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Nos Lecteurs ont la Parole - Sagi SINNO

Tu m’as appris

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Tu m'as appris que les larmes drainent souvent une tristesse qui tue ; qu'un sourire trahit parfois une douleur tue ; que n'est pas nécessairement mauvais celui qui ment ;
qu'un compliment est souvent le meilleur des arguments ; qu'une fleur séchée dans un livre l'inonde de souvenirs ; que l'oreiller d'un expatrié est hanté par le rêve de revenir ; que les draps souillés le sont souvent par la pureté sincère de l'amour, qu'ils restent propres quand la crasse du fiel s'installe entre deux vautours ; qu'il est temps de partir quand un baiser sonne creux au creux d'un cou ; qu'il faut semer l'avenir lorsqu'un regard irrigue les veines d'une joue ; que la plus précieuse des amitiés se grave dans le bois d'un pupitre ; que la créativité se gave dans l'esprit d'un petit pitre ; que les plus beaux yeux sont ceux qui nous regardent depuis toujours de la même façon ; que les balbutiements d'un cœur secrètement prisonnier peuvent payer sa rançon ; qu'un bonjour, même hésitant, peut crever l'abcès ;
que tu es digne d'être vécue dans tous tes excès ; que tu as le goût d'un café amer, adouci au nectar d'une lèvre ; qu'avec ton chaos gigantesque, tu as l'adresse d'un orfèvre ; que les rides sont les plus belles de tes empreintes ; que la passion est la plus habile de tes feintes ; que c'est sur un arbre qu'on fait nos plus beaux tatouages ;
que parfois tu nous délaisses comme des galets sur un rivage ; que toute perte, aussi grande soit-elle, n'est que relative ; que tout fleuve ne peut longtemps déborder de ses rives ; qu'il n'est jamais trop tard pour sauter dans ton train ; que pour un chômeur, rien ne manque de plus que ton train-train ; que rien ne vaut la fierté d'un front luisant et qui suinte ; que les fronts de la haine tiennent un discours puant l'absinthe ; que surfant sur les peurs, le populisme est la planche de tous les abus ; qu'accro aux concessions, un Premier ministre doit fracasser le calice qu'il a bu ; que rien n'arrêtera un réfugié fuyant la misère : ni l'humiliation ni les murs érigés en frontières ;
qu'accueillante, la mer immortalise le bruit des vacances ;
que pour les migrants, elle les noie dans le silence de l'arrogance ; que rien n'est plus cher pour un peuple que sa liberté ; que finit toujours par tomber tout tyran entêté ;
que les mots démolissent la confiance qu'on construit ; que seuls les mots réparent l'esprit que le fer a détruit ;
que malgré ta routine, tu nous laisseras toujours sur le cul ; que grâce à ton talent, tu démasqueras toujours les faux- culs ; que lorsque nous te haïssons le plus, tu nous amadoues par tous tes bonus ;
qu'ouverte à nos « hayété », « meine Liebe » ou « ma puce », tu englobes toute la diversité de nos us ; qu'il est trop facile de se replier dans le manichéisme aigri et rance ;
qu'il faut du courage pour savourer la complexité de tes infinies nuances ; que tu es la plus chère de toutes les raretés ;
que tes contradictions font ton immensité ; que tu puises ta richesse dans la différence de tes teints ; que Freud avait raison : tu es la plus forte des deux instincts ; que face à l'horreur et la mort qui rodent, le nid de ton souffle incessamment tu brodes ; que tu nous emportes dans le tourbillon de tes hauts et tes bas ; que tu es toujours le plus important des combats ;
que parfois tu es un professeur vraiment très dur ;
que tes leçons sont toujours une véritable cure ; que tu es souvent un roman inachevé ; que le jour de gloire finira par arriver ; que tu passes entre deux mains qui se frôlent pour la première fois ; que tu jaillis du premier cri d'un enfant qui pleure d'effroi ; que tu es un air de Brassens gonflant ses poumons à l'air de Sète ; que tu nous enchanteras encore davantage en deux mille dix-sept ; que, comme le dit Malraux, tu ne vaux rien mais rien ne te vaut ; que, comme l'affirme Sartre, tu es un perpétuel renouveau.

Sagi SINNO

Tu m'as appris que les larmes drainent souvent une tristesse qui tue ; qu'un sourire trahit parfois une douleur tue ; que n'est pas nécessairement mauvais celui qui ment ;qu'un compliment est souvent le meilleur des arguments ; qu'une fleur séchée dans un livre l'inonde de souvenirs ; que l'oreiller d'un expatrié est hanté par le rêve de revenir ; que les draps souillés le sont...

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Superbe

Nicole Hamouche

09 h 51, le 07 janvier 2017

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Commentaires (1)

  • Superbe

    Nicole Hamouche

    09 h 51, le 07 janvier 2017

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