Comme il fallait s’y attendre, la décision de l’Union européenne d’inscrire la branche armée du Hezbollah sur sa liste noire des organisations terroristes a été au centre du nouveau discours que le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a prononcé hier soir à l’occasion d’un iftar organisé par les associations féminines du parti chiite.
Dans son discours, retransmis comme à l’accoutumée par vidéoconférence, sayyed Nasrallah a vivement stigmatisé la décision européenne, affirmant qu’elle n’est pas « souveraine » et qu’elle est le fuit d’un diktat « américain et sioniste ». Dans sa lancée, il a été jusqu’à faire assumer à l’UE la responsabilité de toute attaque qu’Israël pourrait possiblement mener contre le Hezbollah en prenant pour prétexte la mesure prise par les 28 pays de l’UE, soulignant en outre que ses partisans n’ont que faire des visas européens... Au plan local, et dans ce qui paraît comme une pique à l’UE (et au 14 Mars), Nasrallah a suggéré que les ministres du Hezbollah dans le prochain gouvernement soient choisis parmi les responsables militaires et sécuritaires du parti...
Sayyed Nasrallah a débuté son discours en mettant l’accent sur « le soutien dont bénéficie la résistance (entendre le Hezbollah) de la part de son peuple du fait de la crédibilité qu’elle a acquise grâce à ses sacrifices et sa vigilance, et aussi parce qu’elle n’a pas cédé, n’a pas fait de compromissions et n’a pas été vaincue ». « La résistance, a poursuivi Nasrallah, a acquis sa crédibilité grâce à ses victoires qui ont modifié les règles du jeu, qui ont mis en échec certains projets, qui ont restitué la terre, les prisonniers et la dignité, et qui ont redonné au Liban une place d’avant-garde dans la région. Cette résistance restera une épine plantée dans l’œil de l’ennemi israélien et dans l’œil de tous ceux qui chercheront à lui porter préjudice. »
Le leader du Hezbollah a ensuite souligné que la décision de l’UE concernant la branchée armée du parti chiite « ne nous a pas surpris ». « Nous nous y attendions et il est étrange qu’elle ait tardé », a-t-il déclaré avant de relever l’accueil enthousiaste que cette mesure a suscité chez le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. Il a invité à ce propos « les Libanais qui accueilleront favorablement cette décision à cacher leur joie afin de ne pas se placer au même plan que Netanyahu ». Et d’ajouter : « Cette décision (de l’UE) est une décision israélienne et elle sert Israël. L’Europe s’est soumise, elle n’était pas convaincue (de cette mesure), mais elle s’est soumise à la volonté de l’Amérique. Cela signifie qu’au sein de l’UE, d’aucuns estimaient que cette décision était irrationnelle, mais ils se sont soumis. Cette décision n’est nullement souveraine pour ce qui a trait aux Européens. Elle est le fruit d’un diktat et elle n’est pas en phase avec les valeurs, les principes et les intérêts de l’Europe. »
(Repère : Liste de l'UE des organisations terroristes : mode d'emploi)
« Une couverture légale à Israël »
Sayyed Nasrallah a affirmé que la décision prise par l’UE rendait celle-ci « responsable » de toute attaque israélienne contre le Liban. « Ces États (européens) se sont rendus pleinement responsables de toute attaque israélienne contre le Liban, contre la résistance libanaise (le Hezbollah) ou contre toute autre cible de cette résistance », a souligné Nasrallah.
Pour le chef du Hezbollah, ces « États doivent savoir qu’ils sont en train de donner une couverture légale à toute attaque contre le Liban, car Israël peut maintenant faire valoir qu’il combat le terrorisme et qu’il bombarde des cibles terroristes ». La décision européenne rend à Israël un grand service, a ajouté Nasrallah, soulignant qu’elle n’apporterait aux Européens qu’ « échec et déception ».
Après s’être interrogé sur l’intérêt qu’avait l’UE à adopter une telle mesure, le chef du Hezbollah a demandé pourquoi l’armée israélienne n’est pas inscrite sur la liste du terrorisme, « d’autant, a-t-il déclaré, que les Européens considèrent que l’armée israélienne occupe des territoires en Cisjordanie et dans le Golan et qu’elle n’applique pas les résolutions internationales ». Tout en minimisant la portée de la décision de l’UE « qui n’a qu’une valeur morale », Nasrallah a estimé que la mesure en question constitue « une atteinte aux résistants (...), au Liban, au gouvernement libanais et au peuple libanais ». « Mais cette atteinte n’aura aucun impact sur notre moral », a affirmé le leader du Hezbollah qui a tourné en dérision la décision de l’UE, déclarant à ce sujet : « Nous n’avons pas d’argent dans les banques à l’étranger. Nous n’avons que faire des visas pour faire du tourisme. Tout ce que nous faisons, c’est de nous rendre au Sud, dans la Békaa et en montagne. Le parti n’a pas de projets économiques ou des projets d’investissements en dehors du Liban. Nous n’avons que des projets se rapportant aux services, et tous ceux qui utilisent le nom du Hezbollah dans des projets d’investissements sont des menteurs », a-t-il conclu.
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