Rechercher
Rechercher

À La Une - France

"Utilise-moi pendant le temps qui te convient" : la lettre d'allégeance de Lagarde à Sarkozy

Une missive dont les médias français se gaussent.

Nicolas Sarkozy et Christine Lagarde à l'Elysée, le 11 janvier 2012.  AFP/LIONEL BONAVENTURE

Dans le cadre du feuilleton de l'enquête sur l'arbitrage dont a bénéficié en 2008 l'homme d'affaires français Bernard Tapie dans son litige avec le Crédit Lyonnais, est ressortie, cette semaine, une lettre écrite par Christine Lagarde, ministre de l’Economie au moment des faits, à Nicolas Sarkozy, alors président.

 

Cette lettre, révélée par Le Monde, a été trouvée par les enquêteurs lors d’une perquisition effectuée le 20 mars dernier au domicile parisien de l’ancienne ministre, aujourd’hui directrice du Fonds monétaire international (FMI).

 

Cette lettre manuscrite, non datée et dont on ne sait pas si elle a été envoyée, est un véritable serment d'allégeance.

 

"Cher Nicolas, très brièvement et respectueusement", écrit la patronne du FMI.

"1) Je suis à tes côtés pour te servir et servir tes projets pour la France.

2) J'ai fait de mon mieux et j'ai pu échouer périodiquement. Je t'en demande pardon.

3) Je n'ai pas d'ambitions politiques personnelles et je n'ai pas le désir de devenir une ambitieuse servile comme nombre de ceux qui t'entourent dont la loyauté est parfois récente et parfois peu durable.

4) Utilise-moi pendant le temps qui te convient et convient à ton action et à ton casting.

5) Si tu m'utilises, j'ai besoin de toi comme guide et comme soutien : sans guide, je risque d'être inefficace, sans soutien je risque d'être peu crédible. Avec mon immense admiration. Christine L."

 

 

La justice française s'intéresse à un arbitrage contesté rendu par un tribunal privé entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais, banque française alors sous la tutelle de l'Etat, qui avait accordé à M. Tapie 285 millions d'euros d'indemnité (403 millions, intérêts inclus). Christine Lagarde a été placée fin mai sous le statut de témoin assisté, intermédiaire entre ceux d'inculpé et de témoin.

 

Cette lettre a suscité de nombreux commentaires, dont celui de de Jean-François Kahn, sous forme de tweet : "Il y avait des manifestes féministes, désormais on dispose d’un manifeste antiféministe. Un hymne au mâle dominant. Signé Christine Lagarde".

 

Dans le Huffington Post, l'intellectuel français dénonce aussi un "retour à la féodalité", "le féal plie le genou devant le suzerain". "La relation n’a évidemment rien de sentimental. Elle est purement politique. Mais Hortefeux exprimerait-il de la même façon son allégeance au parrain? C’est en ce sens que la lettre de Christine Lagarde renvoie la femme à un statut d’admiratrice illuminée, de servante heureuse, que deux siècles de lutte émancipatrices semblaient avoir relégué aux greniers des oppressions défuntes".

A moins, poursuit-il soulignant sa sympathie pour Christine Lagarde "que cela n’ait été qu’une simple ruse".

 

 

L’hebdomadaire L’Express a, pour sa part, appelé ses lecteurs à imaginer la réponse de Sarkozy, alors que dans Les Echos, Laurent Dugas décrypte la lettre d'un point de vue managérial.

 

 

Sur Radio France International, Arnaud Pontus se livre à un exercice savoureux de parodie. A écouter ici :

 

 

 

 

Et sur France Inter, Sophia Aram se lâche.

 

 

 

Twitter, bien sûr, n'est pas en reste. Deux exemples parmi tant d'autres :

 

 

 

Ascension météorique

Première femme à diriger le FMI, Christine Lagarde a connu une ascension météorique jusqu'au gotha des dirigeants mondiaux en se forgeant une solide carapace et une image distante et souvent insondable.

Avocate d'affaires aux États-Unis, ministre de l'Économie en France : cette fille d'enseignants et mère de deux fils s'est frayé, en moins de dix ans, un chemin vers ces hauts lieux du pouvoir où les femmes ne sont pas légion.

 

Propulsée en juillet 2011 à la tête du Fonds monétaire international par Nicolas Sarkozy, l'ex-ministre âgée de 57 ans a encore soigné son aura internationale en professant, dans un anglais parfait, la bonne parole du FMI aux quatre coins du globe (Chine, Egypte, Côte d'Ivoire...).

 

Après l'onde de choc de la chute de Dominique Strauss-Kahn, elle a surtout permis à l'institution d'offrir le visage plus consensuel et moins sulfureux d'une femme végétarienne, à la chevelure argentée et l'allure sportive qui affirme ne pas boire ni fumer et cultive un amour immodéré pour la mer.

"Je pense que j'ai dû être un dauphin dans une précédente vie", confiait-elle dans une récente interview.

