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Liban - L’éclairage

D’ores et déjà, le Hezbollah veut imposer sa feuille de route au successeur de Sleiman

Le Conseil des ministres de lundi dernier était édifiant à plus d'un plan. Ce soir-là, le Hezbollah a décidé d'avancer totalement démasqué pour les deux mois à venir et d'en faire voir de toutes les couleurs au chef de l'État.
Quelques heures plus tôt, autour de la table de dialogue (fort réduite vu les absences...) à Baabda, c'était le calme, pourtant, qui prévalait. Bizarrement d'ailleurs, puisque le chef du bloc parlementaire du Futur, l'ancien Premier ministre Fouad Siniora, s'était déchaîné contre le Hezb, lui faisant assumer la responsabilité de tout ce qui se passe au Liban à cause de son implication en Syrie, allant même jusqu'à acheminer dans le pays les voitures piégées et les kamikazes. Le chef du législatif, Nabih Berry, s'est ensuite surpassé pour défendre la présence du Hezb en Syrie.


Le Hezbollah n'y a pas été avec le dos de la cuillère. Au lendemain du discours de Kaslik, dans lequel le président Sleiman appelait à en finir avec « les équations en langue de bois » et les remplacer par « une équation en or : la terre, le peuple et les valeurs communes », les députés et les hommes politiques proches du parti de Dieu n'hésitaient plus à qualifier Michel Sleiman d'« ancien président » ou de président « en charge d'expédier les affaires courantes ». Hassan Nasrallah a même demandé une élection anticipée, précisant que c'est avec lui que le futur locataire de Baabda devra s'entendre, notamment sur les clauses du dialogue à venir...


Pour un politicien chevronné du 14 Mars, le Hezbollah a décidé qu'il allait changer les règles du jeu, se basant sur les derniers développements dans la région, à commencer par les victoires du régime en Syrie. Une décision « déjà » prise, avant même l'élection du nouveau chef de l'État et dans le but évident de dynamiter la feuille de route que le président sortant veut laisser à son successeur. En gros, le Hezb veut en finir avec la table de dialogue, puisqu'elle n'a, selon lui, « rien d'institutionnel », et limiter les débats, à commencer par la stratégie de défense, aux seuls Conseils des ministres. Du coup, pour le parti de Dieu, la déclaration de Baabda « n'a rien de contraignant ». Voilà pourquoi il a boycotté la séance de lundi et qu'il boycottera, de même, celle du 5 mai. Le politicien du 14 Mars résume tout cela en relevant que le Hezbollah, incapable de se dépêtrer du bourbier syrien sans ordre iranien, entend renforcer son poids à l'intérieur, en soutenant notamment le candidat à la présidence qui ferait sien le concept de la moumana'a.


En attendant, Nabih Berry s'active, à sa façon, pour cette présidentielle. Il a ainsi formé une troïka chargée de recueillir les opinions des différents blocs parlementaires avant qu'il ne décide quoi faire. Beaucoup de points d'interrogation entourent cette initiative : quels sont ses motifs ? Et pourquoi cette troïka n'est-elle formée que des députés de son bloc ? Pourquoi n'a-t-il pas entrepris lui-même de se réunir avec les chefs de bloc ? Face à tout ce flou, des observateurs s'inquiètent, se demandant si le but de tout cela n'est pas de tergiverser au maximum, voire de reporter sine die l'échéance. Surtout que Nabih Berry peut se prévaloir de l'expérience de 2007, lorsqu'il avait convoqué plus d'une vingtaine de fois le Parlement en vue de l'élection présidentielle sans qu'une seule fois le quorum ne soit assuré.


De leur côté, les candidats sont, pour le moins, précautionneux et prudents, certains s'employant à tâter comme ils le peuvent le pouls de la communauté internationale, estimant qu'il est impossible de dissocier l'échéance libanaise de ce qui se passe dans la région. Surtout que le président syrien Bachar el-Assad semble déterminé à se présenter pour un nouveau mandat et qu'il essaie du coup de contrôler, via ses alliés locaux, la carte présidentielle libanaise.


En réalité, les forces politiques locales ne semblent pas pressées de trancher la question avant que de savoir ce qui va se passer en Syrie. Le 8 Mars ne veut pas entrer dans des négociations s'il est à même de parachuter son candidat, Michel Aoun ou Sleiman Frangié, à Baabda. Quant au 14 Mars, qui est convaincu que la communauté internationale va se mettre d'accord pour empêcher une candidature Assad et qu'elle privilégie l'option de la transition, il préfère lui aussi attendre pour imposer son champion plutôt que d'accepter un président consensuel.
Qui vivra verra...

 

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Le Conseil des ministres de lundi dernier était édifiant à plus d'un plan. Ce soir-là, le Hezbollah a décidé d'avancer totalement démasqué pour les deux mois à venir et d'en faire voir de toutes les couleurs au chef de l'État.Quelques heures plus tôt, autour de la table de dialogue (fort réduite vu les absences...) à Baabda, c'était le calme, pourtant, qui prévalait....

commentaires (3)

Il veut l'imposer avec, ou sans le doigt dans son "propre œil" ?

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

15 h 20, le 02 avril 2014

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Commentaires (3)

  • Il veut l'imposer avec, ou sans le doigt dans son "propre œil" ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    15 h 20, le 02 avril 2014

  • NE DEVRAIT-ON PAS COMMENCER IMMÉDIATEMENT LE DIALOGUE... SE DONNER DES CALMANTS... LES UNS AU HEZB ET LE HEZB AUX AUTRES... POUR ATTÉNUER LES APPRÉHENSIONS MUTUELLES POUR LE MOMENT... ET ALLER "TOUS" À UNE ÉLECTION DÉMOCRATIQUE DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE... QUI QU'IL SOIT CELUI QUI L'EMPORTERAIT AU SUFFRAGE ? LA LOGIQUE LE DIT ! L'ABRUTISSEMENT LE DÉNIE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 24, le 02 avril 2014

  • On est avant tout moyen orientaux , et si démocratiquement on peut pas s'entendre , les rapports de force prévalent , si le complot contre les résistances n'a pas fonctionné en Syrie , au Liban et en Iran , ceux qui peuvent faire entendre leur voix par d'autres moyens ( bien orientaux) le feront pour s'imposer . Généralement en pays anglo saxon on dit bien , there is no free lunch !

    FRIK-A-FRAK

    12 h 55, le 02 avril 2014

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