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Un monde de solutions - Projet

En quoi la déraison permet de faire avancer les choses

Situé à Boulder, dans le Colorado, le Unreasonable Institute (traduisez l’Institut déraisonnable) est un projet qui met en avant un programme d’accélération permettant de changer le monde. Pour la quatrième année consécutive, l’équipe Unreasonable propose un programme intensif de six semaines aux entrepreneurs sociaux ayant de grandes idées, des idées destinées à la fois à faire le bien et à réaliser des profits. En travaillant nuit et jour au côté de mentors et d’investisseurs, les 25 innovateurs venus des quatre coins du monde plancheront sur leurs projets jusqu’à ce le « déraisonnable », l’irréaliste et l’utopique évoquent grandement des idées pour lesquelles l’heure est venue de voir le jour. Maintenant, le programme s’exporte, commençant au Mexique et au Kenya.

Ashley Murray est la fondatrice et PDG de Waste Enterprises Ltd., qui s’attaque de manière innovante aux problèmes de déchets et d’hygiène publique en Afrique.

En 1903, l’écrivain britannique George Bernard Shaw avait prédit que tout progrès reposerait sur l’homme déraisonnable. « L’homme raisonnable s’adapte au monde, écrivait-il. L’homme déraisonnable s’obstine à essayer d’adapter le monde à lui-même. » Plus d’un siècle plus tard, sa prophétie s’applique à un nouveau genre de révolution, celle visant à éradiquer la pauvreté.

 

Les paroles de George Bernard Shaw constituent le principe fondateur de l’Unreasonable Institute, programme basé dans le Colorado destiné à des entrepreneurs désireux de changer le monde. Il s’agit d’un atelier d’été d’une durée de six semaines qui réunit plus d’une dizaine d’entrepreneurs dont les plans d’entreprise sont susceptibles d’exercer un impact social.

En quatre ans seulement, 82 entrepreneurs ont été choisis pour participer à cet atelier, parmi 1 100 candidats originaires de 70 pays. Unreasonable s’appuie sur un réseau de 100 mentors provenant de domaines tous plus éclectiques les uns que les autres, le monde de l’art, des affaires, mais aussi de la technologie. Parmi ces derniers, Neal Baer, production d’émissions télévisées telles que New York, police judiciaire et Urgences ; Mary Russell, dirigeante de FedEx ou encore Lisa Waits, dirigeante au sein de Nokia.

 

Pendant ces quatre années, l’institut a réussi à donner vie à plusieurs success-stories. Myshkin Ingawale, originaire de Mumbai en Inde, participant en 2011, a conçu un appareil de la taille d’un téléphone portable capable de détecter dans le sang des concentrations d’hémoglobine. Ce dispositif permet au personnel de santé en milieu rural de réaliser des analyses de sang sans laboratoire et sans aiguille. Son entreprise, BioSense, a été reconnue par l’Organisation mondiale de la Santé comme l’une des technologies médicales les plus innovantes du marché à l’heure actuelle.

 

Unreasonable a pour mission de réunir des aspirants entrepreneurs et des mentors, en les mettant en contact avec de potentielles sources de financement, mais aussi en les aidant à adapter leurs modèles commerciaux. Bénéficiant du statut d’une association à but non lucratif, l’institut récupère 30 % de ses coûts d’exploitation grâce aux droits d’inscription, qui s’élèvent de 10 000 à 12 000 dollars par entreprise, sommes pouvant être collectées sur Unreasonable Marketplace, plate-forme de financement participatif. Le reste du financement provient de sponsors tels que Halloran Philanthropies, Hewlett Packard, Vodafone Americas Foundation, ou encore Rockdale Foundation.

 

L’institut a été créé en janvier 2009 par Daniel Epstein, Tyler Hartung et Teju Ravilochan, comme un lieu où des entrepreneurs sociaux peuvent profiter d’« outils » afin de lancer leurs idées. Aujourd’hui, l’institut s’ouvre à l’international, en quittant son lieu d’origine de Boulder et en adoptant une approche plus locale, en se lançant au Kenya et au Mexique.

 

 

Teju Ravilochan

 

 



Créer 100 instituts

L’objectif de l’institut, que Teju Ravilochan qualifie d’« audacieux », consiste à créer 100 instituts répartis dans 100 villes. Lorsque des entrepreneurs sociaux en herbe se rendent dans le Colorado, ils sont bien loin de leur environnement et de leurs marchés locaux. « Nous voulons savoir si nous pouvons créer une expérience similaire dans un environnement plus localisé, avec des investisseurs, des mentors et des entrepreneurs locaux qui connaissent parfaitement les tenants et les aboutissants du marché », explique Teju Ravilochan.

 

Les mentors américains ne peuvent imaginer les défis auxquels sont confrontés les pays en développement, par exemple les routes délabrées, la corruption, le cauchemar de la distribution, l’effondrement de l’infrastructure, mais aussi les autochtones.

