Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole - Sally El-KHATIB

Frères un jour, mais pas frères pour toujours

Je marchais l'autre jour dans les rues de Beyrouth, comme j'aime le faire souvent dans cette ville que j'adore, quand je suis tombée sur une annonce sur un mur. Je lis et je tombe des nues. Le texte, adressé aux réfugiés syriens, leur ordonne de quitter le quartier en moins de vingt-quatre heures. Un choc!
Quelques mètres plus loin, une autre annonce ordonne aux réfugiés de ne pas se trouver dans les rues entre 20 heures et 6 heures du matin. Où suis-je ? Est-ce vraiment mon Beyrouth, la ville qui a ouvert ses bras à tout le monde, la ville où moi, membre du 14 Mars, j'ai passé la plupart de ma vie ?
Je suis une Arabe sunnite beyrouthine, il est vrai, mais mon autre moitié est Damas, la belle ville millénaire, aujourd'hui blessée et meurtrie. Mon père est libanais, ma mère syrienne, et mon cœur est déchiré entre mes deux pays que je chéris également.
Je me suis rappelée l'année 2006, la guerre d'Israël contre le Liban et les 33 jours de destruction et d'exode des Libanais. Vers où ? Vers cette même Syrie dont ils veulent jeter les réfugiés dehors.
En 2006, la Syrie a ouvert ses bras à des milliers de Libanais fuyant la guerre, sans leur demander ni papiers ni argent. Les Syriens ont ouvert leurs maisons pour recevoir les réfugiés libanais car ils les considéraient comme leurs frères et ils avaient le même ennemi.
Moi-même j'ai travaillé avec une ONG syrienne qui s'occupait des réfugiés libanais en Syrie. Tout en étant pro-14 Mars, qui depuis 2005 était contre le régime syrien... Tout le monde le savait, mais bizarrement, personne n'est venu me dire de sortir ou m'a adressé une seule remarque. J'étais leur sœur et ils étaient mes frères. On travaillait ensemble à aider les réfugiés libanais sans nous enquérir ni de leurs opinions politiques ni de leur religion. Ils étaient des réfugiés qui avaient besoin d'aide et d'un toit pour les protéger. J'ai vu des Syriens ouvrir leurs maisons, partager leur pain et leur eau avec leurs « frères » libanais qui, en 2005, les ont chassés du Liban.
En me rappelant tout cela, je regardai l'annonce-ultimatum. Et je me disais : est-ce vraiment les mêmes personnes qui se sont réfugiées en Syrie en 2006 qui demandent cela aux réfugiés syriens ?
J'ai honte de me dire libanaise en voyant ce racisme aveugle. Comment peut-on qualifier tous les réfugiés syriens de terroristes ? Ces femmes et ces enfants qui ont fui la guerre, qui sont dans le besoin, comment ose-t-on les maltraiter ? Imaginez-vous en 2006, rappelez-vous de votre exode. Si ces mêmes réfugiés ne vous avaient pas ouvert leurs maisons, où alliez-vous fuir ?
Face à ce racisme, dans la ville que j'adore, dans mon pays que j'aime, je me sens soudain étrangère. Je pense à ce qui se passe, je me rappelle 2006 et je me dis que pour certains, racistes, le frère d'un jour n'est plus un frère pour toujours.

Je marchais l'autre jour dans les rues de Beyrouth, comme j'aime le faire souvent dans cette ville que j'adore, quand je suis tombée sur une annonce sur un mur. Je lis et je tombe des nues. Le texte, adressé aux réfugiés syriens, leur ordonne de quitter le quartier en moins de vingt-quatre heures. Un choc!Quelques mètres plus loin, une autre annonce ordonne aux réfugiés de ne...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut