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Moyen Orient et Monde - Transition

Ukraine : la Russie se fait plus conciliante

La crise ne doit pas opposer Moscou et Washington, affirme Kerry ; la formation d'un gouvernement ajournée à demain ; l'opposant Klitschko candidat à la présidentielle.

La ministre européenne des AE Catherine Ashton (gauche), étreignant l’Ukrainienne Ioulia Timochenko, libérée samedi. Photo AFP

L'Occident et la Russie cherchaient hier à apaiser la tension autour de l'Ukraine, où les autorités provisoires luttent pour prévenir une faillite ainsi qu'une division du pays.


Après avoir mis en doute lundi la légitimité des nouveaux dirigeants ukrainiens et déclaré ne pas se voir « travailler » avec un gouvernement issu d'une « révolte », Moscou a donc abaissé d'un ton sa rhétorique hier. Tout en se déclarant opposé à la tenue d'une élection présidentielle anticipée le 25 mai, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a affirmé que Moscou souhaite « que l'Ukraine fasse partie de la famille européenne, dans tous les sens du mot ». « Nous sommes d'accord (...) qu'il serait dangereux et contre-productif de forcer l'Ukraine à un choix "soit vous êtes avec nous, soit contre nous" », a-t-il ajouté.


Côté occidental, des diplomates de haut rang ont apporté hier leur soutien au nouveau pouvoir, tout en soulignant l'importance d'associer la Russie à tout règlement. « Nous proposons du soutien, pas de l'ingérence », a expliqué à Kiev la ministre européenne des Affaires étrangères Catherine Ashton. « Il est crucial que la Russie, en tant qu'important voisin de l'Ukraine, lui apporte aussi son soutien pour faire en sorte que le pays puisse aller de l'avant de la manière qu'il souhaite », a-t-elle estimé.


Pour le secrétaire d'État américain John Kerry, la crise en Ukraine ne doit pas opposer les États-Unis et la Russie. « Il ne s'agit pas d'un jeu à somme nulle, de l'Ouest contre l'Est, cela ne devrait pas être le cas, ce n'est pas la Russie ou les États-Unis ou d'autres choix, il s'agit du peuple d'Ukraine et des choix d'avenir des Ukrainiens », a déclaré M. Kerry aux côtés de son homologue britannique William Hague. Ce dernier a martelé que le Royaume-Uni, à l'instar des États-Unis et des grandes puissances européennes, « soutenait avec force l'intégrité territoriale et l'unité de l'Ukraine ». Il a lui aussi assuré que les Occidentaux ne cherchaient « pas à éloigner (l'Ukraine) de la Russie ». « C'est un pays qui a besoin d'une assistance financière de multiples sources, y compris de Russie », a souligné M. Hague.


La Russie avait annoncé en décembre un crédit de 15 milliards de dollars, dont elle n'a pour le moment versé que 3 milliards, ainsi qu'une forte baisse des prix du gaz. Le versement du solde du prêt paraît désormais incertain au vu des tensions entre les deux capitales. L'Ukraine elle-même a besoin de 35 milliards de dollars et place ses espoirs dans l'organisation d'une conférence de donateurs occidentaux, selon son ministre des Finances par intérim Iouri Kolobov. Cette requête a d'ailleurs reçu un accueil favorable auprès des Européens.

 

CPI et crimes contre l'humanité
Le Parlement a par ailleurs voté à une très large majorité une résolution demandant à la Cour pénale internationale (CPI) de poursuivre le président déchu Viktor Ianoukovitch, dans le cadre d'une enquête pour « crimes contre l'humanité ». Destitué samedi par le Parlement, il faisait déjà l'objet d'un mandat d'arrêt pour « meurtres de masse » de civils après les affrontements qui ont fait 82 morts à Kiev la semaine dernière dont une quinzaine de policiers.

« Le pouvoir (déchu) a bâti un système de bandits basé sur la corruption et les tueurs », a déclaré hier Arseni Iatseniouk, l'un des responsables de l'opposition. « S'il n'avait pas eu le bataillon du ciel (surnom donné aux victimes de Maïdan), il y aurait eu des milliers de morts. La seule solution pour ce pouvoir est le tribunal international de La Haye », a-t-il ajouté.

