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Moyen Orient et Monde - Je vous parle d’Alep...

XIII - Jalal, couturier à Alep-Est : « Il n’y a pas de mots pour exprimer notre souffrance »

On parlera plus tard d'Alep comme on parlait il n'y a pas si longtemps de Sarajevo, Srebrenica ou Grozny. On parlera de la politique de la terre brûlée menée par le régime syrien, les Russes et les Iraniens sous le regard des Occidentaux, impuissants. Parce que cette histoire tragique est en train de se passer à quelques kilomètres de nos frontières, parce que cette bataille symbolise, plus que n'importe quelle autre, la nature et les enjeux du conflit syrien, « L'Orient-Le Jour » a décidé de donner la parole aux Alépins pendant une semaine. Chaque jour, un Alépin, homme ou femme, vivant à l'est dans les quartiers rebelles, ou à l'ouest dans les quartiers loyalistes, anesthésiste, activiste, médecin, étudiant ou autre, racontera son quotidien dans l'enfer d'Alep.
Aujourd'hui, le témoignage de Jalal, couturier à Alep-Est.

Les étalages sont vides dans les souks d’Alep-Est. Abdelrahman Ismail/Reuters

Je suis couturier et marchand de tissu. Mais depuis le début du ramadan, je n'ai plus de travail. La vie est extrêmement difficile dans tous les sens du terme. En me levant aujourd'hui, je me suis dit la même chose que tous les jours : le plus important, c'est de rester en vie ! Je dois ramener du pain à la maison. On a droit à six « rabta » de pain un jour sur deux. Nous sommes 4 à la maison. Il nous reste du riz, du boulgour et des pâtes. Je pars le matin jusqu'à 15h parfois pour essayer de trouver un peu de salade ou du persil.
Chaque jour, on se dit que la veille c'était mieux. Moi, en tant qu'homme, je peux supporter, mais pour les femmes et les enfants, c'est beaucoup plus difficile. Votre enfant meurt de faim devant vous, vous faites quoi ? Le problème n'est pas seulement le coût de la nourriture, c'est le manque. Même ceux qui peuvent payer 100 fois le prix ne trouvent rien. Je ne sais plus quoi faire dans cette situation. Les marchés sont vides.
Il n'y a pas de gaz, pas de mazout. Les gens brûlent des chaises en plastique pour en faire du fuel. On réutilise les poêles à bois, qu'on ne voyait plus depuis cinquante ans au moins. C'est devenu comme un micro-ondes. Il faut trouver du bois pour cuisiner. Bientôt, on devra se chauffer, comment fera-t-on ? L'hiver approche et on essaie d'anticiper, mais c'est difficile. Aujourd'hui, je suis passé chez un vendeur de bois. Il n'avait presque plus rien et ses prix sont incroyablement élevés. Je n'ai pas les moyens d'en acheter. Pourtant, c'est vital. Il faut bien faire cuire les quelques aliments que nous arrivons encore à trouver. On est obligés de brûler les sacs en plastique.

Avant, on ne pensait pas à toutes ces choses, mais avec la guerre, on se retrouve plongé des dizaines d'années en arrière. Trouver de l'eau est un défi. L'électricité, n'en parlons même pas. Pour recharger la batterie de mon téléphone, c'est tout un cirque. C'est pareil pour recharger une batterie sur laquelle brancher une ampoule. On vit dans le noir. Il n'y a rien à faire la nuit. Et il est pratiquement impossible de dormir à cause des bombardements. Chaque mouvement, chaque action est une souffrance au quotidien. Une lutte pour la survie. Beaucoup de gens ont besoin de se soigner, mais c'est quasiment impossible. Ça fait trois jours que je tente de trouver un médicament pour l'hypertension pour une personne âgée de 70 ans. En vain. Sans ce médicament, elle risque de mourir à tout moment. Chaque heure, on apprend la mort de quelqu'un. Je vous raconte notre vie, mais ce ne sont que des mots. Il n'y en a pas pour exprimer notre souffrance réelle. Si vous me racontez votre vie, je peux l'imaginer. Mais vous, vous ne pouvez imaginer la nôtre. Ce que je vous raconte n'est rien comparé à notre réalité.
Chaque soir, on se dit que le lendemain sera pire, mais que malgré tout on fera tout pour survivre.

