'autre le rameau d'olivier) ou encore les gesticulations spectaculaires (le leader soviétique Khrouchtchev tapant furieusement de sa chaussure sur son pupitre), ce n'est pas tout. Non moins importantes sont en effet les rencontres bilatérales auxquelles donne lieu ce jamboree annuel de souverains et de chefs d'État, au Palais de Verre de Manhattan.

Comme tous ses pairs, le président Aoun serrera la main de Donald Trump, lors de la réception traditionnelle qu'offre à ses illustres hôtes le maître américain des lieux; mais en dépit des démarches de la diplomatie libanaise, aucun entretien en aparté avec le président des États-Unis n'a encore été programmé à ce jour.

Et puis, il n'y a pas que Trump. Le président Aoun est attendu prochainement à Paris, où il aura des conversations avec Emmanuel Macron ; mais aura-t-il le loisir de discuter, durant son séjour new-yorkais, avec le tsar Poutine, grand ordonnateur d'un éventuel règlement en Syrie ? Avec le président de cet Iran qui se targue d'étendre sa domination au Liban ? Avec le Turc Erdogan ? Avec le roi d'Arabie saoudite qui diabolise chaque jour un peu plus fort le Hezbollah ?

Quasiment toutes ces célébrités figurent déjà en bonne place dans le carnet de bal du Premier ministre, que l'on a vu récemment, entre autres escales, à la Maison-Blanche puis au Kremlin. De son père assassiné dont la gigantesque aura internationale faisait bien des envieux, au Liban et ailleurs, Saad Hariri a hérité bien des contacts et des amitiés de par le monde. Mais en aucun cas l'affaire ne devrait se résumer à une quelconque compétition d'ego, une course au prestige hors frontières opposant les deux pôles de l'exécutif. Fort divergentes certes sont leurs options, qu'il s'agisse du Hezbollah ou du régime syrien notamment ; par-delà leurs personnes cependant, en priorité sur leurs personnes, c'est le Liban qui a droit – qui en a même un pressant besoin – à la sympathie, à la considération, au respect du monde.

Issa GORAIEB
igor@lorientlejour.com

Pour sa première apparition sur la scène internationale, c'est plus d'un test qui attend le président Aoun à New York, où il doit se rendre demain pour prendre la parole devant l'Assemblée générale des Nations unies.
Test d'expression, d'éloquence, de capacité de persuasion pour commencer : exercice qui promet de tenir du funambulisme. Allié du Hezbollah et se voulant en même temps...