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À La Une - Proche-Orient

Les médecins, "héros" parfois involontaires du conflit israélo-palestinien

Dans le conflit vieux de près de 70 ans, les professionnels de la santé se retrouvent souvent pris entre deux feux.

Lorsque le médecin palestinien, Ali Chroukh, s'est récemment arrêté sur une route de Cisjordanie occupée pour secourir une famille de colons israéliens visée par des tirs palestiniens, son geste a été loué comme un rare moment de compassion. AFP / HAZEM BADER

Lorsqu'un médecin palestinien s'est récemment arrêté sur une route de Cisjordanie occupée pour secourir une famille de colons israéliens visée par des tirs palestiniens, son geste a été loué comme un rare moment de compassion.

Ali Chroukh, lui, affirme à l'AFP n'avoir fait que son devoir en respectant son serment de médecin. Mais dans le conflit israélo-palestinien, vieux de près de 70 ans, les professionnels de la santé se retrouvent souvent pris entre deux feux. Les soignants ne cessent d'affirmer qu'ils traitent tout le monde sans distinction mais des deux côtés, les accusations pleuvent: certains blessés seraient laissés sans soin par l'autre camp.

Le 1er juillet, en plein mois de ramadan, le docteur Chroukh était en route pour aller prier à l'esplanade des Mosquées à Jérusalem. Mais arrivé près de Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis près d'un demi-siècle par Israël, il a croisé une voiture qui venait d'essuyer des tirs. Le père de famille qui conduisait a perdu le contrôle de son véhicule. Lui est mort, sa femme et ses enfants ont été blessés.

Le médecin palestinien explique qu'il n'a pas pu poursuivre son chemin sans porter assistance, même s'il savait, au vu de la plaque minéralogique, que la voiture appartenait sans doute à des colons, ces quelque 400.000 Israéliens dont la présence dans les Territoires palestiniens occupés est illégale aux yeux de la communauté internationale.

 

(Lire aussi : « Ici, j’apprends à combattre l’ennemi israélien. J’aimerais les tuer (...) »)

 

'Pas un héros'
"Je ne suis pas un héros: j'ai suivi les préceptes de ma religion, de ma conscience et de ma profession. Nous avons prêté serment d'aider un ennemi avant un ami", dit Ali Chroukh à l'AFP.
Pour le docteur, "s'arrêter et porter assistance constituait une mission humanitaire". Il a malgré tout reçu de nombreuses félicitations de collègues palestiniens et israéliens pour avoir mis la politique de côté et respecté le serment d'Hippocrate.

Mais dans le domaine de la santé, comme dans d'autres, ne pas tenir compte de la politique reste difficile.
A Jérusalem, que l'Etat hébreu considère comme sa capitale indivisible, les ambulances du Magen David Adom (MDA) -l'équivalent israélien de la Croix-Rouge- ne pénètrent pas à Jérusalem-Est, la partie palestinienne occupée et annexée par Israël, sans escorte policière. MDA soutient que cette décision a été prise pour des raisons de sécurité.

Mais cette exigence peut provoquer des retards pour des traitements médicaux parfois urgents.
Du coup, outre le Croissant-Rouge palestinien qui opère normalement à Jérusalem-Est, des groupes israéliens tels que United Hatzalah se précipitent aussi sur les lieux, souvent à moto, et procurent les premiers soins jusqu'à l'arrivée des ambulances.

Ramzi Batesh a créé une antenne de cette organisation, israélienne à l'origine, à Jérusalem-Est il y a cinq ans parce que les retards pris par l'arrivée de secours avaient coûté des vies.
Tous les membres de l'antenne sont Palestiniens à l'exception de Josh Wander. "Je n'ai jamais été confronté à de l'hostilité de la part des gens qui m'appellent", assure ce colon israélien installé à Jérusalem-Est même s'il confie avoir eu "quelques problèmes pour entrer et sortir de certains quartiers".

 

(Lire aussi : Pour des vestiges archéologiques, Israël pourrait vider un village palestinien)

 

'Difficile équilibre'
La question de la nationalité des secours est d'autant plus sensible quand il s'agit d'attaques.
Or depuis octobre, les violences dans les Territoires palestiniens et en Israël ont coûté la vie à 217 Palestiniens, 34 Israéliens, deux Américains, un Érythréen et un Soudanais, selon un décompte de l'AFP. La plupart des Palestiniens tués l'ont été après avoir mené des attaques, selon les autorités israéliennes.

Le personnel médical palestinien affirme être de façon quasi-systématique empêché de soigner les Palestiniens blessés. A plusieurs reprises, des soldats israéliens ont agressé des soignants palestiniens sous le regard de journalistes.
L'an dernier, après une attaque qui a coûté la vie à un père et son fils habitant une colonie de Cisjordanie occupée, des proches israéliens avaient accusé le Croissant-Rouge palestinien d'avoir refusé de leur porter assistance. Israël avait dit vouloir porter plainte auprès des Nations unies, mais le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), dont le Croissant-Rouge et MDA dépendent, a conclu que les accusations étaient infondées.

Les ONG médicales internationales, qui interviennent majoritairement auprès des Palestiniens, sont tiraillées. Elles sont souvent accusées par des associations de la droite israéliennes d'être partisanes lorsqu'elles critiquent les effets de l'occupation israélienne.
Un responsable d'une de ces ONG confie à l'AFP, sous couvert d'anonymat, qu'il "est très difficile de trouver un équilibre" entre critiquer l'occupation israélienne et garder des relations suffisamment bonnes avec l'Etat hébreu pour qu'il permette "l'accès à des gens en situation désespérée" dans les zones occupées.

 

 

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