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À La Une - Reportage - Liban

"Papa, va-t-on encore voir des cadavres?"

Tripoli semblait tétanisée en ce samedi, jour de deuil national décrété dans l'ensemble du Liban.

Un habitant de Tripoli blessé dans une des explosions du 23 août 2013. REUTERS/Jamal Saidi

Saïd Ebous s'effondre en larmes, étreint par sa femme en tenue de deuil : il priait dans la mosquée al-Taqwa à Tripoli, dans le nord du Liban, lorsqu'une voiture explose devant la cour, fauchant leurs trois enfants.

"Quand je suis sorti dans la cour de la mosquée, j'ai vu plein de cadavres, j'ai su que mes enfants avaient péri", dit-il, entre deux sanglots, dans sa baraque dans le quartier sunnite populaire de Bab el-Tebbané.

"On m'a emmené dans une maison proche pour me calmer. Par la suite, on m'a dit : "Tes enfants sont au paradis"', se souvient-il. Ses enfants, c'était une fillette de sept ans et deux garçons de quatre et cinq ans.

Il se rappelle avoir été effondré, criant le nom de Dieu. Il tombe dans les bras de sa femme, qui éclate également en sanglots.

La grande ville portuaire s'est réveillée sous le choc au lendemain du double attentat qui a visé deux mosquées et fait 45 morts et des centaines de blessés, selon un bilan encore non définitif.

Rues désertes, très peu de circulation et magasins fermés : Tripoli semblait tétanisée en ce jour de deuil national décrété dans l'ensemble du pays et de funérailles, a constaté le correspondant de l'AFP.


(Lire aussi : Tripoli : les responsables craignent pour la sécurité du Liban)

La psychose de nouvelles attaques était également palpable, avec des barrières en métal devant les magasins, des patrouilles renforcées de l'armée dans les rues, mais aussi des hommes en civil armés postés devant les mosquées et près des sièges de partis politiques, de maisons de députés et de dignitaires religieux. Les forces de sécurité arrêtaient et fouillaient toute voiture suspecte.


En début d'après-midi, des hommes armés ont obligé les quelques magasins ouverts à fermer leurs portes après avoir repéré une bombe à l'entrée de la ville.

De même que l'attaque à la voiture piégée il y a une semaine dans la banlieue chiite de Beyrouth, bastion du Hezbollah, les explosions de Tripoli ne visaient pas des personnalités politiques, comme ce fut le cas au cours des dernières années au Liban, mais ont fauché la vie essentiellement à des civils.


"Ma fillette ne cesse de me demander depuis hier : 'Papa, va-t-on encore voir des cadavres?'", affirme Moustapha al-Moussaouel qui priait également dans la mosquée al-Taqwa et vit à côté.

"Quand j'ai entendu l'explosion, je n'ai pensé qu'à ma famille. J'ai marché sur des corps et accouru à la maison, où j'ai vu ma femme et mes deux fillettes blessées à la tête... J'ai vu aussi des restes humains sur mon balcon".


Les sites des attaques, l'un dans le centre, l'autre près du port, étaient bouclés par l'armée qui continuait samedi de dégager les nombreuses carcasses de voitures calcinées. Des chaussures étaient encore éparpillées sur la chaussée.

 

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Des commerçants inspectaient leurs magasins dévastés et des personnes erraient près des sites des explosions à la recherche de proches.

"Je cherche le mari de ma sœur. Voici sa voiture", affirme Mohammed Khaled, 38 ans, en montrant un véhicule endommagé. "Il est pâtissier, il venait de Beyrouth et passait par là", ajoute-t-il très nerveusement.

"Sa famille est effondrée. S'il est mort, que Dieu ait son âme", lâche le jeune homme.

Beaucoup de corps carbonisés ou des restes humains n'ont pas encore été identifiés, selon un responsable des services de sécurité.

La vague d'attentats a ravivé le souvenir douloureux des attaques à la voiture piégée (1975-1990), ainsi que des assassinats de personnalités politiques hostiles au régime syrien. Aujourd'hui, la peur prédomine.

 

"Je n'ai jamais vu autant de destructions et de morts dans mon quartier", affirme Saïd Farhat, qui travaille dans un magasin de vêtements proche de l'autre mosquée visée, al-Salam.

"J'ai peur que cela ne se reproduise, j'ai peur de mourir enterré sous des décombres", ajoute cet homme de 35 ans.

"Je pense émigrer. Tout va mal au Liban et il n'y a plus d'endroit sûr dans le pays".


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Saïd Ebous s'effondre en larmes, étreint par sa femme en tenue de deuil : il priait dans la mosquée al-Taqwa à Tripoli, dans le nord du Liban, lorsqu'une voiture explose devant la cour, fauchant leurs trois enfants.
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commentaires (2)

SI ON NE SE RETIRE PAS DU BOURBIER Où ON A PLONGÉ ET TOUT LE PAYS AVEC... À LA PELLE !

SAKR LOUBNAN

09 h 53, le 25 août 2013

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Commentaires (2)

  • SI ON NE SE RETIRE PAS DU BOURBIER Où ON A PLONGÉ ET TOUT LE PAYS AVEC... À LA PELLE !

    SAKR LOUBNAN

    09 h 53, le 25 août 2013

  • Oui malheureusement, tant que le Hezbollah sera là à attiser les haines, les rancunes et le fanatisme. Les enfants, ne croyez surtout pas les imbéciles heureux qui vous disent que ces mercenaires sont là pour sauver le Liban ! Ce ne sont que les fossoyeurs du Liban.

    Robert Malek

    00 h 52, le 25 août 2013

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