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Liban - Liban

Une semaine, un thème :#9 Le Liban malade de ses hôpitaux ?

« Mieux vaut soigner soi-même sa santé que faire soigner sa maladie », disait Confucius en l'an 525 av. J-C. Comme s'il redoutait déjà à l'époque que les principes sacrés et les outils thérapeutiques de la médecine chinoise traditionnelle, réputée à travers les âges et jusqu'à nos jours, ne soient dévoyés à des fins douteuses par des rebouteux sans scrupules.
Lui faisant en quelque sorte écho, et bien que la pratique médicale occidentale moderne soit régie par des lois, des règlements et souvent par un code de déontologie, les facultés de médecine font encore réciter aux nouveaux médecins un serment modernisé qui s'inspire de celui qu'Hippocrate le Grec avait formulé au IVe siècle av. J-C. L'objectif était simple et beau : rappeler aux nouveaux médecins, dans un cadre solennel, qu'ils sont liés à des obligations légales, morales et éthiques.
La grande majorité des médecins libanais, dans leurs propres cliniques et dans les établissements où ils exercent, font honneur à leur serment. Considérés comme le fleuron de leur profession, ils sont pour la plupart une référence dans tout le Moyen-Orient. Idem pour la plupart des établissements hospitaliers, extrêmement courus et appréciés par les patients des pays alentours.
Cependant, un peu trop souvent, des dérapages et des dysfonctionnements graves, mais somme toute humains, se produisent, marquant fortement l'opinion et finissant par jeter plus ou moins injustement l'opprobre sur des hommes qui ont beaucoup sacrifié pour acquérir et dispenser leur savoir.
Ceci accouche de réflexes corporatistes maladroits qui aiguisent encore plus les rancœurs contre les médecins et les hôpitaux, décuplant ainsi une suspicion tenace.
Erreurs médicales, tarification des soins, traitement des malades, accès à la santé, des sujets auparavant tabous, mais désormais sur toutes les lèvres. Pour une réflexion calme, sereine et responsable, L'Orient-Le Jour a fait appel à trois praticiens de renom : Assaad Rizk, connu comme le loup blanc pour tout le bien qu'il faisait dans son hôpital pendant la guerre, Georges Aftimos, ancien président de l'ordre des médecins, et Antoine Courban, professeur de médecine à l'USJ, combattant acharné en faveur du respect scrupuleux de la déontologie et de l'éthique.
Reste une cause, éternelle : celle des hôpitaux publics, réplique ubuesque d'une administration en tous points condamnable, malgré les efforts, parfois donquichottesques, d'un ministre socialo-progressiste, Waël Bou Faour, qui, du four au moulin, ne cesse de courir, triste preuve par neuf que Sisyphe est sûrement libanais.

Où en sont nos hôpitaux ?


