Le chef de la rébellion chiite au Yémen, Abdel Malek al-Houthi, a affirmé hier que son groupe ne céderait « jamais » devant « l'agression » menée, selon lui, par la coalition arabe conduite par l'Arabie saoudite. « Notre peuple yéménite ne cédera jamais, il résiste » à « l'agression sauvage », a déclaré le jeune dirigeant de la rébellion dans un discours télévisé prononcé au 25e jour de l'opération militaire de la coalition menée pour stopper la progression de ses miliciens vers le sud du pays.
Il a promis de « résister à l'agression et à l'agresseur par tous les moyens et de mettre à profit toutes les options offertes tant que durera l'agression », sans donner de précisions. En outre, le chef rebelle a accusé les États-Unis d'avoir « voulu cette agression » et Israël de « la soutenir », affirmant que les raids aériens de la coalition avaient tué « des centaines d'enfants et nombre de femmes » sans avancer de chiffres. Il s'en est également violemment pris « au régime saoudien, qui constitue un danger pour le peuple yéménite », et a affirmé qu'au plan politique, ce régime « n'a pas le droit d'intervenir dans les affaires » du Yémen. « Le problème politique est une affaire interne (...) et il revient à nous de définir notre avenir », a-t-il dit, affirmant que « l'Iran n'a pas d'influence au Yémen ».
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Il a dans ce contexte rejeté la dernière résolution du Conseil de sécurité de l'Onu, qu'il a qualifiée d'« injuste ». Le Conseil de sécurité de l'Onu avait adopté mardi une résolution qui somme les miliciens chiites de se retirer des zones du Yémen qu'ils ont conquises, et qui leur impose des sanctions dont un embargo sur les armes.
Menaces iraniennes à peine voilées
Sur un autre plan, le commandant des forces terrestres iraniennes, le général Ahmad Reda Bordastan, a vivement critiqué l'armée saoudienne, la qualifiant de « rigide et incapable de supporter une guerre d'usure sur le terrain ». Dans ce contexte, le général iranien a estimé que l'Arabie saoudite doit se préparer à des frappes douloureuses sur son territoire. « Des attentats et des missiles peuvent frapper le pays à n'importe quel moment », ajoute le haut gradé iranien, lors d'une interview pour Qanat al-alam.
De son côté, le parti de l'ex-président yéménite Ali Abdallah Saleh, accusé de s'être allié à la rébellion chiite, s'est félicité hier de la résolution du Conseil de sécurité de l'Onu. En soutenant cette résolution, M. Saleh laisse entendre qu'il pourrait prendre ses distances avec ses alliés chiites.
En outre, le commandement militaire de la plus vaste province du Yémen a proclamé hier son ralliement au président Abd Rabo Mansour Hadi.
Plus de 85 morts
Sur le terrain, des combats particulièrement meurtriers entre rebelles chiites houthis et partisans du président du Yémen appuyés par l'aviation saoudienne ont eu lieu hier dans quatre villes du sud du pays où Riyad a promis d'apporter une aide humanitaire massive. Ces affrontements et raids aériens ont fait 85 morts en moins de 24 heures, selon un bilan partiel hier en début de soirée. Les combats les plus sanglants se sont déroulés à Dhaleh, où 31 houthis et 17 de leurs adversaires ont été tués, a indiqué à l'AFP un haut responsable provincial, précisant que les rebelles avaient aussi été visés par des frappes aériennes.
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D'autres affrontements ont eu lieu à Aden, deuxième ville du Yémen, et à Taëz, autre grande ville du Sud relativement épargnée jusqu'à ces derniers jours et où les houthis viennent d'ouvrir un nouveau front.
Toujours à Taëz, des positions houthies ont de nouveau été la cible de raids de l'aviation saoudienne. La ville était totalement déserte et aucun commerce n'était ouvert, selon un correspondant de l'AFP. Dix houthis et quatre combattants pro-Hadi ont péri à Taëz, ont indiqué dimanche des médecins et des responsables locaux.
Aide humanitaire attendue
À Aden, 11 houthis et cinq combattants pro-Hadi ont été tués dans des combats, pendant la nuit et hier matin, qui ont opposé les rebelles aux forces présidentielles dans plusieurs quartiers, selon des sources militaires.
Les combattants pro-Hadi ont repris aux houthis une résidence du président et le siège du consulat de Russie, selon ces sources. À Ataq, capitale de la province de Chabwa, sept houthis ont été tués dans une attaque nocturne contre leur position lancée par des combattants de tribus sunnites, selon des sources tribales.
Après un appel onusien à une aide humanitaire internationale, Riyad a promis samedi de couvrir dans son intégralité le coût de cette assistance, soit 274 millions de dollars. Il reste maintenant à monter cette opération qui devrait être très importante au regard des besoins de la population. Le porte-parole de la coalition, le général de brigade Ahmad Assiri, a promis la mise en place, dans les prochains jours, d'un pont maritime pour l'acheminement de l'aide.
Au fur et à mesure que le conflit se poursuit, les conséquences deviennent de plus en plus lourdes pour les civils. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a déploré un manque cruel de médicaments, d'aliments et de carburant. Entre 120 000 et 150 000 personnes ont été déplacées à l'intérieur du Yémen par les combats en cours, alors qu'il y avait déjà plus de 300 000 déplacés avant la crise actuelle, selon le Haut-Commissariat de l'Onu pour les réfugiés (HCR).
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commentaires (3)
C'est elle qui est enceinte? ou lui???
Christine KHALIL
14 h 36, le 20 avril 2015