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Moyen Orient et Monde - Crise

Le Parlement ukrainien pave la voie à la libération de Timochenko

Le président Ianoukovitch a signé un accord avec les représentants de l'opposition ; la place Maïdan très mitigée.

L’opposition avait de quoi se réjouir hier au Parlement. Genya Savilov/AFP

Le Parlement ukrainien a voté hier une loi abolissant l'article du code pénal au titre duquel a été condamnée l'opposante Ioulia Timochenko, ouvrant ainsi théoriquement la voie à sa libération.
Mme Timochenko, ancienne Première ministre, a été condamnée en 2011 à sept ans de prison pour abus de pouvoir, après l'arrivée au pouvoir l'année précédente du président Viktor Ianoukovitch, dont elle était la principale adversaire politique. La résolution surprise doit encore être signée par le président Ianoukovitch pour entrer en vigueur.

Le vote du Parlement suit de peu la signature d'un accord entre M. Ianoukovitch et les représentants de l'opposition ukrainienne après trois mois de crise politique aiguë. Signé hier au palais présidentiel en présence des médiateurs européens, l'accord prévoit notamment une élection présidentielle anticipée, la formation d'un gouvernement de coalition et un retour à la Constitution de 2004, lequel a été immédiatement voté dans la foulée par la Rada. Il survient après des affrontements qui ont fait près de 80 morts depuis mardi à Kiev, un niveau de violence inédit pour ce jeune pays issu de l'ex-Union soviétique. La crise, qui a duré trois mois jour pour jour, a métamorphosé le centre-ville en quasi-zone de guerre, hérissée de barricades et de tentes pour les protestataires.

« Comme Kadhafi ou Ceausescu »
Sur l'emblématique place Maïdan, au cœur de la capitale ukrainienne, les premières réactions recueillies étaient mitigées et donnaient l'impression que les concessions annoncées par M. Ianoukovitch étaient perçues comme à la fois tardives, insuffisantes et sujettes à caution. « Les gens disent qu'ils ne quitteront pas Maïdan tant que Ianoukovitch ne sera pas parti », a jugé Oleg Bukoyenko, un habitant de Kiev de 34 ans. « Des élections en décembre ne suffisent pas, il faut qu'il parte maintenant. Sinon il pourrait finir comme Kadhafi ou Ceausescu », a-t-il ajouté, évoquant les « crimes » commis, selon lui, par le président. « Je ne crois pas qu'il s'agisse de la décision de Ianoukovitch, cela lui a été imposé par les Européens », a-t-il conclu.
Des dizaines de milliers de personnes continuaient d'occuper la place hier dans une atmosphère cependant nettement moins tendue que la veille, certains manifestants se prenant en photo ou allumant des feux d'artifice.

(Voir notre diaporama ici)

« Des paroles aux actes »
La prudence était toujours de mise du côté des responsables européens, pourtant principaux artisans du compromis après une journée et une nuit entière de négociations par les ministres des affaires étrangères polonais, allemand et français à Kiev. « Il est désormais de la responsabilité de toutes les parties d'être courageux et de passer des paroles aux actes », a réagi le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy. Le Premier ministre britannique David Cameron a vu dans l'accord « une chance réelle de mettre fin à l'effusion de sang ». Le président français François Hollande a, lui, « salué » l'accord insistant sur sa mise en œuvre en « intégralité et dans les meilleurs délais ». Même son de cloche à Washington où le porte-parole de l'exécutif, Jay Carney, a salué le « courage des dirigeants de l'opposition qui ont reconnu qu'il était nécessaire de faire des compromis », et a appelé à « une application immédiate des premières mesures » prévues par l'accord, notamment la fin des violences et l'adoption des mesures constitutionnelles au Parlement.

(Pour mémoire : Le retour de la guerre froide, le point de Christian Merville)

Européens et Américains avaient fait monter la pression sur le régime de M. Ianoukovitch tout au long de la semaine en décidant de priver de visas et de geler les avoirs de responsables ukrainiens et en menaçant de sanctions supplémentaires. L'accord d'hier a été signé par les trois principaux dirigeants de l'opposition ukrainienne, Vitali Klitschko, Arseni Iatseniouk et Oleg Tiagnibok, de même que par les ministres des Affaires étrangères allemand Frank-Walter Steinmeier et polonais Radoslaw Sikorski. Le représentant de la Russie, en revanche, n'a pas signé. « Le fait que (le délégué russe aux droits de l'homme) Vladimir Loukine ne l'ait pas signé comme l'ont fait les trois ministres européens ne signifie pas que la Russie ne souhaite pas la recherche d'un compromis », a déclaré le ministère russe des Affaires étrangères. « Nous serons à l'inverse toujours prêts à aider les Ukrainiens s'ils le demandent, à faire retourner la situation à la normale », assure la diplomatie russe.

L'opposition, représentée par le conseil du Maïdan, avait donné son feu vert à l'accord à condition que l'actuel ministre de l'Intérieur Vitali Zakhartchenko ne fasse pas partie du prochain gouvernement et que le procureur général Viktor Pchonka ne conserve pas ses fonctions, selon Oleg Tiagnibok. Ces deux hommes sont mis en cause pour leur rôle dans la répression policière et judiciaire contre les manifestants en Ukraine. Sa signature a été immédiatement suivie par l'adoption à une large majorité (386 députés sur 450) au Parlement d'un retour à la Constitution de 2004, qui accordait au président des pouvoirs moins importants que la Constitution actuelle.


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