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Culture - Beirut Chants

Abdel Rahman el-Bacha, l’éternel retour pour que Beyrouth chante toujours

À la veille de la fête de la Nativité, pour sa septième édition, l'événement a été inauguré avec faste. Comme un champagne qui coule à flots, la musique s'est répandue sous les doigts de Abdel Rahman el-Bacha sur un public religieusement recueilli.

Un pianiste aux doigts qui ont le pouvoir de faire chanter les touches du clavier. Photo Marwan Assaf

Lumière sur la ville. Avec ses sapins décorés, ses vitrines aux guirlandes colorées, ses trottoirs illuminés. Une foule dense se presse à la cathédrale maronite Saint-Georges à côté de la grande mosquée el-Amine. Remplie jusqu'aux derniers bancs, les nefs opulemment éclairées, les fresques scintillantes de dorures, les premières rangées bondées d'un aréopage de personnalités du monde ecclésiastique et politique, la cathédrale était, ce soir-là, temple de musique. Une musique où Schubert et Chopin ont des résonances magnétiques sous les doigts d'un pianiste au talent au-dessus de tout éloge.


Enfant prodige, Abdel Rahman el-Bacha, lauréat en 1978 du prestigieux prix Reine Élisabeth, a depuis une carrière internationale. Sans pour autant jamais oublier sa terre natale où ses fréquentes visites ravivent les cœurs et confortent des citadins noyés dans une pléthore de problèmes. Ses prestations sont un véritable antidote contre la morosité ambiante et l'(in)culture, ou celle superficielle et vernissée. Et ses doigts ont le pouvoir de faire chanter les touches du clavier autant que le cœur d'une ville sans cesse blessée et saccagée.
Pour ce concert d'ouverture, un menu brillant et concis, à haute teneur romantique. Interprété avec sensibilité vive et une remarquable intériorité. Car ses pianissimos sont des caresses et ses fortissimos jamais coup de boutoir. Mais toujours un savant et tendre équilibre telle une respiration qu'on ne force jamais.
Au programme donc, les pages des Quatre impromptus op 90 de Schubert et le Scherzo n° 2 op 31 de Chopin ainsi que l'Andante spianato et la Grande Polonaise brillante op 22 du pèlerin polonais. Narration riche en accords et mélodies donnant la priorité à la rêverie et la méditation au compositeur du maître du lied et accordant au génie du clavier l'occasion de sonder le sens de l'élévation et les sentiments de révolte et de révolution.


Cycle de pièces ciselées, d'une architecture à la fois délicate et solide entre ombre et lumière, entre sourire et larme, entre cri et résignation pour Schubert. La musique de l'auteur du Voyageur errant est ici, dans ses silences et ses emballements, comme une quête éperdue pour un pays où l'on n'arrive jamais...
Suivent les phrases aux «longs cous», tels des cygnes glissant sur l'eau, du plus grand poète du clavier. De l'interrogation existentielle d'une œuvre aux sonorités à la fois sombres et lumineuses aux rubatos intempestifs comme une canonnade guerrière, La Grande polonaise n'a pas volé son titre de brillante. Et encore plus brillante sous le toucher miraculeux de Abdel Rahman el-Bacha qui, sans jamais rien violenter, restitue force, fougue, passion et torrentialité.


Trombe d'applaudissements en cette nuit au ciel clair comme du cristal. En bis, une Variation sur un thème de Abdel Wahab, du cru même du pianiste, compositeur à part entière. Fusion et métissage, entre rythmes, cadences et mélodie, de l'Orient et de l'Occident. Loin de toute tristesse stérile, des notes toniques et rafraîchissantes pour une plus ample et chaleureuse fraternité humaine.

Lumière sur la ville. Avec ses sapins décorés, ses vitrines aux guirlandes colorées, ses trottoirs illuminés. Une foule dense se presse à la cathédrale maronite Saint-Georges à côté de la grande mosquée el-Amine. Remplie jusqu'aux derniers bancs, les nefs opulemment éclairées, les fresques scintillantes de dorures, les premières rangées bondées d'un aréopage de personnalités du...
commentaires (2)

"De l'interrogation existentielle d'une œuvre aux sonorités à la fois sombres et lumineuses aux rubatos intempestifs comme une canonnade guerrière..." Je doute fort que M. Davidian ait saisi le sens exact du mot "rubato". L'adjectif "intempestif" n'est pas du tout adéquat pour caractériser le rubato, qui est simplement une légère variation de rythme entre les deux mains, laquelle ne peut certainement pas être comparée à une canonnade guerrière...Celle-ci provient, dans la Grande Polonaise, des accords utilisés, du rythme, et de la dynamique...

Georges MELKI

09 h 32, le 03 décembre 2014

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Commentaires (2)

  • "De l'interrogation existentielle d'une œuvre aux sonorités à la fois sombres et lumineuses aux rubatos intempestifs comme une canonnade guerrière..." Je doute fort que M. Davidian ait saisi le sens exact du mot "rubato". L'adjectif "intempestif" n'est pas du tout adéquat pour caractériser le rubato, qui est simplement une légère variation de rythme entre les deux mains, laquelle ne peut certainement pas être comparée à une canonnade guerrière...Celle-ci provient, dans la Grande Polonaise, des accords utilisés, du rythme, et de la dynamique...

    Georges MELKI

    09 h 32, le 03 décembre 2014

  • Alors c'est maintenant l'emplacement de la cathédrale Saint-Georges qui a besoin d'être indiquée comme étant "à côté de la grande mosquée el-Amine"? M. Davidian, pour votre information, il y a vingt ans, la mosquée n'existait pas encore, mais la cathédrale était là depuis plus d'un demi-siècle... O tempora! O mores!

    Georges MELKI

    09 h 16, le 03 décembre 2014

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