Beyrouth s'enorgueillit à juste titre de l'inauguration du nouveau musée Sursock, magnifiquement rénové, appelé à devenir l'un des cœurs de la culture libanaise. Mais le nouvel établissement a délibérément choisi de tourner le dos à un pan entier de cette culture : la francophonie. Au prétexte que « l'anglais domine désormais », c'est la langue de Shakespeare qui côtoie l'arabe dans toute la signalétique du musée ainsi que dans les expositions permanentes. Le français fait une brève incursion sur la plaque d'inauguration du musée datant d'avant-guerre et dans l'une des premières expositions temporaires, sur l'histoire de Beyrouth. Et c'est tout.
Est-ce un combat d'arrière-garde de s'en offusquer ? À quoi bon dans ce cas continuer de lire en français dans ce quotidien ? À quoi bon nous, journalistes et éditeurs en français, nous battons-nous pour continuer de faire vivre cette langue et toutes les valeurs, la culture, la structure de pensée qu'elle véhicule ?
Le choix du musée est d'autant plus incompréhensible que le président de son comité, l'ancien ministre Tarek Mitri, la directrice Zeina Arida, la directrice adjointe Elsa Hokayem, l'architecte français Jean-Michel Wilmotte, son partenaire libanais Jacques Aboukhaled, et j'en passe, sont tous bien entendu francophones ; de même que la municipalité de Beyrouth (à qui Nicolas Sursock a légué sa demeure pour en faire un musée) : la ville appartient à l'association des mairies francophones.
La francophonie a pourtant depuis longtemps déjà abandonné la défense de la seule langue française au profit de la diversité culturelle. Un combat que le Liban, pays symbole des diversités – pas seulement linguistique – devrait être le premier à mener car il en va de son existence même. Il ne s'agit donc pas de réclamer le français à la place de l'anglais, mais de s'indigner de l'éradication pure et simple de la langue d'Amin Maalouf.
Sibylle RIZK
Rédactrice en chef du Commerce du Levant
Lire aussi
Mitri à « L'OLJ » : Un musée qui n'intéresse pas les jeunes est forcément condamné à mourir
La bienheureuse résurrection du musée Sursock
Pour mémoire
Le dernier regard de Cici Sursock
Le coup de neuf du musée Nicolas Sursock : symbiose de l'ancien et du moderne
commentaires (11)
Helas la France dans tout ça ne fait pas grand chose, il y a bien un ambassadeur avec quelques adjoints à la Résidence de Pins, ils n'ont qu'a se bouger, mais après tout quand on voit leur président (Mollande 1er) de ces francophones de France il ne faut pas s'attendre à grand chose, quel gâchis quand même....depuis de Gaulle la France s'enfonce toujours plus dans la médiocrité.
JAMES R
13 h 58, le 21 octobre 2015