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Économie - Crise de la dette grecque

L’euro garde la Grèce

Après un week-end de négociations très tendues, les dirigeants de la zone euro ont conclu hier un accord qui permet de maintenir la Grèce dans l'union monétaire, mais lui impose la perte d'une partie de sa souveraineté et une nouvelle cure d'austérité.

Cet accord éloigne le spectre d’une sortie désordonnée de la Grèce de la monnaie unique, même si les ministres des Finances l’avaient envisagée dimanche. Tony Gentile/Reuters

Les Européens ont réussi à s'entendre pour tenter de renflouer la Grèce et la garder dans l'euro, en imposant des sacrifices énormes à ce pays, dont l'économie exsangue a besoin de toute urgence d'une aide transitoire.
Au terme de près de 48 heures de négociations aux allures de psychodrame ponctuées de coups d'éclat, de revirements, de fausses annonces, les dirigeants de la zone euro ont validé lundi matin un projet de troisième plan de secours pour Athènes, évalué entre 82 et 86 milliards d'euros sur trois ans. Mais le parcours est semé d'embûches.

Cet accord éloigne le spectre d'une sortie désordonnée de la Grèce de la monnaie unique, même si les ministres des Finances l'avaient envisagée dimanche. « Le Grexit a disparu », a déclaré à l'AFP le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker.
Mais les contreparties imposées à Athènes sont tellement dures que le gouvernement de gauche radicale aura peut-être du mal à le vendre aux Grecs. Certains citoyens et sympathisants du gouvernement d'Alexis Tsipras en parlent comme d'une « humiliation » ou d'un « coup d'État », à l'image du #ThisIsACoup qui a fait florès sur Twitter.

M. Tsipras, acculé par l'effondrement progressif de l'économie grecque et des banques, a dû lâcher beaucoup, ce qui augure d'un vote délicat au Parlement grec qui doit valider le paquet d'ici à demain, faute de quoi l'offre tombe à l'eau. Il sera sous la pression des fonctionnaires qui appellent à une grève de 24 heures contre un accord « antipopulaire ».
Le Premier ministre a parlé quant à lui d'un « accord difficile ». Moins diplomate, une source gouvernementale grecque disait dans la nuit : « Avec un pistolet sur la tempe, toi aussi tu serais d'accord. »

 

(Lire aussi : Les Grecs du Liban dénoncent l'acharnement européen, mais invitent aux réformes)

 

Économie asphyxiée
Car l'économie grecque, asphyxiée par les contrôles de capitaux en place depuis la fin juin pour éviter la mort des banques, est dans un tel état de délabrement que l'Eurogroupe s'est réuni lundi pour mettre en place une aide transitoire devant permettre à la Grèce de faire face à ses besoins immédiats, évalués à 12 milliards d'euros d'ici à fin août. Mais les ministres des Finances ont jugé l'opération « très complexe » et ont désigné un comité ad hoc qui doit vite trouver un montage.

En attendant cette manne, le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne a maintenu hier au niveau actuel ses prêts d'urgence (ELA) en faveur des banques grecques, a annoncé hier un porte-parole de l'institution. Depuis le 26 juin, les prêts ELA, qui constituent la dernière source de financement des banques grecques, sont plafonnés à près de 89 milliards d'euros. Avant d'envisager de revoir sa position, la Banque centrale « attend que l'accord soit sécurisé », c'est-à-dire qu'il soit approuvé par les différents Parlements européens devant être consultés sur le sujet, a précisé à l'AFP une source européenne.
Conformément au plan validé hier matin, le gouvernement grec doit maintenant faire voter en moins de 48 heures plusieurs lois réformant son économie s'il veut espérer pouvoir commencer à négocier en vue de toucher l'aide promise, dans plusieurs semaines.

Si le Parlement grec vote ces lois (hausse de la TVA, réforme des retraites, notamment) et s'il approuve le plan européen, les Parlements d'autres pays pourront voter pour autoriser leurs gouvernements respectifs à négocier le plan, soumis à de nombreuses autres conditions (nouvelles réformes, privatisations, etc.)

Le Bundestag devrait ainsi voter vendredi, la chancelière allemande Angela Merkel, à la tête du camp des durs qui n'auraient pas vu d'un mauvais œil la Grèce éjectée de la zone euro, ayant de son côté prévenu que la voie serait « longue » et « difficile » avant que ce pays ne renoue avec la croissance.
Le président français François Hollande a quant à lui salué le choix « courageux » d'Alexis Tsipras.
Ce dernier a dû notamment céder sur l'un des principaux points de blocage : la création d'un fonds regroupant des actifs grecs à hauteur de 50 milliards d'euros pour garantir les privatisations promises. Il servira essentiellement à recapitaliser les banques, au désendettement, mais aussi à des investissements.

(Lire aussi : Privatisations : les créanciers ont-ils les yeux plus gros que le ventre ?)

 

« Misère, humiliation, esclavage »
Le gouvernement Tsipras aura fort à faire pour amadouer son opinion publique, à laquelle il avait promis de rompre avec l'austérité et les « diktats » des bailleurs de fonds.
D'autant que malgré l'accord trouvé à Bruxelles, le gouvernement a décidé le maintien du contrôle des capitaux et « la fermeture des banques », une mesure imposée au pays depuis le 29 juin jusqu'à mercredi. Pour beaucoup de Grecs, contraints désormais de vivre avec les 60 euros quotidiens qu'ils peuvent retirer dans les distributeurs, ce dénouement avait un goût amer.
« Une misère, une humiliation, un esclavage », commentait ainsi Haralambos Rouliskos, un économiste athénien de 60 ans. « Je n'approuve pas cet accord. Ils essaient de nous faire du chantage », confiait Katerina Katsaba, une femme de 52 ans qui travaille pour une compagnie pharmaceutique.
Avant d'ajouter, résignée : « J'ai confiance dans le Premier ministre. Les décisions qu'il prendra iront dans le sens de nos intérêts à tous. »

 

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