 

Les États-Unis occupent une place à part dans sa carrière. C'est là qu'elle part étudier pendant un an et c'est également outre-Atlantique, des années plus tard, qu'elle prendra la présidence du cabinet d'avocats Baker & McKenzie avant d'être remarquée par la droite française. Débauchée en 2005, elle deviendra en 2007 la première femme à diriger le ministère de l'Économie en France où elle signera un record de longévité en y restant jusqu'en 2011.

 

Son adaptation n'a pas été sans heurts. En 2005, à peine entrée au gouvernement, elle juge le code du travail français "compliqué" et "lourd". Et en 2007, en pleine flambée des prix des carburants, elle appelle les Français à "utiliser leur bicyclette", contribuant à forger d'elle l'image d'une femme parfois distante et aristocratique.

 

Son arrivée à la tête du FMI n'aura pas totalement raison de son franc-parler. Elle provoquera ainsi un tollé en appelant au printemps 2012 les Grecs, essorés par les plans d'austérité, à payer tous "leurs impôts". Mme Lagarde n'a pas non plus hésité à froisser ses anciens partenaires européens, malmenés par la crise de la dette, en appelant à recapitaliser leurs banques "d'urgence" ou en réclamant des solutions "durables" aux problèmes de la dette grecque. Elle aurait même accusé son successeur à Bercy, Pierre Moscovici, de s'être endormi pendant une réunion consacrée à Chypre. "Je comprends pourquoi on n'entend pas la voix de la France", aurait-elle tonné selon des indiscrétions parues dans la presse.

 

Christine Lagarde. Reuters/Jose Luis Magana

 

 

"Mme Lagarde a, à de nombreuses reprises, fait preuve d'une franchise courageuse", assure à l'AFP Desmond Lachman, économiste et ancien officiel du FMI.

Même certains pays émergents, pourtant très remontés contre la surreprésentation des Occidentaux au sein du FMI, lui rendent hommage. "Je l'ai trouvée bien plus disposée à écouter des opinions minoritaires et indépendantes", assure à l'AFP Arvind Virmani, qui était le représentant indien au Fonds jusqu'à l'automne dernier, louant son sens du management "rafraîchissant".

 

Mais le fond de sa pensée économique reste difficile à cerner, d'autant qu'elle a dû accompagner le lent et tortueux aggiornamento du FMI sur l'austérité. Du temps où elle était ministre, ses détracteurs assuraient que la politique économique de la France était bien plus façonnée à l'Elysée qu'à Bercy.

 

Discrète sur sa vie privée, Mme Lagarde s'est toutefois autorisée quelques détours vers les pages "people" des magazines en s'affichant avec son compagnon, Xavier Giocanti, un entrepreneur marseillais qui se dit en charge de son "PIB", son "plaisir intérieur brut".

 

 

Pour mémoire

Le FMI continue d’apporter sa « confiance » à Christine Lagarde

 

La droite française dans la tourmente

 

 

 

 

 

 

Dans le cadre du feuilleton de l'enquête sur l'arbitrage dont a bénéficié en 2008 l'homme d'affaires français Bernard Tapie dans son litige avec le Crédit Lyonnais, est ressortie, cette semaine, une lettre écrite par Christine Lagarde, ministre de l’Economie au moment des faits, à Nicolas Sarkozy, alors président.
 
Cette lettre, révélée par Le Monde, a été trouvée par les...
commentaires (5)

Moi je connais une formule beaucoup moins sexy, celle des despotes étrangers et ennemis du Liban qui ont dit à chef mercenaire Nasrallah : on va t'utiliser le temps qu'il faudra et quand on aura fini de toi, tu iras te faire voir ailleurs (c'est la version polie).

Robert Malek

19 h 02, le 19 juin 2013

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • Moi je connais une formule beaucoup moins sexy, celle des despotes étrangers et ennemis du Liban qui ont dit à chef mercenaire Nasrallah : on va t'utiliser le temps qu'il faudra et quand on aura fini de toi, tu iras te faire voir ailleurs (c'est la version polie).

    Robert Malek

    19 h 02, le 19 juin 2013

  • LA FIDÉLITÉ AU PRIX FORT !

    SAKR LOUBNAN

    18 h 58, le 19 juin 2013

  • Belle déclaration de loyauté et parole tenue ...C'est très très rare chez nous ....!

    M.V.

    15 h 42, le 19 juin 2013

  • Trop drôle...elle a un petit côté SM,la Christine...quelle classe...politique.Regardez le sketch du petit journal de canal à ce sujet...à se trordre de rire...la pôvre! Scripta manent,verba volent...

    GEDEON Christian

    14 h 12, le 19 juin 2013

  • Oyez, oyez bonne-gens, faites acte de soumission à notre roi Sarko Ier. "4) Utilise-moi pendant le temps qui te convient et convient à ton action et à ton casting." : c'est pour un film porno ? "Si tu m'utilises, j'ai besoin de toi comme guide et comme soutien : sans guide, je risque d'être inefficace, sans soutien je risque d'être peu crédible." oh, elle a été en Iran ?

    Talaat Dominique

    12 h 19, le 19 juin 2013

Retour en haut