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Liban - L’éclairage

Bras de fer politique plutôt que litige constitutionnel

Un ancien ministre estime que la bataille en cours entre la présidence du Parlement et celle du Conseil des ministres reflète un conflit politique par excellence, aggravé par les événements de Saïda et la crispation sunnito-chiite qui en a résulté.


Dans l’opinion sunnite, il ne fait pas de doute que des éléments desdites « brigades de la résistance », émanation du Hezbollah, ainsi que du mouvement Amal, ont participé aux affrontements, établi des barrages de contrôle des identités et se sont déployés autour de la résidence de la députée Bahia Hariri, à Majdelioun, dans la banlieue de la ville.


Ces considérations ont d’ailleurs fait l’objet de plaintes qui ont été transmises par une délégation sidonienne, conduite par l’ancien Premier ministre Fouad Siniora et Mme Hariri, au président de la République, Michel Sleiman, au Premier ministre sortant, Nagib Mikati, ainsi qu’aux responsables de l’armée. En revanche, la délégation ne s’est pas rendue chez le président de la Chambre, Nabih Berry, et pour cause : sa propre formation est accusée d’avoir pris part aux hostilités.


Ainsi donc, le litige juridique tournant autour de la conformité à la Constitution de la séance parlementaire qui était initialement prévue hier et, consécutivement, autour des prérogatives des deuxième et troisième présidences, est le fruit de considérations politiques et reflète le bras de fer entre sunnites et chiites.


Aux yeux des premiers, la convocation de la Chambre à une séance législative avec un ordre du jour de 45 points, pour la plupart ordinaires, à l’ombre d’un gouvernement qui expédie les affaires courantes, signifie que l’on cherche à transgresser les prérogatives du chef du gouvernement (sunnite) et à attaquer les droits du pouvoir exécutif.
Cela équivaudrait à prétendre que le Parlement est en mesure de légiférer de façon ordinaire en l’absence d’un gouvernement responsable, investi de la confiance de la Chambre, et à l’ombre d’un cabinet qui n’est que sortant. Or il y a ici un risque de torpiller toutes les tentatives que mène le Premier ministre sortant, Tammam Salam, pour former un nouveau gouvernement.


Toujours aux yeux des milieux sunnites, cela constituerait la goutte d’eau qui ferait déborder le vase, déjà rempli des conditions posées par le 8 Mars pour débloquer le processus gouvernemental, comme l’obtention du tiers de blocage au sein du cabinet, le rejet de la rotation cyclique des ministères, le maintien des Affaires étrangères dans le giron du Hezbollah, la consécration de la formule armée-peuple-résistance et le refus de la déclaration de Baabda.


Un juriste éminent, ancien ministre de la Justice, rappelle, de son côté, que la tenue d’une séance législative de la Chambre en dehors des sessions ordinaires fixées par la Constitution aurait besoin en tout état de cause d’un décret d’ouverture d’une session extraordinaire signé par le Premier ministre (en exercice et non sortant) après consultation du chef de l’État. Ce décret doit d’ailleurs clairement comporter l’ordre du jour de la session extraordinaire à ouvrir.
Or le président de la Chambre et ses partisans se fondent sur le paragraphe trois de l’article 69 de la Constitution pour affirmer qu’il n’est nul besoin de ce décret étant donné que la Chambre doit être considérée en session extraordinaire d’office jusqu’à la formation d’un gouvernement et son obtention de la confiance.


Mais le juriste cité plus haut explique que ce paragraphe n’est là que pour empêcher tout vide institutionnel et permettre à la Chambre de voter au plus tôt la confiance au nouveau gouvernement, ou encore à se réunir pour des questions très urgentes, à caractère national, et certainement pas pour légiférer comme à l’ordinaire.


Mais les explications de ce juriste sont quasiment inutiles, car en réalité le litige n’a rien à voir avec la Constitution. On se cache derrière les textes, un point c’est tout.


Comme le souligne un ancien ministre, ce qui se passe reflète un état de crise grave entre les composantes politiques et confessionnelles. Pour lui, l’unique moyen de régler le problème est de permettre la formation rapide du gouvernement en allégeant les pressions exercées sur le Premier ministre désigné. Dans le même temps, il préconise un retour de toutes les parties à la table de dialogue afin, pour le moins, d’organiser les désaccords politiques.

 

 

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