Selon HRW, 14% des filles yéménites étaient mariées avant leur 15e anniversaire. Photo AFP
La ministre yéménite des Droits de l'Homme Houria Machhour a annoncé samedi vouloir œuvrer à l'élaboration d'un nouveau projet de loi fixant à 18 ans l'âge légal du mariage au Yémen, après la mort présumée d'une fillette qui aurait été mariée à huit ans.
Un responsable local a cependant démenti le décès de cette fillette, Rawan, rapporté par des militants yéménites de droits de l'Homme et des informations de presse locales et internationales. Selon eux, elle est morte après avoir été violée par son époux plus âgé, dans la province de Hajja (nord-ouest).
Mme Machhour a assuré à l'AFP vouloir relancer un projet de loi fixant à 17 ans l'âge légal du mariage, qui avait été suspendu en 2009, et aller au-delà, pour porter cet âge à 18 ans.
"J'ai écrit au président de la Chambre des députés pour réinscrire à l'ordre du jour du Parlement le projet de loi limitant l'âge du mariage, suspendu depuis 2009", a-t-elle dit. "Nous demandons de fixer l'âge légal du mariage à 18 ans, le Yémen étant signataire de conventions internationales sur la défense des enfants", a-t-elle ajouté.
Selon des militants yéménites, le projet avait été bloqué en 2009 par des députés ultraconservateurs du parti islamiste al-Islah, dont Aref al-Sabri, un enseignant à l'université théologique al-Iman, dirigée par l'influent chef islamiste Abdelmajid Zendani, soupçonné par les États-Unis de soutenir le terrorisme.
Le mariage des enfants est une pratique courante au Yémen, un pays pauvre et à structure tribale.
Alors que le gouvernement a formé une commission d'enquête sur la mort présumée de Rawan, le gouverneur de Hajja, Ali al-Qaïssi, cité par l'agence officielle Saba, a affirmé que "la fillette Rawan Mohamed Abdo Hattane vit toujours normalement au sein de sa famille qui a, à son tour, démenti toute l'affaire".
Il a cependant ajouté que "la fillette se trouve actuellement dans un centre de protection sociale après avoir été soumise à des examens physiques et psychologiques dans un hôpital public" de la région
.
Interrogée sur son décès présumé, avant le démenti du gouverneur, la ministre a dit: "pour le moment, nous ne disposons pas encore de preuves". Elle a affirmé "craindre qu'il y ait une tentative de faire taire l'affaire d'autant qu'elle aurait eu lieu dans une zone rurale isolée de la province de Hajja où des affaires similaires s'étaient produites auparavant". "Si l'affaire était confirmée et qu'elle avait été occultée, le crime serait plus grand", a averti la ministre, engagée à faire "interdire le mariage des enfants".
Vendredi, la chef de la diplomatie de l'Union européenne, Catherine Ashton, réagissant aux informations faisant état de la mort de Rawan, s'était dite "consternée", et avait appelé le Yémen à interdire les mariages d'enfants.
En 2010, Nojoud Mohamed Ali, alors âgé de 10 ans, avait été la première petite Yéménite à obtenir le divorce après avoir été mariée de force en février 2008, abusée sexuellement et battue par son mari, de 20 ans son aîné.
Le combat de cette fillette contre le mariage forcé avait fait le tour du monde, entraînant de nombreux appels à interdire le mariage des jeunes filles avant l'âge de 18 ans.
Avant l'unification du Yémen en 1990, l'âge légal pour le mariage était fixé à 15 ans dans le Nord et à 16 ans dans le Sud. Mais dans le Yémen unifié, la législation ne mentionne aucune limite d'âge.
Selon un rapport de Human Rights Watch de 2011, des statistiques officielles et de l'ONU montrent qu'environ 14% des jeunes filles yéménites sont mariées avant l'âge de 15 ans et 52% avant 18. Dans certaines zones rurales, des enfants de huit ans sont données en mariage à des hommes parfois beaucoup plus âgés.
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