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Économie - Construction

Saudi Oger : des sous-traitants réclament des dizaines de millions de dollars

Plusieurs centaines de sous-traitants de l'entreprise de Saad Hariri ont décidé de se plaindre auprès du roi Salmane afin de récupérer leur dû.

Aujourd’hui, l’avenir de Saudi Oger dépend des résultats d’un audit mené par PricewaterhouseCoopers de ses projets en cours et des sommes que lui doit le gouvernement. Archives Reuters

À la différence des employés de Saudi Oger, non payés depuis 18 mois, les sous-traitants de l'entreprise de BTP du Premier ministre Saad Hariri, qui traverse une crise financière sans précédent, s'étaient jusque-là peu fait entendre. Un comité qui dit représenter plus de 250 sous-traitants de deux projets importants entrepris par Saudi Oger à Djeddah a cependant décidé de réclamer l'aide du roi d'Arabie saoudite en personne, Salmane ben Abdel Aziz. Dimanche dernier, le comité lui a adressé une lettre détaillant leurs difficultés financières et lui demandant d'intervenir afin qu'ils récupèrent l'argent que leur doit Saudi Oger. Ce montant y est chiffré à 250 000 000 de riyals (66,6 millions de dollars). Une des membres du comité a précisé à L'Orient-Le Jour que ce chiffre est une « estimation ».

Une copie de la lettre, qui a pu être consultée par L'Orient-Le Jour, a également été envoyée à Mohammad ben Nayef ben Abdelaziz, vice-Premier ministre, ainsi qu'à Khaled ben Faïçal, gouverneur de La Mecque. « Le roi représente l'autorité la plus importante en Arabie saoudite. S'il ne peut pas nous aider, je ne sais pas qui le fera », glisse Walid Hassan Abou Hussein, propriétaire de l'entreprise al-Farida et président du comité de sous-traitants. Ces derniers ont participé aux travaux de la gare de Djeddah, dans le cadre du projet de la ligne de train à grande vitesse qui doit relier La Mecque à Médine (al-Haramein), dont l'ouverture a déjà été repoussée plusieurs fois, et à ceux du palais royal as-Salam.

L'Orient-Le Jour a pu parler à environ une dizaine des sous-traitants concernés par ces deux projets de construction. Dans certains cas, les retards de paiement durent depuis plusieurs années, dans d'autres depuis environ un an. Officiellement, les problèmes financiers de Saudi Oger proviennent de la cure d'austérité mise en place par le royaume – son principal client – depuis la chute des cours du pétrole. Contactée, Saudi Oger n'a pas souhaité commenter la plainte des sous-traitants.

 

(Pour mémoire : Saudi Oger : les employés libanais attendent toujours leurs arriérés)

 

 

Faillite d'Oger ?
Certains d'entre eux souhaitent que le roi d'Arabie use de ses pouvoirs pour déclarer la faillite de Saudi Oger afin que l'entreprise soit ensuite obligée de payer ses dettes. Ces dernières pourront être réglées grâce à l'argent que doit le gouvernement à Saudi Oger. En septembre, Reuters estimait que ce montant s'élevait à 30 milliards de riyals (8 milliards de dollars) pour travaux déjà exécutés. Mais il n'est pas clair que le roi peut déclarer la faillite de l'entreprise à la place de son propriétaire. Bien qu'un sous-traitant maintienne que c'est possible, l'avocat saoudien Majed Garoub argumente qu'une « intervention politique n'est permise ni par la loi des sociétés saoudienne ni par celle régissant la faillite des entreprises ». Concernant le règlement des dettes de l'entreprise en cas de déclaration de faillite, « c'est au cas par cas ».

Concrètement, Saudi Oger ne fonctionne plus en tant qu'entreprise depuis des mois. Les sites qui n'ont pas été repris par un autre constructeur sont à l'arrêt. « Le chantier de la gare de Djeddah a été fermé il y a trois mois. Depuis, nous n'avons plus le droit d'y pénétrer », rapporte un sous-traitant. Cela fait un an qu'il attend un paiement de 5,3 millions de dollars. Endettés, certains de ses collègues ont dû fermer boutique.

Dans leur lettre au roi, le comité de représentants des sous-traitants indique avoir essayé d'obtenir gain de cause par plusieurs moyens. « Nous avons écrit au Premier ministre (Saad Hariri), sans recevoir de réponse qui tende vers une solution », peut-on lire dans la lettre. Selon l'un des sous-traitants, les dirigeants de Saudi Oger ont répondu officieusement que l'entreprise « ne paierait pas ».

Le comité indique également s'être adressé aux « ambassades, au ministère du Travail, aux tribunaux et à la Saudi Railways Organization (SRO) », entreprise publique qui gère le transport ferroviaire en Arabie saoudite et qui a délégué le chantier de la gare de Djeddah à Saudi Oger. Une copie de la lettre envoyée à la SRO le 3 février 2017 a pu être consultée par L'Orient-Le Jour. D'après un autre sous-traitant, la SRO a refusé d'accuser réception de cette lettre. Contactés, des responsables de la SRO n'ont pas répondu à nos questions.