« Ici, l’entrepreneur aura l’occasion d’éprouver ou de valider ses idées au sein même des communautés, et ce en toute simplicité, car elles sont extrêmement accessibles », a déclaré Jose Medina dans un courriel, depuis Aguascalientes, au centre du Mexique où il fait figure de fer de lance pour l’Unreasonable Institute mexicain.

Pour le moment, ces programmes locaux ne sont que des pilotes, affirme Teju Ravilochan. « Cette phase de test nous permet de voir si nous disposons d’un nombre suffisant de bons mentors et de bons investisseurs au niveau local au Kenya et au Mexique », poursuit-il.

 

Enfin, les fondateurs d’Unreasonable souhaitent créer ce qu’ils appellent un « pipeline mondial », où ils pourraient concevoir un prototype pour l’incuber au Kenya par exemple ; puis ils transformeraient cette idée en institut régional, disons en Afrique de l’est, où elle serait adaptée avant d’être rapatriée à Boulder.

« Tout ceci est un savant mélange d’expertise locale approfondie et de ressources mondiales », explique Teju Ravilochan.

 

 

The Unreasonables Trailer 2012 from Unreasonable Media on Vimeo.

 

L’Unreasonable Institute est l’une des nombreuses organisations américaines contribuant à soutenir et à guider des entrepreneurs sociaux. D’autres incluent StartingBloc, Ashoka, Draper Richards ou encore Echoing Green. Chaque organisation possède une approche différente. Echoing Green propose principalement des financements, tandis que l’Unreasonable se concentre sur le mentorat.

 

Une facette de ce mentorat est toutefois associée à la collecte de fonds. Par exemple, Ashley Murray, PDG et fondatrice de Waste Enterprisers, participante en 2012, pensait avoir besoin de 2 millions de dollars pour son entreprise basée au Ghana. Les conseils qu’elle a obtenus à Boulder cet été-là l’ont aidée à adopter une tout autre stratégie.

Il s’est avéré que la jeune femme n’avait en réalité besoin que de 310 000 dollars pour financer son projet de recyclage de déchets en carburant et en biodiesel. Ce qui lui a permis de garder plus de capitaux. Parmi les neuf investisseurs ayant conclu un accord avec la jeune femme, huit étaient issus du réseau Unreasonable.

 

Shivani Siroya, participant Unreasonable en 2012 et fondateur de InVenture, nous explique que le réseau de l’institut continue à lui être d’une grande utilité. InVenture a créé un outil de gestion financière mobile capable d’identifier un « pointage de crédit » pour les communautés à faibles revenus, leur donnant ainsi accès à des prêts proposés par des banques communautaires. L’équipe Unreasonable a accès à une « multitude d’opportunités », mais les entrepreneurs doivent afficher une attitude proactive. « Vous devez être très motivés pour atteindre ces individus et leur demander de l’aide », affirme Shivani Siroya, 30 ans.

 

 

Qualité et engagement

L’Unreasonable Institute ne cesse d’évoluer. Il prévoit de réduire le nombre de nouvelles entreprises admises chaque année, afin de pouvoir se concentrer sur la qualité et sur un engagement plus solide avec chacune d’entre elles. Ceci signifie qu’il devra trouver d’autres sources de financement, compte tenu de la baisse des frais d’inscription. Une solution possible, affirme Teju Ravilochon, serait de prélever une petite somme de capitaux aux entreprises que nous aidons à lancer.

 

L’Unreasonable Institute n’est qu’un maillon de la marque Unreasonable. Ses fondateurs comparent Unreasonable au groupe Virgin, le célèbre conglomérat multinational britannique. « Nous souhaitons créer une organisation « parapluie » capable d’insuffler la puissance de la marque au sein de plus petites entreprises appartenant au groupe », décrit Teju Ravilochan.

 

Unreasonable organise actuellement « Unreasonable-At-Sea », un voyage autour du monde mettant en scène un groupe d’entrepreneurs ambitieux. D’autres projets comprennent « Unreasonable Media », le bras artistique et narratif de l’association et « Unreasonable Capital », la composante financière ; « Unreasonable Adventures » ; « Unreasonable Travel » et enfin « Unreasonable Galactic », tous en cours de réalisation.

« Il s’agit d’une véritable expérience », résume Teju Ravilochan. « Et nous voyons les choses en grand ».

 

 

Cet article fait partie de notre notre édition spéciale "Un monde de solutions".

 

 

 

En 1903, l’écrivain britannique George Bernard Shaw avait prédit que tout progrès reposerait sur l’homme déraisonnable. « L’homme raisonnable s’adapte au monde, écrivait-il. L’homme déraisonnable s’obstine à essayer d’adapter le monde à lui-même. » Plus d’un siècle plus tard, sa prophétie s’applique à un nouveau genre de révolution, celle visant à éradiquer la...

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