Photo AFP/File
Certains invoquent la charia pour justifier l'interdiction faite aux femmes de conduire en Arabie saoudite. D'autres, pour justifier cette mesure unique au monde, avancent des arguments un peu plus... exotiques.
En la matière, une mention spéciale doit être accordée à Saleh al-Saadoun, présenté comme un historien saoudien. Dans une vidéo datant du 11 janvier dernier qui circule abondamment sur les réseaux sociaux, l'historien, sous l'oeil stupéfait de l’intervieweuse, une Saoudienne elle aussi, déroule son argumentaire où sont mis en relation la conduite, le viol et une forme d'opposition culturelle et morale entre Saoudiennes et Occidentales.
"On pourrait argüer que les femmes se déplaçaient à dos de chameau par le passé, pour défendre le droit de celles-ci à conduire. Mais en Arabie saoudite, nous avons des circonstances spécifiques", explique M. Saadoun. Rappelant les distances considérables qui séparent les villes du royaume, l'historien demande : "Que ferons les femmes si leur véhicule tombe en panne?". Ce à quoi la journaliste l'interviewant rétorque : "En Occident, les femmes conduisent sans problèmes". Son interlocuteur lui répond alors sans hésitation : "Elles, ne se soucient pas de se faire violer sur le bas-côté" de la route. Clairement dérangée par cette réponse, la journaliste lui demande de s'expliquer. L'historien répond alors que "les Occidentales n'ont pas de souci moral à ce niveau. Dans notre cas, en revanche, le problème est de nature sociale et religieuse". Tombe alors la solution : "Faire venir des étrangères pour conduire nos femmes".
Une suggestion qui provoque une certaine hilarité chez l'intervieweuse.
Ovaires
M. Saadoun n'est pas le premier à avoir avancé des arguments pour le moins surprenants sur l'impact de la conduite sur les femmes.
"Conduire nuit aux ovaires", estimait ainsi en 2013 le cheikh Saleh al-Lehaydan. "Si la femme devait conduire sans que ce soit utile, cela pourrait l'affecter d'un point de vue physiologique ; le cas a été étudié dans le domaine de la physiologie fonctionnelle et il s'avère que les ovaires sont automatiquement affectés, que la poussée du bassin est contrariée, précisait-il. C'est ce qui explique que la plupart des femmes qui conduisent régulièrement des voitures donnent naissance à des enfants qui présentent des problèmes de santé".
Drogue, communisme et homosexualité
La conduite mène aussi aux drogues, entre autres. En 2013, cette affiche avait été dénoncée sur les réseaux sociaux.
"Des Saoudiens misogynes ont réalisé cette affiche pour justifier comment la conduite des femmes mène au communisme, aux drogues, au libéralisme..."
Sur l'affiche, il est écrit : "Ils veulent que les Saoudiennes conduisent pour qu'elles soient contrôlées". Contrôlées par la drogue, le communisme, les libéraux et les francs-maçons.
En 2011, un rapport "scientifique" réalisé pour le Conseil religieux saoudien avertissait que revenir sur l'interdiction de conduire pour les femmes conduirait plus de Saoudiens, hommes et femmes, à se tourner vers l'homosexualité et la pornographie, et entrainerait une augmentation de la prostitution et des divorces.
Malgré tout, des femmes continuent, en Arabie de se battre pour ce droit.
Mi-février, une militante pour les droits de la femme indiquait à l'AFP que deux Saoudiennes militant pour les droits de la femme, dont l'une a tenté de braver l'interdiction de conduire, ont été libérées après avoir passé plus de deux mois en prison. Loujaïn Hathloul et Maysaa Alamoudi étaient en prison depuis le 1er décembre, après que Mme Hathloul eut tenté d'entrer en Arabie saoudite au volant de sa voiture en provenance des Emirats arabes unis voisins. Mme Alamoudi, une journaliste saoudienne basée aux Emirats, a été arrêtée après s'être rendue à la frontière pour soutenir sa compatriote.
En octobre, des dizaines de femmes avaient posté des images d'elles en train de conduire. Le ministère de l'Intérieur avait alors annoncé qu'il appliquerait "strictement" toutes les mesures nécessaires à l'encontre de ceux qui mettent en péril "la cohésion sociale".
Lire aussi
Controverse en Arabie autour du visage découvert de la femme d'un religieux
En la matière, une mention spéciale doit être accordée à Saleh al-Saadoun, présenté comme un historien saoudien. Dans une vidéo datant du 11 janvier dernier qui circule...
commentaires (5)
Hilarant!!
Jean Ajaltouni
09 h 16, le 19 février 2015