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Économie - Politique économique

Des économistes appellent à réformer l’État libanais en profondeur

Des experts appellent notamment les pouvoirs publics à plafonner le déficit public et à encourager les expatriés à investir dans le pays.

L’économiste Toufic Gaspard a notamment rappelé que la santé du secteur bancaire était étroitement liée à l’état des finances publiques. Jamal Saidi/Reuters

« Le gouvernement doit rapidement entreprendre des réformes (...) L'évolution des indicateurs financiers démontre à quel point la situation est dangereuse. » Tel est le message adressé par les économistes Toufic Gaspard et Sami Nasr aux pouvoirs publics.

Ils s'exprimaient mardi à Beyrouth dans le cadre de la première d'une série de conférences organisées à l'initiative du président du Conseil économique et social (CES), Roger Nasnas, et consacrées aux réformes nécessaires pour relancer l'économie du pays. Pour rappel, à l'exception de 2012, la croissance libanaise a décliné de façon continue entre 2009 (+10,1 %) et 2015 (+ 0,8 %), selon les derniers comptes nationaux publiés fin mars. Selon la Banque mondiale, le pays du Cèdre devrait enregistrer 2,5 % de croissance cette année contre 1,8 % en 2016.

 

(Lire aussi : Faut-il rééquilibrer la fiscalité au Liban ?)

 

Bilan « artificiel »
Autre signe inquiétant, selon M. Gaspard, l'évolution de la balance des paiements – qui mesure l'ensemble des transactions commerciales, financières et monétaires internationales entre résidents et non-résidents. Il rappelle que cette dernière « a enchaîné les déficits depuis 2010, exception faite de l'excédent (de plus de 1,2 milliard de dollars, NDLR) dégagé en 2016 sous l'effet des opérations d'ingénierie financière menées par la Banque du Liban (BDL) la même année ». Pour rappel, la Banque centrale avait cédé plus de 13 milliards de dollars de titres de dette publique en devises à des banques libanaises et leur avait racheté des obligations publiques en livres pour un montant équivalent, à un taux d'escompte de 0 %. L'opération lui avait permis de doper ses réserves brutes (à 34 milliards de dollars fin 216, soit +11,1 % en un an) en même temps que la balance des paiements. Un bilan « artificiel », juge M. Gaspard, rappelant que cette dernière était entre-temps repassée dans le rouge (-357,6 millions de dollars à fin mai).

Face à cette situation, les deux économistes préconisent en premier lieu « de plafonner le déficit public » – qui a atteint un niveau record en 2016, à 4,94 milliards de dollars. M. Gaspard suggère ainsi que son plafonnement soit fixé « par une décision conjointe du président de la République, du Premier ministre et du président du Parlement ». M. Samir Nasr recommande de son côté de « plafonner les dépenses des ministères et les déficits des établissements publics. » Pour M. Gaspard, contrôler le déficit public est nécessaire car l'État emprunte « pour financer ses dépenses au lieu d'investir dans des chantiers prioritaires ». Il rappelle également que la santé du secteur bancaire, « considéré comme un pilier de l'économie », est étroitement liée à l'état des finances publiques – la dette publique, qui a atteint 76,7 milliards de dollars en mai, est majoritairement financée par les banques.

 

(Pour mémoire : Le gouvernement veut « regagner la confiance » d’un secteur privé sceptique)

 

Parmi les autres réformes urgentes à mettre en œuvre, M. Gaspard préconise de « combattre sérieusement la corruption », de relancer la productivité de l'économie et d'encourager les Libanais à « vivre en dehors de la capitale », dont les infrastructures sont saturées. M. Nasr conseille de limiter le recours aux emplois publics – le coût des salaires et allocations sociales des fonctionnaires constitue habituellement le deuxième poste de dépenses après le service de la dette. Il appelle également à encourager les expatriés à investir dans le pays en mettant en place des incitations fiscales, citant par exemple « une exemption de l'impôt sur les intérêts sur les dépôts bancaires ». Ce taux a été relevé (à 7 %) par le Parlement il y a environ une semaine lors de l'adoption des mesures fiscales devant financer la nouvelle grille des salaires de la fonction publique.Pour rappel, la conférence s'inscrit dans le cadre d'un programme de l'Union européenne – lancé en juillet 2015 pour un an et demi et financé à hauteur de 1,85 million d'euros (2,15 millions de dollars) – visant à soutenir le dialogue social au Liban et dont l'un des volets prévoit de renforcer le rôle du CES. L'événement s'est déroulé en présence notamment du ministère de l'Économie et du Commerce, Raëd Khoury, qui a par ailleurs défendu l'adoption des nouvelles taxes – qui doivent entrer en vigueur d'ici à un mois en principe – face aux critiques de certains représentants du secteur privé.

 

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Ils s'exprimaient mardi à Beyrouth dans le cadre de la première d'une série de conférences organisées à l'initiative du...

commentaires (3)

ET EN LONGUEUR ET LARGEUR TOUT AUSSI !

LA LIBRE EXPRESSION

22 h 23, le 27 juillet 2017

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Commentaires (3)

  • ET EN LONGUEUR ET LARGEUR TOUT AUSSI !

    LA LIBRE EXPRESSION

    22 h 23, le 27 juillet 2017

  • Que de belles paroles, des vérités de la palisse, mais vous prêchez dans le désert Messieurs... D'acrobaties de Mr Salame à la Banque Centrale, à encore des réserves de liquidités acceptables mais qui tarissent, un seul constat: le pays va vers une faillite économique certaine si rien de logique est fait... Mais qui s'en fout de nos dirigeants qui ne le réalisent même pas et sont seulement intéressés à se remplir les poches... Et après moi, le déluge!

    Saliba Nouhad

    14 h 16, le 27 juillet 2017

  • Ces manifestations font plaisir aux conférenciers et organisateurs, les responsables politiques ne seront concernés que le jour où ils verront débarquer une mission du FMI et de la Banque Mondiale.

    Emile Antonios

    11 h 39, le 27 juillet 2017

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