Mais, signe de la difficulté à trouver un compromis politique également à l'intérieur du pays, le Parlement a repoussé à demain la nomination d'un gouvernement de transition, initialement prévue hier. « Il faut que la décision soit prise demain (jeudi). On ne peut pas attendre plus longtemps », a lancé au Parlement le président par intérim, Olexandre Tourtchinov. « Menez des consultations jour et nuit, mais il faut que ce soit transparent », a-t-il ajouté.

Les noms les plus fréquemment cités pour le poste de Premier ministre sont ceux du banquier et dirigeant de la contestation Arseni Iatseniouk, de l'oligarque d'opposition Petro Porochenko et de l'ancienne chef de gouvernement Ioulia Timochenko. Cette dernière a toutefois déjà indiqué qu'elle ne briguait pas le poste et s'apprêtait à aller se faire soigner en Allemagne. « Ceux qui participeront à ce gouvernement d'un côté sauvent le pays mais de l'autre doivent se rendre compte qu'ils commettent un suicide politique », a jugé M. Iatseniouk.

 

(Repère : Les figures-clés du nouveau pouvoir)


L'ex-champion du monde poids lourds de boxe, devenu l'un des dirigeants de la contestation, Vitali Klitschko, a pour sa part annoncé sa candidature à l'élection présidentielle anticipée du 25 mai, affirmant vouloir « rétablir la justice » afin de « changer complètement les principes et les règles du jeu en Ukraine ». Le gouverneur prorusse de la région de Kharkiv, Mikhaïlo Dobkine, s'est également déclaré candidat. La campagne électorale a débuté hier et les candidats ont jusqu'au 30 mars pour s'inscrire, selon la commission électorale centrale.

 

Signes de séparatisme ?
Dans ce contexte de transition, le président par intérim a appelé à « mettre immédiatement un terme aux manifestations dangereuses de séparatisme », sans citer de cas concrets, alors que l'archevêque majeur de l'Église grecque-catholique ukrainienne, Mgr Svjatoslav Shevchuk, a dit hier craindre à terme une guerre civile et le séparatisme en Ukraine. À Sébastopol et Simféropol, dans la péninsule prorusse de Crimée, des manifestations prorusses se sont déroulées hier, rassemblant plusieurs centaines de personnes. Dans le port de Sébastopol, qui abrite la flotte russe de la mer Noire, deux blindés stationnaient en ville, l'un sur le territoire de l'état-major de la flotte russe et l'autre dans la cour de la Maison de Moscou, ont constaté des journalistes de l'AFP.


Les Occidentaux ne cachent pas depuis plusieurs jours leurs craintes pour l'intégrité territoriale de l'Ukraine. Ils redoutent que la crise des derniers mois n'ait creusé le fossé entre l'Est russophone et russophile, majoritaire, et l'Ouest nationaliste et ukrainophone. « On ne va pas abandonner nos frères en Ukraine dans ce conflit de civilisations », a prévenu Leonid Sloutski, député russe et chef de la commission parlementaire en charge des affaires d'ex-républiques soviétiques, qui se trouvait hier à Simféropol, chef-lieu de la péninsule prorusse de Crimée, selon les agences russes.

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Après avoir mis en doute lundi la légitimité des nouveaux dirigeants ukrainiens et déclaré ne pas se voir « travailler » avec un gouvernement issu d'une « révolte », Moscou a donc abaissé d'un ton sa...
commentaires (2)

É l é m e n t a i r e ! Et bientôt ce sera au tour de la Biélorussie, de la Tchétchénie, de l’Abkhazie ou toutes autres Ossétie. Qu'elles soient du Sud ou du Nord, same, on s'en fout !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

09 h 15, le 26 février 2014

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Commentaires (2)

  • É l é m e n t a i r e ! Et bientôt ce sera au tour de la Biélorussie, de la Tchétchénie, de l’Abkhazie ou toutes autres Ossétie. Qu'elles soient du Sud ou du Nord, same, on s'en fout !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 15, le 26 février 2014

  • IL SEMBLE QUE L'OURS A AVALÉ LE COUP DE FIEL DANS SA TANIÈRE. SIGNE DE GRANDE FAIBLESSE. LES COUPS VONT TOMBER À VERSE... LES UKRAINES VONT SE MULTUPLIER... SI LE MINI-TSAR NE CHANGE PAS DE POLITIQUE TOUT À CÔTÉ... LE COUP DE FIEL QU'IL AVALERAIT RISQUERAIT DE LUI BLOQUER LA GORGE ET DE L'ÉTOUFFER... RESTONS À L'ÉCOUTE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    04 h 50, le 26 février 2014

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