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Moyen Orient et Monde - Diplomatie

Lutte d’influence Europe-USA sur l’Ukraine

La crise ukrainienne brouille les Occidentaux ; Washington et Moscou à couteaux tirés.

À Kiev, les manifestations pro-UE ont dégénéré en janvier et ont fait au moins quatre morts et 500 blessés. Martin Bureau/AFP

La crise ukrainienne a brouillé hier les Occidentaux, révélant la lutte d'influence que se livrent Bruxelles et Washington à propos de l'Ukraine sous le regard narquois de Moscou. La secrétaire d'État adjointe Victoria Nuland a été enregistrée à son insu, disant à son interlocuteur que l'Union européenne (UE) devait « aller se faire foutre ». Mme Nuland, dont la voix est très clairement identifiable sur la bande-son mise en ligne, s'entretient apparemment avec l'ambassadeur des États-Unis en Ukraine, Geoffrey Pyatt, de la manière de régler la situation politique dans ce pays.

La publication sur YouTube d'une bande-son avec les propos de Mme Nuland a été aussitôt relayée sur le Twitter de Dmitri Loskoutov, un proche collaborateur du vice-Premier ministre russe Dmitri Rogozine, ancien ambassadeur de la Russie auprès de l'OTAN. Cela a poussé Washington à accuser presque ouvertement la Russie d'être à l'origine du scandale. Pour le porte-parole de la Maison-Blanche, Jay Carney, le fait que la conversation ait été « diffusée sur Twitter par le gouvernement russe est significatif du rôle de la Russie ». Le département d'État a pour sa part estimé que les méthodes de la Russie étaient « tombées bien bas ». Dans la crise ukrainienne, la Russie s'oppose à l'Union européenne et aux États-Unis, qu'elle accuse d'encourager la contestation. Les manifestations ont dégénéré en janvier et ont fait au moins quatre morts et 500 blessés.

Aide substantielle
Signe de l'irritation persistante dans les relations entre Moscou et Washington, un conseiller du Kremlin, Sergueï Glaziev, a accusé jeudi les États-Unis de financer « l'opposition ukrainienne et les rebelles » en dépensant « 20 millions de dollars par semaine ». « Pure fantaisie », a commenté Mme Nuland, ironisant sur les talents d'« écrivain de science-fiction » du responsable russe. Moscou a accordé en décembre à l'Ukraine, au bord de la cessation de paiement, des crédits de 15 milliards de dollars et un rabais sur le prix du gaz, après l'avoir dissuadée de signer un accord d'association avec l'Union européenne. Mais le président russe, Vladimir Poutine, a laissé entendre dernièrement que cette aide pourrait dépendre de la couleur du futur gouvernement ukrainien. Interrogée sur une éventuelle aide financière internationale, Mme Nuland a dit que cette assistance devrait être « substantielle », mais dépendait des réformes à mettre en place.

La chancelière allemande Angela Merkel a de son côté vivement critiqué les propos de la secrétaire d'État adjointe américaine, estimant que ces insultes proférées par Mme Nuland étaient « absolument inacceptables », selon une porte-parole. « La chancelière veut une nouvelle fois marteler que Mme (Catherine) Ashton (la ministre européenne des Affaires étrangères) fait un excellent travail », a indiqué la même source. Mme Ashton a, rappelons-le, effectué cette semaine une visite de deux jours en Ukraine avant l'arrivée de Victoria Nuland. Cette dernière s'est refusée hier à tout commentaire, évoquant « une conversation diplomatique privée ». Elle a souligné que celle-ci avait été enregistrée avec un « professionnalisme impressionnant », au cours d'une conférence de presse à Kiev. Les services de Mme Ashton ont dit de leur côté « ne pas commenter les fuites de conversations téléphoniques supposées ».


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