Photo Michel Sayegh


Dr Assad Rizk
Ancien ministre

Nos hôpitaux sont depuis quelque temps la proie de médias à l'affût de nouvelles à sensation qui finiront par affecter injustement leur réputation.
Parmi les cas rapportés, il s'agit le plus souvent de cas d'urgence qui n'ont pu être admis à l'hôpital ou qui ont reçu des soins insuffisants.
Y a-t-il des manquements de la part des hôpitaux ? Pourquoi ? Comment les éviter ?
Commençons par rappeler les caractéristiques d'un hôpital moderne. Tout hôpital doit combiner harmonieusement 3 éléments d'importance égale :
Un édifice conçu, construit et équipé par des spécialistes suivant des normes internationalement reconnues.
Une équipe formée de médecins, d'un personnel soignant, de techniciens, le tout en nombre suffisant pour assurer les meilleurs soins, ainsi que des services hôteliers et un département d'entretien, fonctionnant sans failles, 24 heures sur 24.
Enfin une administration qui accueille, surveille et contrôle la qualité des soins.
Dans ce domaine nous pouvons être fiers de nos hôpitaux au Liban.
Tout cela a évidemment un coût de plus en plus élevé, en raison des nouvelles technologies et de leur renouvellement fréquent. Mais quel qu'en soit le coût tous les malades ont le droit d'exiger les meilleurs soins.
Comment nos hôpitaux sont-ils administrés ? Qui paye la facture hospitalière ?
Le système hospitalier dans le monde est divisé en hôpitaux publics dont les budgets relèvent de l'État et les hôpitaux privés payés par des tiers payants.
Les hôpitaux publics sont des hôpitaux généraux capables de soigner tous les malades, sans exception, et tout particulièrement tous types d'urgences... Il y eut un effort dans les années 90 pour doter tout le Liban d'hôpitaux modernes dont l'hôpital gouvernemental Rafic Hariri de Beyrouth, le plus grand hôpital du pays, 500 lits, doté des équipements les plus modernes et d'une administration efficace. Il est actuellement malheureusement en état de décrépitude, abandonné à son triste sort. Quant aux autres hôpitaux publics, il n'en reste plus qu'une douzaine qui sont encore fonctionnels dans quelques coins du pays.
L'État s'est donc révélé incapable de gérer ses hôpitaux publics qui auraient dû couvrir toutes les urgences médicales et s'est déchargé de ses responsabilités sur les hôpitaux privés qui ne sont pas tous habilités à supporter cette charge.
Il existe actuellement au Liban 110 hôpitaux de moyen séjour accrédités par le ministère de la Santé, la majorité ont moins de 70 lits, un certain nombre à entre 70 et 150 lits et quelques-uns de plus de 150 lits, le tout groupe près de 9 000 lits. Ce nombre de lits est actuellement suffisant.
De par leur structure, leurs équipements, leur personnel, un grand nombre d'entre eux est incapable de soigner tous types de malades ou d'urgences.
Que ces hôpitaux privés soient gérés par des associations à but non lucratif ou par des particuliers, ils ont tous le devoir de rentabiliser leurs investissements et donc de s'informer à chaque admission d'un malade de sa solvabilité, sinon c'est la faillite.
Comment sont payés nos hôpitaux privés ?
Plus de 50 % des Libanais profitent d'une couverture médicale grâce à l'assurance-maladie de la CNSS, des mutuelles des fonctionnaires, des caisses maladie des forces armées, seul un petit nombre a recours aux assurances privées pour une couverture complémentaire ou totale. Tous ces organismes ont des barèmes de paiement négociés avec le syndicat des hôpitaux, les modalités de règlement sont actuellement satisfaisantes.
Le reste de la population n'a aucune couverture médicale, elle est donc soignée dans les hôpitaux privés aux frais du ministère de la Santé qui signe tous les ans avec les hôpitaux privés accrédités des contrats qui fixent des forfaits annuels suivant des tarifs qui varient avec la classe de chaque hôpital.
Cette facture hospitalière est de plus en plus lourde et pose des problèmes.
En effet les modalités de paiement de ces factures aux hôpitaux par le ministère de la Santé comportent des failles qui sont à l'origine du problème des admissions dans les hôpitaux privés des malades graves ou des urgences :
1- En premier, certains tarifs sont ridiculement bas. Par exemple le prix d'une journée d'hospitalisation dans un hôpital cinq étoiles qui comporte le séjour, trois repas, les soins de jour et de nuit est de 60 dollars tout compris, soit le tarif d'une nuit dans une auberge !
2- Quant aux montants forfaitaires alloués à chaque hôpital, ils ne peuvent être dépassés. La crainte du dépassement entraîne une limitation des admissions des malades graves ou des malades en urgence car la récupération des montants facturés en plus du forfait annuel est actuellement problématique. En effet le ministère de la Santé doit ce jour, aux hôpitaux privés, des arriérés pour les années 2000 à 2011 qui s'élèvent à prés de 180 milliards livres libanaises !
Voici comment les hôpitaux privés se débrouillent pour récupérer leurs impayés :
– Le moyen le plus simple et le plus courant consiste à gonfler les factures en trichant sur les prestations données aux malades.
– Faire payer aux malades les différences de prix : honoraires médicaux et soins.
– Refuser d'admettre les malades graves dont les soins sont prolongés et coûteux.
– Enfin refuser d'admettre les urgences imprévues dans le forfait annuel et qui risquent de ne jamais être payées.
Malgré les difficultés, il y a des solutions faciles à appliquer immédiatement :
1- Pour les hospitalisations courantes, fixer des tarifs justes à condition d'établir un contrôle efficace de la facturation par des contrôleurs indépendants du ministère. Cela tranquillisera les hôpitaux et réduira la facture hospitalière.
2- Quant au problème des urgences, il doit être traité à part par le ministère de la Santé au niveau national : créer un Samu qui assure le transport de toutes les urgences dans des hôpitaux choisis par des équipes de secouristes compétents, qui couvrent tout le pays, en coordination avec les services existants : Croix-Rouge, Défense civile...
Enfin prévoir un budget indépendant consacré à ce service essentiel.
Voila quelques suggestions utiles et immédiatement applicables en espérant avoir un jour un service de santé national à la hauteur des espérances de nos citoyens, de notre remarquable corps médical et de l'excellent niveau de nos hôpitaux privés.

