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Liban - Liban

Sit-in de Naamé : un délai sous conditions

Une nette progression dans les contacts politiques autour de cette affaire a été constatée hier.

Les ouvriers de Sukleen commencent le ramassage des déchets lundi à l’aube, après la décision des manifestants d’ouvrir la route pour 48 heures. Ici à Beyrouth. Photo Hassan Assal

C'est dans la nuit de dimanche à lundi que les différentes parties qui organisent et effectuent le sit-in devant la décharge de Naamé se sont entendues sur le délai de 48 heures donné aux autorités, qui devrait permettre l'arrivée des camions de Sukleen jusqu'à la décharge. Ce qui signifie que les ordures sont ramassées par la compagnie depuis hier. Un communiqué a été publié aux aurores par la Campagne de fermeture de la décharge de Naamé et par le Mouvement écologique du Liban (LEM) annonçant la décision et fixant le nouveau délai pour le 21 janvier (aujourd'hui) à 18h.


Rappelons que le sit-in des habitants de Naamé-Aïn Drafil a commencé le 17 janvier, le jour où devait expirer le délai d'utilisation de la principale décharge du pays (celle qui accueille les ordures du Grand-Beyrouth et du Mont-Liban), avant qu'il ne soit prorogé d'un an, une énième prolongation que les habitants n'ont pas tolérée. Ils souffrent, affirment-ils, des odeurs insupportables tout comme des émissions de gaz toxiques qui, selon eux, provoquent une recrudescence des maladies et obligent les habitants à déménager vers d'autres contrées.


Mais ce sursis ne vient pas sans conditions. Paul Abi-Rached, président du LEM, rappelle que cette décision a été prise suite à un entretien dimanche avec le Premier ministre désigné Tammam Salam. Celui-ci avait promis de former une commission d'urgence pour traiter ce problème dès que son cabinet sera opérationnel. Il s'était également engagé à œuvrer pour faire avancer les négociations entre les manifestants et les autorités concernées. Ainsi, une délégation des habitants et des écologistes devrait être reçue aujourd'hui par le ministre sortant de l'Intérieur Marwan Charbel pour trouver une issue à cette affaire.


Pour en revenir aux conditions, elles sont ainsi résumées par Paul Abi-Rached : des garanties que le délai du 17 janvier 2015 ne sera plus prorogé – en d'autres termes que la décharge sera définitivement fermée d'ici à un an – et une assurance que seuls les déchets inertes (donc non organiques) seront jetés dans cette décharge durant cette année. Un son de cloche légèrement différent est venu de Hayat Arslane, présidente de l'Association libanaise du don, qui participe au sit-in : elle a déclaré à l'agence al-Markaziya que la population fermera la route aux camions de nouveau si la compagnie ne trouve pas un autre terrain pour y jeter les déchets à la fin des 48 heures et ne s'engage pas à commencer sur-le-champ le traitement de la décharge, devenue « une bombe à retardement ».

 

Les arriérés aux municipalités
Il n'empêche que le sit-in semble avoir démarré une dynamique politique qui était bien visible hier, après trois jours de quasi-absence des responsables concernés (ils ne répondent même pas au téléphone). Ainsi, comme promis, M. Salam a entamé ses contacts et a suivi l'affaire de Naamé avec le Premier ministre démissionnaire Nagib Mikati. Ce dernier a présidé une réunion au Grand Sérail avec les ministres sortants de l'Environnement Nazem el-Khoury, de l'Intérieur Marwan Charbel, le président de la commission parlementaire de l'Environnement, le député Akram Chehayeb, le président du Conseil du développement et de la reconstruction (CDR), Nabil el-Jisr, et un représentant de Sukleen.


M. Mikati a précisé à M. Salam que les participants à la réunion ont décidé d'adopter les décrets nécessaires pour payer les arriérés des indemnités dues aux municipalités qui accueillent la décharge, de mettre la question de l'achat d'incinérateurs (avec systèmes de récupération des gaz pour la création d'énergie) sur l'ordre du jour de la première séance du Conseil des ministres, et enfin de charger un bureau d'audit international de surveiller les opérations de tri et de recyclage de Sukleen. La compagnie a déclaré, durant cette réunion, avoir commencé à construire une usine dans cet objectif. M. Salam a souhaité que ces mesures soient prises sans plus tarder, et que les écologistes et les habitants poursuivent le dialogue avec les autorités.
Pour sa part, le président du Parlement Nabih Berry a appelé hier les commissions de l'Environnement et des Travaux publics à se réunir le jeudi à 10h30, en présence du CDR et des institutions concernées, pour discuter du traitement des déchets ménagers et de la crise liée à la décharge.

 

Enquête sur le contrat avec Sukleen
Par ailleurs, un autre développement est intervenu hier : selon l'Agence nationale d'information, le parquet financier a entamé son enquête sur le contrat signé par le gouvernement avec la compagnie Sukleen. En prévision d'une séance fixée pour aujourd'hui, le parquet a convoqué le directeur de la compagnie pour l'entendre dans le cadre de cette affaire. Il faut savoir que les manifestants de Naamé, écologistes en tête, ont souvent évoqué les irrégularités et les entorses à ce contrat signé en 1997 et prorogé à plus d'une reprise. Les deux événements sont-ils liés ?


Sur ce même sujet, le ministre sortant de l'Environnement Nazem el-Khoury s'est prononcé hier « pour une fermeture de la décharge de Naamé ainsi que de toutes les décharges incontrôlées du pays ». Mais la solution, selon lui, « ne devrait pas être temporaire ». Il a plaidé pour « l'adoption, par le Parlement, du projet de loi sur la gestion intégrée des déchets solides qui lui a été transféré par le gouvernement ». Le ministre a rappelé également qu'une stratégie de traitement des déchets, qui préconise la technologie de l'incinération avec production d'énergie (« Waste to Energy »), a été finalisée par une commission ministérielle en février 2013, qui l'a transférée au Conseil des ministres pour adoption. « La démission du gouvernement a empêché son adoption », a-t-il poursuivi.
À savoir que la société civile dans sa majorité ne préconise pas l'adoption de cette technologie, jugée coûteuse et difficile à entretenir, lui préférant une solution fondée sur le tri, le recyclage et le compostage des matières organiques.


Enfin, notons que le Parti communiste libanais (PCL) a apporté hier son soutien aux manifestants de Naamé, déplorant l'inaction des gouvernements successifs dans le domaine du traitement des déchets solides.

Pour mémoire

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