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Liban - Environnement

Naamé : Joumblatt et le Parlement s’engagent à fermer la décharge dans un an

La route de la décharge restait fermée, hier, et les manifestants doivent rendre leur décision publique aujourd'hui. Mais au-delà de la crise actuelle, quelles perspectives ?

Réunion des commissions de l'Environnement et des Travaux publics, hier, portant sur la décharge de Naamé. Photo Nasser Traboulsi

La journée d'hier, contrairement à celle qui l'a précédée, a été marquée par deux déclarations politiques importantes concernant la décharge de Naamé, dont les habitants ferment l'accès depuis le 17 janvier. D'une part, le député Walid Joumblatt, chef du Front de lutte nationale (principalement les députés du Chouf et de Aley), s'est « personnellement engagé », ainsi que son bloc, à la fermeture de la décharge le 17 janvier 2015, au jour de la fin du contrat, sans aucune prorogation supplémentaire. Faisant écho à cette déclaration, une décision similaire a été prise à l'issue d'une réunion conjointe entre les commissions parlementaires de l'Environnement et des Travaux publics.


À la lumière de ces développements, les manifestants de la Campagne pour la fermeture de la décharge de Naamé se sont réunis hier avec leurs alliés écologistes, et leur réunion devait se prolonger très tard dans la nuit. À l'heure de mettre sous presse, la route de la décharge restait fermée. Raghida Halabi, responsable de communication de la campagne, a indiqué à L'Orient-Le Jour que « les manifestants prennent leur temps pour prendre la bonne décision en collaboration avec les écologistes ».


Pour rappel, l'accès à la décharge est interdit aux camions de Sukleen depuis le 17 janvier, date à laquelle la décharge aurait dû être définitivement fermée avant qu'une nouvelle décision de prorogation d'un an ne soit prise par les autorités. La route a été brièvement ouverte aux camions lundi et mardi pour donner une chance aux négociations de la Campagne pour la fermeture de la décharge et des écologistes avec le ministère de l'Intérieur, des négociations qui se sont soldées par un échec et une poursuite du sit-in. Les habitants revendiquent la fermeture de la décharge qui, disent-ils, dégage des odeurs insupportables et des gaz toxiques qui causent des maladies graves au sein de la population des environs. La décharge est la plus grande du pays et accueille les déchets du Grand-Beyrouth et du Mont-Liban.
Depuis que la route des camions est fermée, le ramassage n'est plus assuré par Sukleen. Les ordures s'empilaient hier encore dans les rues de Beyrouth et du Mont-Liban.

 

Pas de prorogation du contrat
Le député Walid Joumblatt s'est donc personnellement engagé hier à veiller à ce que le délai de fermeture de la décharge, le 17 janvier 2015, soit respecté, « en empêchant, par tous les moyens possibles, toute nouvelle prorogation du contrat ». Il a évoqué également la nécessité de mettre au point un système de récupération des gaz avec production d'électricité et d'en faire profiter les municipalités des environs. « Nous nous engageons aussi à suivre de près le processus d'adoption de deux textes de lois proposée par le bloc, portant sur les indemnités dues depuis 2008 aux municipalités qui accueillent la décharge, et sur l'exemption de ces municipalités des taxes à payer à la Caisse autonome », a-t-il poursuivi. Le bloc, toujours selon M. Joumblatt, promet de suivre l'affaire auprès du futur gouvernement, surtout après l'engagement du Premier ministre désigné Tammam Salam de former une commission d'urgence chargée de régler cette crise. Il a demandé aux habitants, dont il dit « comprendre le cri de détresse », de rouvrir la route afin d'épargner au pays des problèmes supplémentaires.


La fermeture de la décharge dans un an a également fait l'objet d'une décision dite « politique » dans les commissions parlementaires de l'Environnement et des Travaux publics (elle devrait évidemment attendre la formation du gouvernement pour être approuvée). À la question de savoir si les alternatives à la décharge ont été évoquées, le député Mohammad Kabbani, président de la commission de l'Énergie, indique à L'Orient-Le Jour qu'« il y a un peu moins d'un an pour trouver une solution radicale à la crise des déchets solides ».
Le député rappelle l'existence d'une stratégie à long terme préparée par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) et adoptée en commission ministérielle, fondée sur l'achat d'incinérateurs avec production d'énergie. « Mais la mise en place de cette stratégie nécessite trois ans au moins, sans compter sept à huit mois entre son adoption en Conseil des ministres et la finalisation des formalités, explique-t-il. Cela signifie que nous vivrons plus de trois ans de flottement, après la fermeture définitive de la décharge de Naamé. Il nous faut trouver des alternatives d'ici là, avec des sites pour le compostage des matières organiques – très polluantes car elles dégagent des liquides et des gaz – et d'autres pour l'enfouissement des matières inertes. »


Interrogé sur les entorses au contrat d'origine signé entre l'État libanais et la compagnie qui gère le site, des entorses souvent dénoncées par les habitants et les écologistes comme étant la cause de l'impasse actuelle et des désagréments vécus par la population (80 % environ des déchets sont jetés dans la décharge), M. Kabbani a précisé « qu'elles n'ont pas été discutées au cours de la réunion, c'est la justice qui doit s'en charger ». Signalons qu'un sit-in a été effectué hier par des étudiants du parti Kataëb face au siège de Sukleen à Beyrouth afin de revendiquer une meilleure politique de gestion des déchets dans le pays et « un contrat plus strict » avec la compagnie.

 

Pourquoi pas les carrières désaffectées ?
Pas de solution définitive en vue donc et moins d'un an pour en trouver. Paul Abi-Rached, président du Mouvement écologique libanais (LEM), qui soutient le sit-in depuis le début, déplore le fait « qu'il n'y ait rien de nouveau dans les propositions » des responsables. « Ils proposent la fermeture pour le 17 janvier 2015 ? C'est la date de la fin du contrat, pas un jour de moins », dit-il à L'Orient-Le Jour. « Ils n'ont même pas fixé un lieu pour le compostage des matières organiques, s'étonne-t-il. Nous leur avons proposé d'utiliser des carrières désaffectées pour cela, sachant que les propriétaires de ces carrières sont souvent en contravention avec la loi. Or, nous apprenons qu'ils n'arrivent même pas à imposer cela aux principaux concernés ! »


Selon Paul Abi-Rached, une solution à court terme serait de fixer cinq sites dans les cinq cazas du Mont-Liban pour le compostage des déchets. Les ordures de Beyrouth seraient alors réparties sur ces sites suivant les quartiers. « Il n'y a rien de plus facile, dit-il. Le tri entre matières organiques et inertes se fait déjà à l'usine de La Quarantaine gérée par Sukleen, nous payons pour cela. Il s'agira alors de transporter les matières organiques vers les sites donnés : les mêmes camions qui les déchargeront ressortiront avec le compost (enrichisseur de sol). » À long terme, l'écologiste, qui, comme beaucoup d'autres de la société civile, décourage l'achat d'incinérateurs jugés coûteux, difficiles à entretenir et trop polluants, préconise une solution basée sur le tri dans les maisons, le recyclage, le compostage et l'établissement d'usines de traitement dans chaque municipalité ou fédération de municipalités.

 

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