La tragédie qu’ont vécue la ville de Saïda et ses environs continue de susciter des commentaires dans les rangs du 14 Mars, où des critiques, directes ou indirectes, contre le comportement de l’armée se font toujours entendre.
Reçu à Majdelioun, dans la banlieue de Saïda, par sa collègue Bahia Hariri, en compagnie de Fouad el-Saad et Antoine Saad, le député Marwan Hamadé a déclaré, au nom du « corps parlementaire » et des députés indépendants, que ces derniers « n’acceptent pas que Saïda subisse ni les abus des prétendues brigades de la résistance ni ceux de l’une ou de l’autre des sections des forces sécuritaires ».
« Nous sommes soumis à l’autorité de l’État ; c’est cela que dit Saïda et c’est comme cela qu’elle se comporte. Et nous sommes contre l’hégémonie sur Saïda qui s’exerce par le biais de forces armées laxistes à l’égard des hors-la-loi. »
Le chef du PNL, Dory Chamoun, accuse pour sa part, dans une interview que diffuse aujourd’hui notre confrère al-Liwa’, le Hezbollah d’avoir « allumé les feux de la discorde à Saïda et participé aux combats » qui s’y sont déroulés. M. Chamoun s’interroge, dans ce cadre, sur les raisons pour lesquelles le parti chiite avait « placé ses hommes armés dans des appartements faisant face au QG de cheikh Ahmad el-Assir ».
« Je demande au président de la République et au commandant en chef de l’armée de traiter toutes les régions et toutes les communautés sur un pied d’égalité et de façon équilibrée, et cela afin de sauvegarder l’armée et de préserver la stabilité », ajoute-t-il, soulignant que « pour empêcher la discorde à Tripoli, il revient à l’armée de nettoyer Jabal Mohsen (le quartier alaouite) de ses armes ».
« Le pays est tout entier en danger en cas de maintien des armes échappant au contrôle de l’État », dit encore M. Chamoun, avant de constater « qu’il existe au sein de l’institution militaire des allégeances à des partis politiques et à des communautés plutôt qu’à l’État ». « Cela est une faille dangereuse », souligne-t-il.
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Michel Pharaon, député de Beyrouth, a relevé de son côté, dans une déclaration à la presse, qu’il existe « un sentiment de désenchantement chez les sunnites, comme si on cherchait à mettre cette communauté en situation de confrontation avec l’armée ». En fait, « c’est le contraire qui est vrai, les prises de position des chefs de la communauté le prouvent », a ajouté M. Pharaon, citant notamment « la position avancée en faveur de la troupe et contre les présences armées (non légales) adoptée par l’ancien Premier ministre Saad Hariri à la suite de la bataille de Saïda ». « Après ce qui s’est passé, nous sommes devant une occasion réelle de transformer Saïda en ville désarmée modèle. Pour cela, il faut retirer les armes de toutes les parties et fermer les officines militarisées », a préconisé M. Pharaon.
Quant au député Ammar Houri, membre du bloc du Futur, il a souligné à la NTV l’existence d’une « faute originelle » représentée par « l’apparition des armes non légales et le retournement de l’arsenal du Hezbollah en direction de l’intérieur libanais ». « C’est ce qui a fourni à d’autres parties un prétexte pour s’armer et faire face au Hezbollah », a ajouté M. Houri. « L’armée libanaise est notre armée, et ses fils sont les nôtres. Telle est notre position en tant que courant et que bloc du Futur. Mais nous ne nions pas que nous avons des remarques sur l’action » de la troupe, a-t-il dit. « Lorsqu’il y a une accumulation et que nous constatons qu’un camp déterminé est soumis à la répression et un autre à rien du tout, cela signifie que l’injustice s’est installée », a souligné M. Houri.
Enfin, le mufti du Mont-Liban, cheikh Mohammad Ali Jouzou, a évoqué l’action de l’armée en des termes très critiques.
« J’ai contesté la sacralisation de l’armée et l’idée de lui octroyer un mandat divin lui permettant d’agresser les citoyens ordinaires et de les tuer. Cela vaut pour le meurtre des deux cheikhs au Akkar (en 2012) ou bien pour les tueries commises lorsque le Hezbollah a été autorisé à envahir Beyrouth le 7 mai (2008), alors qu’il était possible d’éviter cela », rappelle cheikh Jouzou dans un communiqué.
« Quant au problème d’Ahmad el-Assir, il a coûté cher en vies humaines et en dégâts à l’armée et aux habitants de Saïda, sans parler de la destruction de tout un quartier de cette ville que le Hezbollah a tenu à ruiner, et il y est parvenu », ajoute-t-il, avant de conclure : « Soucieux de l’armée et de sa réputation, nous lui conseillons de libérer les innocents à Saïda et de ne pas les soumettre à la torture parce que nous sommes au Liban, pas en Syrie. »
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commentaires (4)
L'allégeance extra étatique ...? mais c'est infiniment grave....! il y a 16 militaires qui ont payé de leurs vie pour cette mascarade politico/militaire ...(si avérée )
M.V.
16 h 21, le 01 juillet 2013