Dans la lettre à la SRO, les sous-traitants exigent une « réponse rapide » aux impayés. « Nous espérons que Saudi Oger puisse convaincre la SRO de lui payer tout ce qu'elle lui doit afin qu'elle puisse finir le chantier avec nous », explique un sous-traitant. Il craint que la SRO ne transfère le chantier à un autre constructeur tel que le turc Yapi Merkezi ou le saoudien El Seif, ce qui voudrait dire que ses chances d'être payé s'amenuiseraient car elles dépendraient entièrement de la SRO qui refuse d'entamer des négociations. Mais selon un autre sous-traitant, le chantier aurait déjà été accordé à Yapi Merkezi.

 

(Lire aussi : Les parts de Saudi Oger dans Oger Telecom bientôt rachetées ?)

 

Audit
Aujourd'hui, l'avenir de Saudi Oger dépend des résultats d'un audit, mené par le cabinet PricewaterhouseCoopers (PwC), de ses projets en cours et des sommes que lui doit le gouvernement saoudien, rapportait Reuters début avril. Alors qu'ils devaient être initialement transférés à Saudi Oger avant la fin janvier, les résultats se font toujours attendre. Cet examen doit permettre à Saudi Oger de savoir combien elle recevra en arriérés de paiement, et si elle pourra continuer à travailler sur les projets déjà entrepris.

Selon les sources anonymes de Reuters, l'un des résultats possibles de cet examen serait que le gouvernement verse une somme suffisante à Saudi Oger pour que les travaux en cours soient complétés. L'entreprise serait ensuite fermée. Mais les banquiers interrogés par l'agence ont peur que le gouvernement n'effectue aucun paiement. Saudi Oger ne pourrait donc pas rembourser ses prêts, estimés par Reuters à 13 milliards de riyals (3,47 milliards de dollars), et ferait faillite.

Les comptes bancaires de l'entreprise ont été gelés par les autorités après que plusieurs créanciers eurent entrepris des actions en justice contre Saudi Oger. Alawwal Bank et Banque Saudi Fransi ont récemment cherché à obtenir une ordonnance du tribunal pour être remboursés, suivant l'exemple de la National Commercial Bank (NCB) et de Samba Financial Group.

D'après des informations publiées par Reuters en septembre dernier, Saudi Oger devrait également des milliards de riyals contractés auprès de sous-traitants et de fournisseurs, et plus de 2,5 milliards de riyals (600 millions de dollars) en arriérés de salaires et indemnités.

 

Pour mémoire

Incertitudes concernant les créances de Saudi Oger

Imbroglio autour du gel des comptes de Saudi Oger

 

À la différence des employés de Saudi Oger, non payés depuis 18 mois, les sous-traitants de l'entreprise de BTP du Premier ministre Saad Hariri, qui traverse une crise financière sans précédent, s'étaient jusque-là peu fait entendre. Un comité qui dit représenter plus de 250 sous-traitants de deux projets importants entrepris par Saudi Oger à Djeddah a cependant décidé de réclamer...

commentaires (4)

Écoutez pour une fois que notre PM bosse faut surtout pas le déranger les enfants. Trop occupé, il n'a pas le temps à ces choses banales.

FRIK-A-FRAK

18 h 01, le 20 avril 2017

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Commentaires (4)

  • Écoutez pour une fois que notre PM bosse faut surtout pas le déranger les enfants. Trop occupé, il n'a pas le temps à ces choses banales.

    FRIK-A-FRAK

    18 h 01, le 20 avril 2017

  • Incroyable logique de l'absurde et allez comprendre: mais puisque Saudi Oger a déjà effectué des travaux en règle et que c'est le gouvernement Saoudien qui ne le paye pas à cause de mesures d'austérité, c'est donc ce dernier qui serait en faillite et ne paierait pas ses créanciers...et ceux-ci se tournent vers lui pour se faire justice? Le ridicule ne tue pas et l'arbitraire est maître: travailler avec ces gens-là, c'est du vrai gambling et vous n'avez aucun recours si vous tombez en disgrâce: que de Libanais ont eu cette mauvaise expérience, mais à plus petite échelle que notre Premier Ministre et se sont ruinés? Au moins, ce dernier a encore un toit sur la tête (sic), et peut se rattraper sur "Liban Oger".

    Saliba Nouhad

    14 h 50, le 20 avril 2017

  • QUAND UNE SOCIETE EST EN FAILLITE LES CREDITS QUI LUI SONT DUS SERVENT A PAYER AVANT TOUT LES ARRIERES DES EMPLOYES PUIS LES DETTES...

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 43, le 20 avril 2017

  • C'est la première fois que j'entends que la mise en faillite d'une entreprise permet de payer ses dettes. À ma connaissance, c'est tout l'inverse. Curieux.

    Marionet

    08 h 41, le 20 avril 2017

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