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Liban - Presse

La loi sur la déontologie professionnelle relance le débat sur la liberté d’expression

Depuis la nomination de M. Melhem Riachi à la tête du ministère de l'Information, l'idée d'une éventuelle loi sur la déontologie professionnelle dans les médias revient comme un leitmotiv dans les discours du nouveau ministre. Une idée qui serait, du reste, en voie de concrétisation. « Je n'arrêterai aucun programme télévisé, mais je prendrai des mesures d'escalade », a affirmé hier M. Riachi à l'issue de la séance du Conseil des ministres. « Je laisserai au Conseil national de l'audiovisuel la tâche d'élaborer et de remettre un rapport sur cette affaire », a-t-il ajouté.

« Nous avons reçu de nombreuses plaintes de familles, d'ONG, de députés et d'autres qui s'insurgent contre certains programmes télévisés qui porteraient atteinte aux mœurs », avait expliqué mardi M. Riachi à L'Orient-Le Jour, s'empressant d'assurer, face aux craintes de législations liberticides, que « la liberté d'expression est garantie ».

Deux événements ont récemment déclenché le débat autour de la loi sur la déontologie professionnelle au niveau des médias. Le premier est la couverture médiatique, jugée irresponsable à bien des égards, de l'attentat d'Istanbul, qui a coûté la vie à trois Libanais dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier dernier. Le second est la diffusion sur la LBCI du programme « Take Me Out – na2achit », qui continue à susciter une grande polémique. Ce programme accueille sur son plateau trente filles à la recherche du bon parti, à coups de regards qui ne prêtent à aucune confusion et de remarques à connotations ouvertement sexuelles, l'heureux récipiendaire étant un jeune homme lui-même en quête de l'âme sœur. Pour ses détracteurs, l'émission userait d'un langage vulgaire et inciterait à objectivation de la femme – entre autres reproches.

Alors que M. Riachi affirme que « la liberté d'expression n'a jamais été en contradiction avec la déontologie professionnelle », le sempiternel débat sur cette liberté et ses limites revient encore sur le devant de la scène. Est-il possible de concilier entre liberté d'expression et conformité à la moralité publique, un concept déjà assez vague et largement équivoque ?

Un travail d'orfèvre
« Nous ne pouvons pas juger le projet avant de nous enquérir du texte de loi, mais une seule chose est sûre : ce n'est pas la peine d'alourdir le droit libanais avec de nouvelles lois alors que celles qui existent déjà suffisent », affirme Hassane-Tabet Rifaat, référence en matière de libertés publiques, matière qu'il a longtemps enseignée à la faculté de droit et des sciences politiques de l'Université Saint-Joseph.

Pour M. Rifaat, « l'important serait d'assurer l'équilibre entre la liberté et la sécurité ». « Une fois prêt, le texte de loi devrait être examiné à la loupe et pesé sur la balance de l'orfèvre, pour qu'il n'y ait pas trop de restrictions », prévient-il, avant de poursuivre : « Il faudrait également ouvrir grands les yeux pour voir quel serait l'organe compétent pour contrôler la bonne application de cette loi. »

« Toute cette énergie investie dans l'élaboration de cette loi aurait dû être mieux placée », affirme M. Rifaat. « Premièrement, il vaut mieux assurer la liberté, la dignité et la sécurité du lendemain aux journalistes qui sont constamment menacés de se retrouver au chômage, et deuxièmement, de mieux former les journalistes de sorte qu'ils cherchent un surplus de culture et de savoir au lieu d'un scoop », précise-t-il.

 

(Lire aussi : Riachi : La liberté d'expression est garantie)

 

Le risque de dérapage
Pour sa part, Waël Kheir, directeur de la Fondation des droits de l'homme et du droit humanitaire, met en garde contre le risque de dérapage dans l'application d'une pareille loi. « Aujourd'hui, on s'acharne sur une émission jugée inappropriée, mais qui saura quelle serait la cible demain ? La loi saurait-elle prévoir un frein ? » s'interroge-il.

Selon M. Kheir, une législation dans ce domaine ne semble pas être urgente. « Le danger que court la liberté d'expression actuellement est de loin plus grave que celui que court la moralité publique », souligne-t-il.

 

« Nous avons libéré la femme »
« Une loi sur la déontologie professionnelle dans les médias ne limite pas nécessairement la liberté d'expression », estime Pierre Daher, PDG de la LBCI. M. Daher affirme qu'il est important de réglementer le travail et de suivre de près le texte de loi. « Au cas où le texte constituerait une atteinte à la liberté d'expression, nous mènerons une campagne pour exprimer nos remarques et nos inquiétudes », ajoute-t-il.

Concernant la polémique que suscite « Take Me out – na2achit », M. Daher explique les réactions hostiles par une « révolte de la la société patriarcale », qui s'acharne sur ce programme en particulier. « Depuis octobre, les téléspectateurs regardent des femmes prendre elles-mêmes les décisions et dire "non". Ce qui a dû les provoquer, dans la mesure où ils sont habitués à voir la femme libanaise soumise », martèle-t-il. « La LBCI a donné à la femme libanaise sa liberté », affirme Pierre Daher.

 

« La loi ne verra pas le jour »
Pour Michel Murr, PDG de la MTV, « les mass médias ne peuvent pas se permettre de se comporter comme n'importe quel individu qui s'exprime sur les réseaux sociaux ou dans la rue ». « Nous avons une responsabilité à assumer vis-à-vis des téléspectateurs, et la déontologie professionnelle veut que les chaînes diffusent des émissions qui ne font preuve ni d'obscénité ni d'indécence », estime-t-il. « Je ne m'inquiète pas pour la liberté d'expression parce que je ne pense pas que la loi verra le jour », affirme M. Murr, pour qui cette idée de loi sur la déontologie professionnelle n'est qu'une tentative de remettre sur la bonne voie ceux qui sont en perte de repères.

 

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"Depuis la nomination du Öûéééte Riéééchéh à l'Information, l'idée d'une loi sur les médias revient comme un leitmotiv dans son discours : « Je n'arrêterai aucun programme télévisé, mais je prendrai des mesures d'escalade », a-t-il affirmé." ! "Fascisme", dévastateur ou rampant ? Qu'en pense surtout son nouvel allié, Rommel l'oranginé ?

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

08 h 55, le 26 janvier 2017

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Commentaires (1)

  • "Depuis la nomination du Öûéééte Riéééchéh à l'Information, l'idée d'une loi sur les médias revient comme un leitmotiv dans son discours : « Je n'arrêterai aucun programme télévisé, mais je prendrai des mesures d'escalade », a-t-il affirmé." ! "Fascisme", dévastateur ou rampant ? Qu'en pense surtout son nouvel allié, Rommel l'oranginé ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    08 h 55, le 26 janvier 2017

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