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Culture - Exposition

Elle tourne peut-être, la Terre, mais elle souffre sûrement...

La planète a mal. Ce n'est plus un secret pour personne. Aujourd'hui, plus de quinze artistes se mobilisent au Musée Sursock pour tenter de dénoncer ou de rêver... une terre en mal de vivre. « Et si on parlait du temps ? » est effectivement une exposition à vivre.

Une image tirée de la série de 4 photographies montrant des mines et des travailleurs au Congo signée Sammy Baloji.

La planète a mal et ses maux proviennent tous ou presque de l'activité humaine. Malgré une prise de conscience grandissante, les comportements peinent à évoluer et les crimes écologiques perdurent. Architectes, penseurs locaux et internationaux, cinéastes et plasticiens réfléchissent sur les façons d'appréhender notre impact sur le monde. Leur regard soulève une seule question, la relation de l'homme à la nature et le poids politique, social et économique sur une planète en voie de perdition.

Le bouleversement climatique, la croissance de la population mondiale et les dégâts causés à l'environnement mènent à l'effondrement de l'écosystème de la planète. Un certain nombre de menaces environnementales pèsent et le Liban, qui subit la pollution de l'air et de l'eau, les risques liés au changement climatique ainsi que les répercussions des innombrables conflits, n'est pas épargné. Le scénario noir, pourtant prévisible, laisse un héritage lourd, liés aux cendres toxiques ou dangereuses, au pétrole, aux métaux lourds, aux substances chimiques industrielles, aux décombres, aux déchets solides et aux eaux usées.

Que ce soit l'air dont les polluants en suspension ont atteint un taux de concentration si élevé qu'ils en sont devenus toxiques pour l'homme, l'eau qui se fait rare avec la hausse des températures et la diminution des chutes de neige, ou la guerre (l'une des plus graves catastrophes environnementales survenues pendant juillet 2006, qui a entraîné le déversement de 15 000 tonnes de pétrole dans la mer et pollué 150 kilomètres de côte libanaise, ainsi que plusieurs zones du littoral syrien), tous ces facteurs laissent les êtres humains face à une seule question: peut-on ne rien faire?

Les artistes se mobilisent
Marwa Arsanios, Sami Frangié, Sammy Baloji, Ursula Biemann, Rania Ghosn et Hadi Jazairy, Paulo Tavares, Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, Emre Hüner, Jessika Khazrik, Adrian Lahoud, Emeric Lhuisset, Nicholas Mangan, Sophia al-Maria, Pedro Neves-Marques, Marko Peljhan, Claire Pentecost, Monira al-Qadiri et Marwan Rechmaoui se mobilisent face à l'urgence du problème et lancent des discussions dans la sphère publique. Grâce à l'exposition «Et si on parlait du temps?» qui leur est consacrée, jusqu'au 17 octobre, au Musée Sursock*, ces thèmes seront explorés au Liban pour la première fois de façon créative pour essayer de secouer une conscience bitumée.
Pour l'ensemble de ces artistes, les habitants de la Terre sont devenus la force principale de transformation de notre planète. Celle-ci s'inscrit dans un nouvel âge géologique, l'Anthropocène, une ère dominée par l'action humaine. Ce terme dépasse le domaine géologique, il remonte à la révolution industrielle et est synonyme d'un ensemble de questions éthiques, politiques et scientifiques. Il décrit un point de non-retour et une remise en cause radicale de notre représentation du monde. Ce n'est plus uniquement l'impact sur l'environnement qui est incriminé, mais celui aussi sur les conditions météorologiques et sur la biodiversité.

 

Échec et mat(ière)
L'exposition sollicite le regard, l'imagination et toutes les facultés sensorielles. Elle prend son départ avec les images de Sammy Baloji, dont les mineurs éventrent la terre du Congo à force de bras, afin d'exploiter ses ressources et d'optimiser sa valeur économique. Les minéraux extraits serviront aux progrès de la technologie et l'humanité perd un peu plus son âme et se matérialise.

Une projection vidéo abstraite de Pedro Neves-Marques questionne les limites de l'exploitation et l'inconscience des hommes à épuiser les ressources de la terre, en consommant inexorablement ses richesses. Au centre de la pièce, Claire Pentecost interrompt le parcours et somme le visiteur à la réflexion. Le verre soufflé de Saïda/Sarafand – seule région où cette matière est recyclée – est décliné dans des formes lacrymales, que le ciel en deuil d'une biodiversité en perdition verse sur des dalles en papier mâché. Cette installation est soutenue par l'image d'un fossile provenant de Byblos, et vient secouer une mémoire qui pleure l'extinction des espèces.

