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Moyen Orient et Monde - Interview express

« La victoire de Sanders dans les États du Nord aurait été extrêmement probable »

Barthélémy Courmont, directeur de recherche à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), répond aux questions de « L'Orient-Le Jour » sur les raisons du basculement du Michigan et du Wisconsin, entre autres, dans le camp républicain.

Photo d’archives datant du 12 juillet 2016, montrant les deux candidats démocrates, ensemble, Hillary Clinton et Bernie Sanders. Justin Saglio/AFP

Le Wisconsin était démocrate depuis 1988, le Michigan et la Pennsylvanie depuis 1992. L'Ohio, qui votait démocrate depuis 2008, tout en restant historiquement plus instable, a aussi été récupéré par le candidat républicain. Ainsi, Donald Trump a remporté ces quatre États, ce qui constitue un retournement historique.

Ces régions du nord des États-Unis forment la « rust belt », la ceinture de la rouille. Autrefois connue sous le label de « manufacturing belt » (ceinture des usines), son appellation a changé à cause des vagues de désindustrialisation qu'a subies la région.
Ces États représentent à eux seuls 64 grands électeurs, personne ne peut donc s'en désintéresser.

 

Quels ont été les facteurs déterminants du basculement des États du nord des États-Unis ?
L'identification géographique est claire : tous ces États appartiennent à la « rust belt », cette région qui correspond au bassin minier et industriel des États-Unis. Depuis plusieurs décennies, la présence démocrate était presque automatique, sauf pour l'Ohio. C'est donc une très grosse surprise. Les États du Michigan, de Pennsylvanie et du Wisconsin étaient considérés comme des bastions démocrates.

Il faut donc remonter aux primaires démocrates pour comprendre comment Hillary Clinton n'a pas réussi à capter ces régions. Elle avait notamment perdu contre son principal adversaire lors de la primaire, Bernie Sanders, au Michigan et au Wisconsin, où il y avait un vote très anti-establishment incarné par M. Sanders. Il y a une rupture entre l'image de Clinton, haute dignitaire du Parti démocrate, et l'attente des populations dans ces États qui veulent un candidat différent des élites traditionnelles.

Il faut ajouter qu'elle a très peu fait campagne dans ces régions. Elle ne s'est même pas rendue au Wisconsin depuis la convention démocrate d'août dernier. Elle présumait ces bastions pour acquis et n'a pas cherché à comprendre les raisons de son échec face à Bernie Sanders lors des primaires. Les électeurs de Sanders n'ont soit pas voté, soit choisi Trump.

 

(Lire aussi : Pourquoi Donald Trump a gagné la Maison-Blanche)

 

Si Bernie Sanders avait affronté Donald Trump, il aurait donc enrôlé l'électorat ouvrier de ces régions?
Le discours sur le retour à une politique de proximité, sortir Washington de sa tour d'ivoire et surtout le fait de redonner aux citoyens oubliés leur dignité, a eu un écho très fort chez les cols bleus du nord des États-Unis. Ces idées étaient au début portées par Sanders avant d'être récupérées par Trump. La victoire de Sanders dans toute cette région aurait été extrêmement probable. J'irais même plus loin : je pense sincèrement que Sanders aurait battu Trump à l'élection. La rhétorique et le positionnement anti-establishment de Trump n'auraient pas fonctionné avec Sanders, qui n'était pas un candidat du système et qui représentait l'aile gauche dure du Parti démocrate. Trump avait donc en face de lui l'adversaire idéal qu'était Clinton. Plus que la défaite des idées du Parti démocrate, c'est la défaite de l'establishment de ce parti, représenté par Hillary Clinton. Il va falloir changer la manière de faire la politique : on arrête cette prééminence de Washington et on revient à l'écoute des citoyens.

Et pour l'Ohio, qu'est-ce qui a influencé le vote des électeurs ?
L'Ohio, État-clé du scrutin qui rapporte 18 grands électeurs, est à l'instar de Michigan ou du Wisconsin une région sinistrée par la désindustrialisation. Il a donc été remporté par les républicains pour les mêmes raisons que ses voisins : un ressentiment contre les élites traditionnelles. Or celui-ci n'était pas un bastion démocrate, mais un « swing state » : il a voté pour Obama en 2008, Bush avant lui en 2000 et Bill Clinton encore avant. Les écarts entre candidats y sont souvent très réduits et les pronostics incertains, mais Sanders aurait pu très probablement remporter cet État.

 

 

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