 

Médecin : profession à hauts risques




Dr Georges AFTIMOS

Ancien président de l'ordre des médecins

Nous assistons depuis quelque temps à des cabales dirigées contre le corps médical libanais à l'occasion d'incidents malheureux.

La conséquence est une rupture du climat de confiance qui doit régner dans la relation médecin-malade et une propagande péjorative et même désastreuse pour la médecine libanaise réputée être jusqu'à présent l'une des plus performantes sinon la meilleure médecine dans la région.
Je voudrais au départ dresser une comparaison entre le médecin et la médecine d'antan et la situation actuelle. En effet, en revenant quelques décennies dans le temps, le médecin était aimé, respecté et même quelquefois craint par ses patients. C'était l'ami, le confident, l'homme de confiance. La médecine se pratiquait en ambulatoire à la maison. C'était une médecine douce, non invasive, peu coûteuse.
Actuellement le médecin est devenu spécialisé, et même parfois surspécialisé, souvent très occupé, pratiquant une médecine habituellement hosptalière, coûteuse et fréquemment invasive et interventionnelle conduisant généralement à une guérison parfois spectaculaire mais grevée quelquefois de complications et d'effets secondaires plus ou moins graves.
Dans le même temps, le patient et ses parents ont également évolué. Ils sont devenus plus instruits, plus au courant de la chose médicale avec un accès facile à des informations plus ou moins exactes grâce à l'Internet et aux médias.
Faut-il aussi ajouter le rôle des compagnies d'assurances intéressées par les contrats d'assurance contre les erreurs médicales (malpractice). Tous ces facteur ont conduit à la révision du contrat de confiance qui liait le médecin à son malade. Ce dernier est devenu plus exigeant, moins confiant et enclin à intenter des procès en se disant que devant cette médecine coûteuse et quelquefois dangereuse pourquoi ne pas essayer d'obtenir un dédommagement surtout si c'est la compagnie d'assurances qui paie.
Je veux dans ce qui suit essayer de rappeler les principes de base qui régissent la relation médecin-malade et les conséquences. Entre le médecin et son malade s'établit un contrat tacite qui exige du médecin de répondre promptement à la sollicitation de son malade et lui administrer les soins nécessaires selon les normes scientifiques du moment et de respecter à son égard les règles de précaution et de sécurité.
Les normes scientifiques sont actuellement bien définies par des protocoles thérapeutiques et les règles de la médecine basée sur l'évidence. Le médecin est donc lié par un contrat de moyens et non pas, sauf certains cas particuliers, par un contrat de résulat.
Ces règles de conduite ont été définies par le code de déontologie et par la loi sur le consentement éclairé. Ceci ne signifie pas faire signer par le malade ou sa famille un formulaire qui dégage le médecin de toute responsabilité en cas d'accident, mais il consiste dans l'obligation pour le médecin d'expliquer en détail au malade sa situation médicale, les moyens thérapeutiques existants et les effets secondaires. Le malade sera au courant et décidera ainsi de la conduite à tenir et de ses conséquences. L'erreur médicale est donc le résultat du non-respect de ce contrat de moyens et de l'absence d'un consentement éclairé. Le malade doit apporter la preuve indubitable de ce manquement.
L'ordre des médecins a le devoir de veiller aux bonnes pratiques à travers un comité d'investigation professionnelle qui étudie le dossier soumis et qui essaie d'établir, à la lueur des faits, la réalité d'une erreur médicale.
Au cas où la responsabilité du médecin serait établie, il est déféré devant le conseil disciplinaire qui décide de la sanction à infliger, qui va du blâme à la suspension à vie selon l'importance du délit. Le malade ou la famille peuvent également intenter un procès devant le tribunal civil et la décision des instances professionnelle ou judiciaire est indépendante et peut même être contradictoire.
Pour éviter les écueils et dans un souci d'équité, il est primordial que ces drames médicaux ne soient pas médiatisés avant même qu'un jugement définitif ait été prononcé. Cette publicité autour de mutilation et de décès et autres ne serviraient qu'à exciter l'opinion publique et influencer le conseil disciplinaire et les juges qui perdent souvent toute objectivité devant un fait médical compliqué. L'ordre des médecins doit de son côté optimiser le travail du comité d'investigation et du conseil disciplinaire.
La composition de ce dernier devrait être révisée et les membres devraient être nommés parmi les médecins sages, expérimentés et courageux et non plus élus par l'assemblée générale.
Les travaux du conseil disciplinaire doivent être rendus publics afin que le malade libanais soit assuré que l'instance professionnelle est en train d'assurer son rôle de censeur du médecin et de défenseur du malade.
En dernier et concernant la responsabilité du médecin qui n'a pas respecté inintentionnellement le contrat tacite, il doit répondre de son acte selon la responsabilité civile et non selon la responsbilité pénale.
J'espère que les recommandations distillées à travers ces quelques lignes contribueront à rétablir le contrat de confiance.


