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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

La conception freudienne de l’appareil psychique – 4 -

Nous avons vu comment, à l'écoute quotidienne de ses patients et à l'écoute des formations de son propre inconscient (rêves, lapsus, actes manqués et symptômes), Freud s'est mis à élaborer une théorie de l'appareil psychique. Il envisage d'abord que l'Inconscient, le Préconscient et le Conscient divisent le psychisme en trois lieux différents. Ces trois lieux ne sont pas statiques. Ils luttent en permanence l'un contre l'autre. L'Inconscient, notre mémoire refoulée qui lutte pour faire parvenir à notre conscience le souvenir des blessures de l'enfance, se voit interdire l'accès à cette conscience par une opposition farouche de la part de la Censure. Le sujet veut être reconnu pour toutes les blessures qu'il a subies dans son enfance en cherchant surtout une reconnaissance, et la censure bloque ce retour du refoulé pour protéger la conscience, occupée elle à travailler. Parce que la censure baisse pendant la nuit, l'inconscient prend le dessus : c'est le rêve, qui revendique la reconnaissance du sujet. Parce que la censure augmente pendant le jour, c'est le refoulement qui prend le dessus.

L'énergie qui se dégage dans cette lutte est de deux natures : l'énergie libre et l'énergie liée. Dans l'inconscient, l'énergie s'écoule librement d'une représentation (pensée) à une autre. Elle se déplace entre deux représentations liées entre elles par un chaînon associatif. L'énergie de plusieurs présentations peut aussi se condenser sur une seule qui représente alors toutes les autres. Le déplacement et la condensation constituent les deux mécanismes essentiels à la compréhension du rêve, du lapsus et du symptôme. On les retrouve aussi à la base des deux figures linguistiques majeures que sont la métaphore et la métonymie, auxquelles Lacan donnera toute leur importance comme on le verra par la suite.

En revanche, dans le système préconscient conscient, l'énergie va se lier de façon stable aux représentations. Freud donne l'exemple de l'activité de penser qui nécessite un investissement énergétique élevé sur les idées en cause et un minimum de déplacement par ailleurs. L'attention est ainsi expliquée par ce surinvestissement énergétique qui nécessite la mise en veilleuse des processus inconscients.
Progressivement, on s'achemine vers l'hypothèse non seulement de lieux psychiques différents (topique), en conflit entre eux (dynamique), mais aussi de deux modes de fonctionnement différents de l'appareil psychique (économique) : les processus primaires, qui caractérisent l'inconscient, et les processus secondaires, qui régissent le système préconscient conscient.

Avant d'aller plus loin, une remarque ici s'impose à l'adresse du lecteur.
D'abord, le lecteur ne doit pas s'y méprendre et considérer qu'il y aurait une quelconque cartographie cérébrale correspondant à cette topique freudienne, cherchant ainsi à joindre la biologie à la psychanalyse. N'oublions pas que Freud y renonça dès 1897. Par ailleurs, il appellera sa métapsychologie sa « fée ou sorcière métapsychologie » pour souligner que la métapsychologie l'aide à trouver un contenant pour tous les éléments cliniques qu'il observait. En partant des signes cliniques qui s'imposaient à lui, il cherchait à leur trouver une place dans sa métapsychologie. Et lorsque des éléments nouveaux apparaissaient, il n'hésitait pas à modifier cette métapsychologie. Comme par exemple lorsqu'il suppose l'existence de la pulsion de mort, qu'il oppose aux pulsions de vie, et qu'il remplace la première topique, inconscient, préconscient et conscient, par le ça, moi et surmoi. Ici des questions purement théoriques se posent : la deuxième topique remplace-t-elle et efface-t-elle la première ?

Sur ce point, Freud avait une grande souplesse théorique. Il appelait aussi sa métapsychologie « Mon enfant idéal, mon enfant problème ». Il avait un grand souci de transmission de la psychanalyse et il ne pouvait le faire en racontant purement et simplement le contenu de ses séances. Il fallait bien une théorie. En même temps, la transmission de la théorie psychanalytique posait un problème aux élèves. La conclusion s'imposait : Freud était en avance sur les élèves. Non pas sur le plan intellectuel évidemment, mais sur le plan analytique, dans le sens où c'est l'analyse personnelle qui permet de franchir les résistances, de même que la résistance à la théorie est la même que la résistance au retour du refoulé. Comme exemple principal, le temps qu'a mis Freud pour passer de la théorie de la séduction à la théorie du fantasme, en sachant que la théorie de la séduction était son ultime défense d'analysant qui refusait de voir son propre complexe d'Œdipe.
Cette digression sur le statut de la théorie en général était nécessaire afin que le lecteur puisse s'y retrouver. La prochaine fois, nous continuerons à développer le concept de Processus primaire et de Processus secondaires.

 

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