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À La Une - tensions

Nigeria : près de 150 morts en deux jours, le pouvoir dépassé par les violences

Washington condamne "les attaques odieuses contre des civils".

A Jos, dans le Centre du Nigéria, les opérations de secours se poursuivent mercredi pour tenter de trouver des survivants au lendemain du double attentat qui a fait au moins 118 morts et 56 blessés. AFP PHOTO/ STR

Près de 150 personnes ont péri en deux jours au Nigeria, dans des attaques de villages dans le Nord-Est et un attentat à Jos (centre), déstabilisant un peu plus le gouvernement malgré la mobilisation internationale contre Boko Haram.

Deux villages situés près de Chibok (nord-est), où le groupe islamiste armé avait enlevé plus de 200 lycéennes mi-avril, ont été attaqués coup sur coup lundi et mardi par des hommes armés non identifiés. "L'attaque a été brutale. Ils se sont mis à tirer et ont incendié nos maisons. Nous avons dû nous enfuir dans la brousse. Ils ont tué 20 des nôtres", a témoigné un habitant d'Alagarno, Haruna Bitrus. Dix autres personnes sont mortes à Shawa.

A Jos, dans le Centre, les opérations de secours se poursuivaient mercredi pour tenter de trouver des survivants - ou des cadavres - enfouis sous les décombres après le double attentat de mardi, qui a fait au moins 118 morts et 56 blessés.

Le porte-parole du gouverneur de l'Etat du Plateau, dont Jos est la capitale, a attribué l'attentat à Boko Haram.
"L'enquête est en cours mais il s'agit clairement d'une extension des activités terroristes qui ont frappé le nord-est du pays, l'insurrection de Boko Haram", a-t-il déclaré.


Les Etats-Unis ont condamné "ces attaques odieuses contre des civils" et réaffirmé leur "soutien" au Nigeria pour "vaincre l'extrémisme", dans un communiqué du département d'Etat.


Pour Kyari Mohammed, un spécialiste de Boko Haram à l'université Modibbo Adama de Yola (nord-est), la double attaque de Jos - l'explosion de deux véhicules piégés à 20 minutes d'intervalle sur un marché de cette ville d'un million d'habitants - porte la marque du groupe islamiste. "Ils sont les seuls capables de faire cela. N'importe quel groupe rebelle peut utiliser des bombes, mais pas avec un tel degré de sophistication", estime-t-il.

 

(Lire aussi : Des proches des lycéennes réclament leur libération « sans conditions »)


Cette nouvelle tuerie ravive la crainte de violences interreligieuses, avec leur cycle infernal de représailles qui ont déjà ensanglanté l'Etat du Plateau par le passé. Le Plateau est situé à la charnière entre le Sud chrétien et le Nord majoritairement musulman du Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique avec 170 millions d'habitants.

"Les attentats sont un coup très dur, surtout après le travail accompli ces dernières années pour favoriser la coexistence pacifique et le respect entre tous les groupes ethniques, religieux et politiques", a déclaré l'archevêque de Jos et président de la conférence épiscopale du Nigeria, Ignatius Ayau Kaigama, à l'agence catholique Misna. "Boko Haram veut créer le chaos, le désastre national. Je me serais attendu à ce que le gouvernement et les organes de sécurité aient été capables d'individualiser et d'arrêter les responsables des violences", a déploré l'archevêque.

 

Cellules dormantes
Cette critique s'ajoute au flot qui se déverse depuis des mois sur le gouvernement et les forces de sécurité, incapables d'arrêter la spirale de violence qui a fait plus de 2.000 morts depuis le début de l'année.

Outre le rapt de 276 adolescentes à Chibok, qui a scandalisé l'opinion publique mondiale et entraîné une mobilisation internationale, Boko Haram a revendiqué une série d'attaques spectaculaires depuis un mois et demi, dont deux attentats à la voiture piégée à Abuja, la capitale fédérale, qui ont tué au total une centaine de personnes.


Les islamistes armés "n'ont plus peur, ils n'ont plus honte, ils font ce qu'ils veulent", a dénoncé à Libreville le représentant spécial de l'ONU pour l'Afrique centrale, Abou Moussa.

 

(Lire aussi : L'islam n'a rien à voir avec les "horreurs" de Boko Haram, affirment des responsables musulmans)

 

Le président nigérian Goodluck Jonathan, déjà en difficulté sur le plan politique, a réitéré mardi son engagement à "gagner la guerre contre le terrorisme".

L'armée nigériane a annoncé mercredi le lancement d'une grande campagne de recrutement de volontaires pour aller combattre Boko Haram.

Le Parlement nigérian avait validé mardi la prolongation de l'état d'urgence en vigueur dans trois Etats du Nord-Est, demandée par M. Jonathan. Mais cette mesure d'exception déjà en vigueur depuis mai 2013, accompagnée d'une vaste offensive militaire, n'a jamais pas permis d'enrayer les violences de Boko Haram. Les attaques se sont au contraire multipliées, visant de plus en plus les civils.

Les forces de sécurité nigérianes apparaissent dans les faits incapables de prévenir les attaques, Boko Haram frappant désormais aussi bien dans les Etats du Nord-Est, ses fiefs, que dans le Centre ou le Nord. Le Sud chrétien n'a pas encore été touché, mais le groupe islamiste a menacé de s'attaquer aux intérêts pétroliers dans le delta du Niger, stratégiques pour la première économie d'Afrique.

Plusieurs pays occidentaux, Etats-Unis en tête, ont dépêché des experts, des avions-espions et des drones pour aider le Nigeria à retrouver les lycéennes kidnappées et à tenter de neutraliser les islamistes.
Un sommet organisé à Paris, qui a réuni samedi le Nigeria, ses voisins et ses soutiens occidentaux, a adopté un plan global de lutte contre Boko Haram, établissant une large coopération militaire.

Paradoxalement, cette pression internationale pousse Boko Haram à multiplier les actions, estime l'expert Kyari Mohammed. "Ils ont des cellules dormantes dans tout le nord du pays et ils les activent".

 

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