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Économie - Splendeurs et misères économiques

Il faut taxer les robots

Né à Beyrouth, Michel Santi est un macroéconomiste franco-suisse qui conseille des banques centrales et des fonds souverains. Il est l’auteur de « Misère et opulence » et de « Pour un capitalisme entre adultes consentants ».

N'est-il pas naturel de réfléchir à la taxation des robots alors que le salarié, lui, s'acquitte de toute la palette des impôts en vigueur au sein de nos économies occidentales ? Les progrès technologiques qui caractérisent notre société d'aujourd'hui sont sur le point de nous confronter à une situation inédite et critique où – presque du jour au lendemain – ces machines intelligentes remplaceront efficacement le travail de l'homme. Dans un contexte où la robotisation en est d'ores et déjà à fabriquer des hamburgers dans certaines entreprises de la Silicon Valley hors de toute intervention humaine, la taxation des robots – de plus en plus nombreux à accomplir les tâches humaines – permettra de financer des emplois où l'empathie et où la présence humaines sont indispensables.
Comme il n'existera quasiment plus de manutentionnaires, de nettoyeurs ou de conducteurs dans une quinzaine d'années, il est crucial – pour la justice économique et pour la paix sociale – que ce tournant soit bien négocié et anticipé. L'inéluctable robotisation en marche qui sera le marqueur des prochaines décennies doit en effet être opportunément – et donc financièrement – exploitée afin que ce progrès profite à l'ensemble de la société.
À ce titre, la taxation est l'instrument idéal qui autorisera de compenser de leurs pertes et d'indemniser les catégories de la population sinistrée par l'apparition de ces machines. Seules des mesures fiscales adaptées et des politiques publiques appropriées permettront à l'ensemble de notre société d'embrasser et d'accueillir favorablement ces avancées tout aussi révolutionnaires qu'inéluctables. L'État doit donc assumer son devoir de régulateur face à cet afflux de machines – et donc de main-d'œuvre très bon marché – dans le but de protéger celles et ceux condamnés à perdre leur emploi, et il doit tout entreprendre afin que robotisation ne devienne pas synonyme de creusement supplémentaire des inégalités.
La redistribution sera une problématique fondamentale qui incombera tout naturellement aux pouvoirs publics, qui devront également s'atteler à une taxation plus lourde des robots opérant dans certains secteurs d'activité. Le levier de l'impôt permettra en effet de freiner judicieusement – ou à tout le moins d'étaler dans le temps – cette robotisation qui mettra de plus en plus d'humains au chômage. La perception de ces taxes viendra financer des emplois d'une autre nature – comme les services à la personne – et autorisera un redéploiement et une reconversion autant quantitative que qualitative de ces salariés.
Le devoir de l'État est donc de préparer, au mieux des intérêts du citoyen, cette transition vers le règne de la machine productrice, quitte à en retarder l'échéance à la faveur de l'arme de la taxation. Il ne devra surtout pas céder aux inévitables pressions exercées sur lui par les entreprises qui agiront en vue d'alléger – voire de supprimer – toute imposition ciblant leurs robots. C'est uniquement à ce prix-là que le progrès technologique ne sera pas perçu comme une malédiction par le plus grand nombre.

N'est-il pas naturel de réfléchir à la taxation des robots alors que le salarié, lui, s'acquitte de toute la palette des impôts en vigueur au sein de nos économies occidentales ? Les progrès technologiques qui caractérisent notre société d'aujourd'hui sont sur le point de nous confronter à une situation inédite et critique où – presque du jour au lendemain – ces machines...

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