 

Nous avons demandé à Jalal de nous transmettre des images représentant son quotidien

 

 

"Je vous parle d'Alep", les précédents témoignages :

XII- Nour, étudiante à Alep-Ouest : « Nous n'aurons jamais la même qualité de vie ailleurs »

XI- Joumana Omar, travailleuse sociale à Alep-Est : « C'est un peu absurde de faire du shopping vu les circonstances, mais ça nous fait du bien »

X- Ahmad al-Ahmad, travailleur humanitaire à Alep-Est : « Les légumes ou les fruits ? On ne sait plus ce que c’est ! »

IX- Wissam Zarqa, professeur à Alep-Est : « La plupart des gens diplômés ont soit fui, soit été arrêtés ou tués »

VIII- Anouar Chehada, anesthésiste à Alep-Est : « Mon petit garçon a très peur des bombardements »

VII- Jack, étudiant à Alep-Ouest : « Chaque matin dans le bus, nous essayons de ne pas penser à ce qui se passe de l'autre côté »

VI – Ismaël Alabdallah, Casque blanc à Alep : Nous avons pu trouver à manger aujourd'hui

V- Dr Farida, gynécologue-obstétricienne à Alep : « C'était un jour comme un autre, sous les bombes »

IV- Abou el-Abed, combattant rebelle : Ma mère n’a jamais accepté que j’aille combattre

III-Ameer, photographe : Quand je croise les enfants du quartier, ils m’indiquent des corps en décomposition

II - Yasser, comptable : « Ne t’inquiète pas mon amour, nous sommes en vie, ne sois pas triste pour la maison »

I - Mohammad, infirmier à Alep : « Les enfants ne savent pas qui est Assad ou ce qu'est la rébellion »

 

 

 

Je suis couturier et marchand de tissu. Mais depuis le début du ramadan, je n'ai plus de travail. La vie est extrêmement difficile dans tous les sens du terme. En me levant aujourd'hui, je me suis dit la même chose que tous les jours : le plus important, c'est de rester en vie ! Je dois ramener du pain à la maison. On a droit à six « rabta » de pain un jour sur deux. Nous sommes 4 à la...

commentaires (5)

ON VOIT COMMENT ALEP EST REDUITE EN DEBRIS PAR LE DECHAINEMENT DEMONIAQUE DE BERIAOURSOFF ET DE NERONLIONOFF...

MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

19 h 40, le 29 octobre 2016

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Commentaires (5)

  • ON VOIT COMMENT ALEP EST REDUITE EN DEBRIS PAR LE DECHAINEMENT DEMONIAQUE DE BERIAOURSOFF ET DE NERONLIONOFF...

    MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

    19 h 40, le 29 octobre 2016

  • Qui ne compatis pas à la souffrance des civiles pris en otages à Alep Est ! Mais on sait aujourd'hui que des milliers de civiles d'Alep Est se sont réfugiés à Alep Ouest (chez le méchant Bachar...) avant et pendant l'installation des djihadistes à Alep Est. Et j'espère dans les mois qui viennent des médiats occidentaux et en particulier français la même information sur les souffrances des civiles à Mossoul.

    Rocchesani Marcel

    15 h 01, le 28 octobre 2016

  • Survivre sous la coupe des djihadistes ,est une horreur ... il faut mettre fin, à cette anarchie suicidaire....

    M.V.

    18 h 39, le 27 octobre 2016

  • Je voudrai juste informer Mme Caroline Hayek qu'à Alep ne vivent QUE des civils , mais qu'ailleurs à Mossoul ne vivent que des bactéries wahabites . Je suis sûr qu'elle ne le savait pas .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 02, le 27 octobre 2016

  • Chère Madame Caroline Hayek , il y a quelques jours je vous avais suggéré de faire un petit voyage à Alep ... est ce pour bientôt ??? je suis sûr que vous y gagnerez, ainsi que vos lecteurs, en vraies informations et en plus d'objectivité.

    Chelhot Michel

    06 h 52, le 27 octobre 2016

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