Rien ne va plus....

À deux semaines d'une élection présidentielle française très incertaine, rien ne va plus. Les abscisses ne sont plus très ordonnées. Le centre est moins que jamais au milieu. La droite a presque l'arme à gauche. La gauche est maladroite. Les dernières enquêtes d'opinions s'affolent. Mélenchon se hisse au niveau de Fillon, avec environ 19 % d'intentions de vote au premier tour. Le candidat de la droite et le héraut de gauche se rapprochent de Macron et Le Pen crédités, eux, de 23 %.
Rien ne va plus... Tout devient possible. Enfin presque. La droite qui, en décembre dernier, se voyait déjà en haut... des marches de l'Élysée n'a toujours rien compris et ne marche toujours pas d'un même pas.

Les partisans de Fillon et quelques irréductibles ne parlent plus que du « vote caché » comme d'un talisman qui porterait bonheur. Ils s'y accrochent comme des bigorneaux à leur rocher par gros temps. S'il ne s'agissait pas de l'avenir de la France, on aimerait en rire tant la démonstration, à défaut d'être simple, est simpliste : si Fillon, disent-ils, a déjà flirté avec les 30 % et si aujourd'hui il tangente avec la courbe des 20 %, c'est que ses électeurs se cachent. Oui. Ils ne voudraient plus, compte tenu des affaires dans lesquelles leur champion est empêtré, se vanter de voter Fillon. Mais le 23 avril, dans l'isoloir, ils auront « la » révélation.

Derrière cette théorie, certes un peu fumeuse et fantaisiste, on aurait imaginé un peu plus de cohésion de la part des ténors républicains. Que nenni. Au contraire. Certains sourient même en coin, la bave à la commissure des lèvres et attendent... comme des vautours de se jeter sur « le cadavre », persuadés que, sauf « miracle politique », Fillon sera « mort » au soir du premier tour.

La droite patine. La gauche dévisse. Les extrêmes battent de l'aile... Mais les jeux ne sont pas faits. Cette élection tiendra en haleine jusqu'au 23 avril 20h... Même si les intentions de vote donnent une indication des rapports de force à un instant donné, il est intéressant d'observer quelques chiffres.

Tout d'abord, Le Pen et Fillon bénéficient d'un socle solide d'électeurs. 90 % de ceux de la chef de file du Front national et 80 % de ceux du candidat conservateur se disent sûrs de leur choix. Chez Macron ou Mélenchon, ils ne sont que 60 %.

À cela, il convient de noter que le nombre d'indécis n'a jamais été aussi élevé, y compris chez ceux qui se disent certains d'aller voter. Près de quatre personnes sur dix n'expriment pas encore d'intentions de vote ou disent qu'elles peuvent encore changer d'avis.

Enfin, environ un tiers des électeurs annoncent vouloir s'abstenir, un record pour une élection présidentielle qui parvient d'habitude à mobiliser environ 80 % des Français.
Les jeux ne sont pas encore faits. Rien ne va plus...

* Frédéric Picard est rédacteur en chef du Figaro.fr

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