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Fallait-il dévoiler le rôle de Nemmouche en Syrie ? Médias et ex-otages français s'opposent

"Nous sommes journalistes, on doit l'explication, l'information, mais il y a un temps pour tout", estime le journaliste Didier François.

Arrêté lors d'un contrôle de routine à Marseille, dans le sud de la France le 30 mai, Mehdi Nemmouche, Français d'origine algérienne, âgé de 29 ans, parti faire le jihad en Syrie, est soupçonné de quatre assassinats commis le 24 mai au nom du jihad dans le Musée juif de Bruxelles. AFP PHOTO / BENOIT PEYRUCQ

Le quotidien français Le Monde devait-il révéler que Mehdi Nemmouche était le geôlier d'ex-otages français en Syrie, au risque de mettre en danger la vie de ceux toujours détenus ? Les médias divergeaient lundi sur la ligne à adopter.

La révélation du Monde samedi sur Mehdi Nemmouche, tueur présumé du Musée juif de Bruxelles incarcéré en Belgique avait d'emblée été qualifiée d'"irresponsable" par l'un des ex-otages, Didier François. Selon lui, "cela pose un véritable problème pour l'enquête en cours, pour les témoins et pour les otages restés là-bas".
Lundi matin, sur son antenne Europe 1, Didier François est revenu à la charge contre le scoop du Monde.
"Nous sommes journalistes, on doit l'explication, l'information, mais il y a un temps pour tout. Dans le cas particulier, il y a aussi un temps de la recherche, de l'enquête, de la justice. Donc je pense qu'il n'était pas totalement utile de donner, sans avoir maîtrisé le temps, des informations à une organisation particulièrement dangereuse (...) qui a encore entre ses mains un certain nombre d'otages", a-t-il estimé, tout en dévoilant néanmoins de nouveaux détails sur les conditions de sa détention.

S'il est difficile de prévoir les conséquences des révélations du quotidien, les récentes décapitations par des jihadistes des deux journalistes américains James Foley et Steven Sotloff sont venues rappeler que la menace est réelle.

Ce week-end, la divulgation du Monde a libéré la parole des autres médias et poussé l'hebdomadaire Le Point, employeur de l'ancien otage Nicolas Hénin, à diffuser le témoignage de son journaliste qui a confirmé avoir reconnu en Mehdi Nemmouche l'un de ses geôliers en Syrie. Une conférence de presse du journaliste a également été organisée samedi dans les locaux du Point mais le directeur de l'hebdomadaire Etienne Gernelle ne voit pas matière à polémique.

 

(Pour mémoire : Les ex-otages Didier François et Nicolas Hénin révèlent avoir été détenus avec James Foley)

 

"Rumeurs et fantasmes"
"Nous n'avons pas révélé l'info. Nicolas Hénin avait respecté le pacte. A partir du moment où l'information est sortie, qu'elle est publique, on choisit de l'expliquer. Dans son papier (sur le site du Point, ndlr) et au cours de sa conférence de presse, il a dit ce qu'il a pu et voulu dire avec beaucoup de retenue et de pudeur", a déclaré à l'AFP Etienne Gernelle.

Par la voix de son avocate, lundi, Nicolas Hénin a aussi regretté la parution de l'article du Monde tout en justifiant son intervention pour fermer la porte aux "rumeurs et fantasmes".

Sur Internet ce week-end, Libération avait à son tour rapporté que les quatre otages français libérés en avril 2014 avaient tous "identifié sur photos, vidéo et matériel sonore Mehdi Nemmouche comme ayant été un de leurs gardiens".

 

(Pour mémoire : Mehdi Nemmouche a le même profil que Mohammad Merah)


En face, l'auteur de l'article du Monde, Jacques Follorou s'est défendu lundi sur France Info, après le directeur du quotidien Gilles Van Kote, dimanche, en estimant que les critiques étaient "excessives et infondées", soulignant qu'il n'y a pas de négociations en cours pour libérer des otages et que Mehdi Nemmouche était en prison.
"Ce sont là des conditions objectives qui permettent de dire qu'aujourd'hui, on peut verser au débat public une information qui est importante", a ajouté le journaliste, réfutant les demandes du parquet de retenir l'information.

Dimanche, le Parquet avait expliqué avoir été interrogé vendredi par le Monde, à qui il avait "expressément demandé (...), comme il l'avait demandé auparavant aux autres médias (...) de ne pas publier ces éléments".
Si pour le journaliste du Figaro Georges Malbrunot, otage pendant 124 jours en Irak et libéré en décembre 2004, la nécessité d'informer ne prime pas sur la sécurité des otages encore détenus, Dorothée Moisan, journaliste à l'AFP et auteur de "Rançons, le business des otages" publié en octobre 2013 chez Fayard, rappelle que ces informations "ne révèlent rien aux ravisseurs".

 

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