Quand la santé n'est pas un droit mais un service




Antoine COURBAN
Docteur en médecine Professeur à l'USJ

Plusieurs affaires ont récemment ébranlé la confiance à l'égard du médecin comme s'il existait, au Liban, un face-à-face entre le corps médical et l'opinion publique via les médias. Rien n'est aussi malsain, car la confiance est la pierre angulaire de la relation soignant-soigné. La médecine hospitalière est très performante au Liban, vu la haute qualité des infrastructures techniques, mais elle ne résume pas toute la médecine. De même, les grandes pathologies, nécessitant un déploiement de lourds moyens médicotechniques, ne constituent pas toute la panoplie de la misère de l'homme face à la maladie.
Ces affaires posent plusieurs questions sur l'image du médecin, sur la représentation du concept de santé, sur la nature de l'acte médical, sur le droit à la santé, sur l'organisation des soins, sur le sens de la faute professionnelle, de la déontologie et de l'éthique médicales.
Le médecin généraliste qui reçoit chez lui et se déplace chez ses patients était le modèle dominant jusqu'aux années 1980. Il constituait, dans sa personne, l'assise d'un ordre social qui tend à disparaître. Le médecin garde son aura quasi sacrée, surtout dans nos régions, mais cette image est de plus en plus tributaire de facteurs externes à la relation médecin-malade ; à savoir l'accès à des moyens techniques hautement performants au coût souvent exorbitant. Ces derniers ne sont plus de simples outils qui prolongent les mains et les yeux du médecin. Ils ont leur logique propre qui s'impose tant au médecin qu'au malade. La haute technologie agit comme troisième acteur, à part entière, dans la relation médecin-malade. Elle est devenue un filtre entre l'offre médicale et la demande de soins. Un tel filtre défigure-t-il les deux autres acteurs, en les adaptant à sa logique propre ?
En 1974, Ivan Ilitch débutait son ouvrage célèbre, Némésis Médicale, par la phrase : « L'entreprise médicale menace la santé. » En 2004, dans une nouvelle édition de son essai, cette phrase se voit modifiée en : « La recherche de la santé est devenue le facteur pathogène prédominant. » Le médecin passe ainsi, en à peine une génération, d'un agent du « biopouvoir » à un produit de consommation d'un marché où la performance techniquement induite agit comme un impératif absolu. La santé parfaite devient une utopie exigeante dont la médecine moderne serait obligatoirement la pourvoyeuse. On oublie que la maladie et la mort sont des issues naturelles.
Commentant une telle situation, le célèbre physicien d'origine libanaise ,sir Michael Attiyah, ancien président de la Royal Society de Londres, déclarait dans un discours qu'il prononça en 1997 devant la reine Élisabeth II : « Dans le monde actuel, la communauté scientifique risque de perdre, à la fois, son identité et sa vocation. L'ethos spécifique de la science devient de plus en plus difficile à discerner. À partir d'aujourd'hui, la science et le grand capital sont des partenaires à part entière. La science, aujourd'hui, est perçue comme faisant partie intégrante de l'establishment. » Une telle confusion produit ses effets les plus nocifs dans des sociétés où il n'existe pas de barrières de protection qui encadrent l'accès aux soins de tout citoyen. Tel est le cas du Liban qui ne dispose pas d'un code de la santé qui proclame que cette dernière est un droit. Si on ajoute à cela la gabegie administrative et la corruption endémique, on comprend mieux les dérives qui parfois suscitent des scandales ou qui laissent croire que le médecin libanais bénéficierait d'une sorte d'impunité due à la toute-puissance de la corporation médicale, ce qui est loin d'être tout à fait vrai.
Les médecins demeurent des hommes. On trouve parmi eux d'authentiques âmes nobles, de même que des crapules mafieuses. Malheureusement les médias font difficilement la distinction entre les uns et les autres. Ainsi, on a vu récemment un présentateur se déchaîner contre un praticien ayant reconnu une erreur de diagnostic, sans doute par négligence. Le même présentateur n'avait pas hésité à recevoir, quelques mois auparavant, un personnage douteux qui dispense des soins sans être médecin, mais qui a pu ainsi faire bénéficier ses préparations de la propagande médiatisée. Inutile de rappeler de nombreuses émissions où des escrocs se permettent de pratiquer illégalement une médecine foraine.
Le public ignore que la notion de faute médicale professionnelle se définit exclusivement comme une insuffisance de moyens mis à la disposition du malade. Une erreur de diagnostic n'est donc pas une faute professionnelle si de tels moyens existent et si on peut financièrement y accéder. De même, le médecin ou l'hôpital privé peut refuser ses services à un malade à condition d'assurer la continuité des soins. Ceci pose donc le problème de l'organisation d'une telle continuité à l'échelle nationale. Les hôpitaux privés ne sont pas des établissements charitables mais des entreprises. Nul ne peut exiger d'eux de se substituer au service public et d'assurer l'accès aux soins de tout un chacun. La réforme administrative du secteur public, la réforme de la couverture de la maladie et de l'invalidité, la réforme de modalités de gestion qui remontent parfois à la période ottomane sont des nécessités criantes. Dans une démocratie qui se respecte, un ministère de la Santé n'a pas à jouer le rôle de
l'Assistance publique, comme au Liban. Celle-ci est du ressort des autorités communales. Mais dans une démocratie qui se respecte, l'acte médical demeure un acte citoyen et doit donc être contrôlé et surveillé dans le cadre des lois.
On dira : Mais que font les universités et leurs facultés de médecine ? Pourquoi n'augmentent-elles pas leur formation en éthique ? Gordon Marino répond : « Il existe actuellement un grand nombre de professionnels appelés éthiciens et qui agissent à titre de super-ego de n'importe quelle profession. » Quant à Dominique Lecourt, il ironise en disant : « Que valent les avis des experts-éthiciens ? Sont-ils des suppléments d'âme dont on saupoudre des décisions administratives ? » Ce n'est pas de savoir théorique et d'apprentissages supplémentaires dont nous aurions besoin, mais de plus de courage et d'audace, mais ceci ne s'obtient pas en mémorisant des paradigmes méta-éthiques. Le véritable défi moral ne réside pas dans une indigestion par accumulation de connaissances et d'apprentissages, mais à prendre conscience que tout savoir nous aide à nous conformer à ce qui est inscrit dans notre chair, à savoir la conscience morale. Ce ne sont pas les fameuses « valeurs » comme objets naturels qui doivent être apprises mais des dispositions tout aussi naturelles comme la bonté, la miséricorde, l'honnêteté, la rigueur intellectuelle, la mansuétude, la patience, le courage, la douceur, l'aménité, la générosité, etc. La médecine, comme tout autre apprentissage, n'est pas une fin en soi mais un moyen en vue de dévoiler toute la grandeur d'âme qui humanise chacun de nous.
Le Liban est malade, non de ses hôpitaux, mais de l'ensemble de son non-système en matière de soins de santé. Malheur à une nation où la santé n'est pas un droit mais un service dont la qualité dépend de l'offre et de la demande. Aux uns, la plus grande qualité au prix le plus fort. Aux autres, une qualité offerte charitablement. Et tout cela dans le désordre.


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ET DE QUOI N'EST-IL PAS MALADE CE PAUVRE PAYS ? TOUTES LES LÉSIONS ET TOUS LES VIRUS DU MONDE Y SONT FERMEMENT INSTALLÉS ! LE PROFIT ET L'INTÉRÊT PRÉVALANT SUR LA CONSCIENCE MÊME...

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 01, le 27 juillet 2015

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Commentaires (2)

  • ET DE QUOI N'EST-IL PAS MALADE CE PAUVRE PAYS ? TOUTES LES LÉSIONS ET TOUS LES VIRUS DU MONDE Y SONT FERMEMENT INSTALLÉS ! LE PROFIT ET L'INTÉRÊT PRÉVALANT SUR LA CONSCIENCE MÊME...

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 01, le 27 juillet 2015

  • Constat terrible qui devrait impacter la conscience de n'importe quel entité ou haut responsable en charge de la santé publique, sauf au Liban pour les raisons que nous subissons au quotidien.

    Christine KHALIL

    09 h 37, le 27 juillet 2015

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