Le groupe Etat islamique a revendiqué un triple attentat suicide au Yémen contre des mosquées fréquentées par des chiites, dont les miliciens Houthis, qui a fait près de 142 morts vendredi, l'une des attaques les plus sanglantes qu'ait connu le pays.
Cette démonstration de force de l'EI dans un pays où le groupe jihadiste le mieux implanté est el-Qaëda dans la péninsule arabique (Aqpa), intervient deux jours après un attentat en Tunisie également revendiqué par l'EI, qui a fait 21 morts dont 20 touristes étrangers. Il s'agit de la première attaque revendiquée par l'EI au Yémen.
Le pays s'enfonce davantage dans le chaos alimenté notamment par les Houthis chiites ayant pris la capitale Sanaa en janvier et les jihadistes sunnites d'Aqpa, ennemis jurés mais tous deux hostiles au pouvoir du président Abd Rabbo Mansour Hadi.
Pendant la prière hebdomadaire de midi, un kamikaze s'est fait exploser à la mosquée Badr, dans le sud de Sanaa, suivi d'un autre à l'entrée de ce même lieu de culte au moment où les fidèles prenaient la fuite, selon des témoins. Un autre attentat suicide a visé une mosquée du nord de la capitale quasiment au même moment. Parmi les morts figure l'imam de la mosquée Badr et important responsable religieux de la milice, Al-Mourtada ben Zayd al-Muhatwari, selon une source médicale. Plus de 351 personnes ont été blessées dans ces attentats, a indiqué à l'AFP Nashwan al-Atab, un responsable du ministère de la Santé.
Devant les mosquées, des corps gisaient dans des mares de sang, alors que des fidèles transportaient les blessés dans des pick-up vers les hôpitaux, ou évacuaient des corps mutilés et carbonisés, selon des images diffusées par la chaîne de télévision des Houthis, Al-Massira.
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"Echec d'un putsch"
Un troisième attentat suicide a eu lieu à Saada, bastion des Houthis dans le Nord, où un kamikaze s'est fait exploser devant une mosquée mais sans faire de victime, les forces de sécurité l'ayant empêché d'y pénétrer, selon une source proche de la milice.
Dans le communiqué et l'enregistrement mis en ligne sur des sites jihadistes, la "province de Sanaa" de l'EI assure que ces attaques ne sont que "la partie émergée de l'iceberg" et que d'autres suivront contre les Houthis.
Washington et le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, ont "fermement" condamné ces attentats.
Alors que les espoirs suscités par l'ouverture d'un dialogue de sortie de crise parrainé par l'Onu sont quasiment morts, les observateurs évoquent un sérieux risque de guerre civile dans le pays, considéré comme un allié des Etats-Unis dans la guerre antiterroriste.
Depuis l'insurrection populaire de 2011, dans le sillage du Printemps arabe, qui a poussé au départ le président Ali Abdallah Saleh, le pouvoir central a été marginalisé par les Houthis et Aqpa.
Les Houthis, soupçonnés d'avoir le soutien de l'Iran, avaient déferlé en septembre 2014 de Saada sur Sanaa, puis étendu leur influence vers l'ouest et le centre du pays.
Ils ont achevé de s'emparer de la capitale avec la prise le 20 janvier du palais présidentiel et le siège imposé aux résidences de M. Hadi et d'autres responsables yéménites. Le 6 février, ils ont annoncé la dissolution du Parlement et la mise en place d'un Conseil présidentiel, mais leurs tentatives d'étendre leur contrôle sur le pays butte sur la résistance d'Aqpa et de tribus sunnites.
M. Hadi, le président internationalement reconnu qui a réussi à fuir Sanaa vers Aden, la capitale du Sud, a été évacué jeudi vers un "lieu sûr" après des combats entre ses forces et celles d'un général rebelle allié aux Houthis, Abdel Hafez al-Sakkaf.
Les troupes fidèles au président ont repris le contrôle d'Aden et M. Hadi, qui avait dénoncé "l'échec d'une tentative d'un putsch", est de nouveau apparu en public vendredi.
Le général Sakkaf a pris la fuite. Un responsable a indiqué vendredi que son convoi est alors tombé dans une embuscade, dont il est sorti indemne mais qui a coûté la vie à quatre gardes du corps.
La situation était calme vendredi à Aden où les forces pro-Hadi ont renforcé leur contrôle, en multipliant les barrages routiers, et l'aéroport, fermé par les combats, a pu rouvrir, selon des correspondants de l'AFP.
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