 

Terre en déchets
Dans les années 90, les bagages s'arment de roues. À la même période, les bouteilles d'eau en plastique sont lancées sur le marché. L'image des voyageurs traînant leurs valises une bouteille à la main s'universalise. La mobilité ainsi facilitée participe à la pollution par les voyages en avion qui se multiplient. L'œuvre de Natascha Sadr Hagigian, une valise à moteur qui roule sur une bouteille vide, ne prendra pas l'avion et restera malheureusement à Berlin pour cause de frais surréalistes. L'artiste se contentera de dénoncer la mobilité et ce qu'elle a induit par des images et un texte que le visiteur pourra consulter.

Jessika Khazrik enquête sur les barils bleus qui servaient à la récupération des déchets et qui ont contribué à la toxicité de la ville. En regardant de loin, le mur qui s'habille d'images colorées enchante le spectateur, mais si on s'en approche, les images d'une Terre en déchets laissent coi. Dans les années 80, le scientifique Pierre Malychef a été accusé de faux témoignage pour les recherches sur le sujet et l'affaire n'a jamais été close. Quant à Marko Peljhan, il met en scène la pollution de la ville de Beyrouth par un graphe lumineux qui varie en constance, sur un écran noir, dans un espace occupé par des voix qu'il vous faut, grâce à un jeu habile, détecter. Enfin, Marwan Rechmaoui met en abyme les matériaux urbains, le plastique, le béton, l'aluminium, et réalise ainsi des sculptures pour honorer le travail de récupération.

 

Lire la Terre par ses entrailles
Rendre compte de l'asphalte utilisé, reconnaître un immeuble construit sous le mandat français par la présence de béton armé représentatif des années 20, déceler les mouvements tectoniques de la Terre grâce à l'argile préhistorique interrompu, situer le tsunami de l'an 500 par les galets que la mer a charriés, détecter le silex et les bouts d'amphore témoins d'une civilisation ancienne (romaine ou perse) ou se souvenir de l'incendie de Beyrouth en 30 av. J.-C... tel est le défi de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige qui font parler la terre. Leurs recherches s'appuient sur le carottage du sol qui sert à sonder et à donner une indication sur la matière et éviter de confondre une ruine et un rocher. Les artistes ont privilégié les terrains de fouilles ouvertes et posent une interrogation non simplement sur l'écriture de l'histoire par couches, mais sur celle qui s'inscrit par actions. L'image, difficile à comprendre, est soutenue par des dessins qui permettent de hiérarchiser les éléments. Ce que la photographie est incapable de faire. Beyrouth, place des Martyrs, quartier Sursock ou place Sadate... dévoilent leur passé au gré de la matière, et leur histoire cesse d'être linéaire.

En 1990, Michel Serres, avec son ouvrage Le Contrat naturel, développe bien avant l'actuel battage médiatique les tenants et aboutissants de l'urgence écologique. Il s'engage au cœur même d'une question fondamentale pour l'avenir de l'humanité. Un quart de siècle plus tard, les indigènes de l'Amazone en Équateur revendiquent les droits de la nature et exaucent le vœu de ce philosophe visionnaire. Sophia al-Maria et Pedro Neves-Marques mettent en images, en textes et en cartes géographiques ce projet ambitieux où des cas juridiques sont exposés avec pour seul dessein de faire de la nature la partie gagnante. Comme disait Michel Serres: «Aujourd'hui, nous ne nous battons plus entre nous, mais nous nous retournons tous ensemble contre le monde.»

Cette exposition est un prétexte pour s'interroger sur la détermination de l'homme à changer le cours de son destin, à mesurer l'intensité de l'amour qu'il porte à Gaia et à lui redonner ses titres de noblesse. Celle d'une terre nourricière et bienveillante qu'il lui faut protéger.

*L'exposition au Musée Sursock est mise en place par les commissaires Nataša Petrešin-Bachelez et Nora Razian. Horaires d'ouverture : de 10h à 18h, sauf les mardis. Nocturne les jeudis de 12h à 21h. Tél. : 01/202001.

 

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commentaires (1)

ELLE SOUFFRE DE CET ANIMAL BIPODE ET IDIOTEMENT EGOTISTE QUI REMUE SES ENTRAILLES, TOURMENTE SON SOL ET SON ATMOSPHERE ET RISQUE DE LA DESINTEGRER...

LA LIBRE EXPRESSION

08 h 18, le 18 juillet 2016

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Commentaires (1)

  • ELLE SOUFFRE DE CET ANIMAL BIPODE ET IDIOTEMENT EGOTISTE QUI REMUE SES ENTRAILLES, TOURMENTE SON SOL ET SON ATMOSPHERE ET RISQUE DE LA DESINTEGRER...

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 18, le 18 juillet 2016

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