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Moyen Orient et Monde - Analyse

En Arabie saoudite, pas de voix discordante (ou presque) contre la guerre au Yémen

À Riyad, de grands écrans dans les centres commerciaux et aux coins de certaines avenues diffusent des spots publicitaires, entrecoupés d’images de soldats défilant et du roi Salmane les saluant à côté d’un avion de combat. Fayez Nureldine/AFP

La presse salue « la bravoure » de l'armée, des étudiants fabriquent un avion de combat télécommandé en hommage aux pilotes, une compagnie propose des chants patriotiques en guise de sonnerie téléphonique... En Arabie saoudite, les voix audibles appuient sans réserve l'intervention militaire au Yémen.
Ce pays ultraconservateur, poids lourd du Golfe et chef de file de l'islam sunnite, mène depuis le 26 mars une campagne aérienne au Yémen voisin pour stopper les avancées de rebelles chiites soutenus par l'Iran et rétablir l'autorité du président Abed Rabbo Mansour Hadi. À Riyad, de grands écrans dans les centres commerciaux et aux coins de certaines avenues diffusent des spots publicitaires, entrecoupés d'images de soldats défilant et du roi Salmane les saluant à côté d'un avion de combat. Le souverain, âgé de 79 ans, a accédé au trône à la mort de son demi-frère Abdallah le 23 janvier. Depuis, des experts notent que Riyad a une posture plus visible sur la scène régionale. « Notre roi a fait quelque chose de bien, dit Saoud Moubarak, un chômeur âgé d'environ 25 ans, qui était auparavant agent de sécurité. Nous en sommes satisfaits. » Cheikh Ahmad al-Ghamdi, ancien chef de la police religieuse dans la ville sainte de La Mecque, assure que « plus de 90 % » de la population saoudienne soutient l'opération au Yémen, baptisée « Tempête de la fermeté » et à laquelle se sont associés huit pays arabes. « Ce qu'a fait le royaume d'Arabie saoudite est juste à 100 % (...), pas seulement pour le Yémen, mais aussi pour tous les pays du Golfe, les Arabes et l'islam », ajoute M. Ghamdi pour qui l'Iran est « comme un renard », « l'ennemi de l'islam et des Arabes ». Le plus haut dignitaire religieux du royaume, cheikh Abdel Aziz al-Cheikh, a qualifié de « bénie » l'intervention contre les rebelles qui ont déferlé sur la capitale yéménite Sanaa en septembre 2014 avant de conquérir d'autres régions et de chasser le président Hadi, réfugié à Riyad.

« Pas de liberté d'expression »
Alors que les morts se comptent par centaines et les blessés par milliers parmi les Yéménites, le royaume saoudien affirme avoir perdu six militaires à la frontière. L'agence officielle Spa a diffusé une photo du ministre de la Défense et fils du roi, le jeune Mohammad ben Salmane, rendant visite à un soldat blessé. Issu de la nouvelle génération de la famille royale, il est considéré comme le chef d'orchestre de la campagne militaire. Une autre photo de Spa montre le prince Fayçal ben Khaled, le gouverneur de la région d'Assir, frontalière du Yémen, en train d'embrasser le front du fils d'un garde-frontière « martyr », le caporal Suleimane al-Malki. Depuis le 26 mars, les journaux saluent régulièrement les « braves » militaires et les pilotes « expérimentés » qui mènent des raids au Yémen.
L'Arabie saoudite est régulièrement critiquée à l'étranger en matière de liberté d'expression, mais rares sont les voix sur les réseaux sociaux, très fréquentés dans le royaume, qui critiquent la campagne militaire. « Oui à la "Tempête de la fermeté". Le Yémen a besoin d'aide de ses voisins » sont des messages souvent publiés sur Twitter.
« Il n'y a pas de liberté d'expression en Arabie saoudite, affirme cependant un habitant de la province orientale du royaume où se concentre la minorité chiite. Si vous dites que vous êtes contre cette opération, cela veut dire que votre loyauté est avec l'Iran. » Au début de la campagne, certains habitants de la ville de Qatif, majoritairement chiite, ont voulu protester contre les frappes et « soutenir le peuple yéménite », mais des responsables de la sécurité leur ont ordonné par haut-parleur de rester chez eux, ajoute-t-il, sous couvert d'anonymat. « En fait, je me préoccupe peu de l'Iran qui n'est pas mon pays », souligne-t-il encore avant de conclure : « Notre pays va dépenser beaucoup d'argent pour cette guerre et va perdre des soldats. »

Ian Geoffrey TIMBERLAKE / AFP

La presse salue « la bravoure » de l'armée, des étudiants fabriquent un avion de combat télécommandé en hommage aux pilotes, une compagnie propose des chants patriotiques en guise de sonnerie téléphonique... En Arabie saoudite, les voix audibles appuient sans réserve l'intervention militaire au Yémen.Ce pays ultraconservateur, poids lourd du Golfe et chef de file de l'islam sunnite,...

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