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À La Une - Portrait

Tammam Salam, un modéré et homme de principes

Le Premier ministre pressenti désigné par le 14 Mars et Joumblatt pour succéder à Mikati est issu d'une grande famille politique beyrouthine.

Tammam Salam. Photo d'archives

"Un modéré" doté d'un "sens de la diplomatie", un homme "affable, apôtre du passage en douceur"...

 

C'est en ces termes que les personnalités qui le connaissent de près présentent Tammam Salam, dont la candidature a été avancée jeudi soir par le 14 Mars et le leader druze Walid Joumblatt -dont le bloc au Parlement le met en position de faiseur de rois-, pour prendre la succession du Premier ministre démissionnaire, Nagib Mikati.

Les députés de la coalition menée par le sunnite Saad Hariri et ceux du bloc de M. Joumblatt vont nommer M. Salam lors des consultations de deux jours, entamées vendredi en début d'après-midi par le président de la République Michel Sleiman avec les différents groupes parlementaires en vue de la désignation d'un Premier ministre. Vendredi, M. Salam a fini de réunir sur son nom le soutien des représentants de la coalition du 8 Mars.

 

Député de Beyrouth, âgé de 67 ans, Tammam Salam est issu d'une famille dont les racines beyrouthines sont profondes. "Tammam Salam est le fils de deux pactes, le Pacte national de 1943 (compromis non écrit entre les deux communautés majoritaires, maronite et sunnite, de l'époque ; ndlr), dans lequel sa famille, à l'instar des Solh, a joué un grand rôle, et l'accord de Taëf" (signé le 22 octobre 1989, ce traité met fin à la guerre civile libanaise, ndlr)", explique un responsable politique interrogé par Lorientlejour.com.

 

La famille Salam a joué un rôle de premier plan dans la vie politique libanaise. Le père de Tammam, Saëb Salam, fut dès l'indépendance l'un des principaux leaders sunnites du pays. De manière générale, la famille Salam se distingue par sa modération, son attachement au libéralisme et son ouverture sur les autres communautés.

"En 1970, Saëb Salam s'est allié à Camille Chamoun, Pierre Gemayel et Raymond Eddé, pour mettre fin au 2e bureau (les services de renseignements de l'armée, ndlr). En 1982, il a essayé d'amortir le choc de l'élection de Bachir Gemayel à la présidence de la République, puis d'Amine Gemayel, auprès de la rue musulmane", rappelle le responsable politique libanais susmentionné.

 

Tammam Salam, qui a étudié l'économie, la finance et la gestion en Grande-Bretagne, a commencé sa carrière dans les affaires.

C'est en 1974, en fondant le "mouvement des pionniers de la réforme", qu'il fait ses premiers pas dans la politique, dans le sillage de son père. En 1982, il est nommé président du "Board of Trustees" des Makassed (association caritative sunnite) et président de la Fondation Saëb Salam.   

 

"La famille Salam a une longue tradition d'amitié avec l'Arabie saoudite qui a, par exemple, toujours parrainé la fondation des Makassed que Tammam préside", note le responsable libanais.

 

 

Saëb Salam, le père de Tammam Salam, en 1983. Photo d'archives.

 

Des relations difficiles avec la Syrie

Les relations avec la Syrie sont plus compliquées. "Ses relations avec les Syriens étaient difficiles, il était mal vu par Damas et a été contraint de vivre à l'étranger, alors que son père a été purement et simplement interdit de toute activité politique", rappelle le politicien.

 

En 1992, lorsque la tutelle syrienne sur le Liban était à son apogée, Tammam Salam fut l'une des rares personnalités musulmanes à se solidariser avec l'opposition chrétienne de l'époque qui avait appelé au boycott des élections législatives que le gouvernement pro-syrien en place avait organisé, sous l'impulsion de Damas, sur base d'une loi électorale jugée inique et déséquilibrée par le patriarche maronite et les partis chrétiens. A l'instar de l'écrasante majorité des pôles chrétiens réellement représentatifs de la base populaire, Tammam Salam s'abstiendra de poser sa candidature à ces élections.  

 

C'est en 1996 qu'il sera élu pour la première fois député de Beyrouth en tant que candidat indépendant.

En 1998, il parraine avec l'ancien Premier ministre Rafic Hariri la liste qui gagnera les municipales de Beyrouth. Mais deux ans plus tard, l'alliance Salam-Hariri se brise, les deux hommes s'affrontent lors des législatives à l'issue desquelles Tammam Salam sera sévèrement battu.

 

Après l'assassinat du député du Courant du Futur Walid Eido, en juin 2007, Tammam Salam se rapproche de l'ancien Premier ministre Saad Hariri et intègre le gouvernement d'union nationale de Fouad Siniora en juillet 2008, en tant que ministre de la Culture et représentant de l'alliance du 14 Mars.

 

Son entrée dans le gouvernement Siniora est perçue comme une ouverture du Courant du futur en direction des familles sunnites traditionnelles de Beyrouth. Tammam Salam, lui, préfère dire que sa relation avec Saad Hariri s'est consolidée après l’assassinat du député Walid Eido et l’appui qu’il a lui-même accordé au candidat choisi par le Courant du futur pour occuper le siège du défunt.

 

En septembre 2008, interrogé par L'Orient-Le Jour, M. Salam déclare qu’il est politiquement indépendant, mais que son arrivée au gouvernement s’est faite en coordination avec le chef du Courant du futur.

Tammam Salam réfute également la thèse selon laquelle sa nomination au ministère de la Culture a pour but d'accroître ses chances d’être élu au Parlement au printemps suivant (2009). "D’abord, je n’ai jamais disparu de la scène politique, j’ai conservé mes contacts avec toutes les parties et j’ai pris position lorsque je l’estimais nécessaire, affirme-t-il. De plus, certaines personnes ne sont ni au Parlement ni au gouvernement, et elles ont un poids considérable dans la vie politique. D’autres, au contraire, ont des postes officiels mais ne font pas parler d’elles. En fait, ce n’est pas la fonction qui donne le rôle. Elle constitue une étape dans la vie politique, c’est tout."

 

En 2009, il sera réélu député sunnite de Beyrouth sur la liste du 14 Mars, dirigée par Hariri.

 

Sur la scène politique libanaise, "Tammam Salam a des amis, il est proche du 14 Mars, dans ses composantes musulmanes mais également chrétiennes, il a de bons rapports avec Walid Joumblatt et Nabih Berry. En ce qui concerne le Hezbollah, il a dénoncé le coup de force de 2008 et soutient le Tribunal Spécial pour le Liban (TSL, chargé de juger les assassins de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, ndlr), auquel le parti chiite s'oppose, mais il n'a jamais attaqué le Hezbollah sur sa branche résistance. Il a toujours abordé les dossiers sensibles avec beaucoup de diplomatie verbale. Il a des amis, mais il n'a pas d'ennemi avéré, ce n'est pas un homme de polémique", souligne le responsable politique précité.

 

 

Sauver l’hippodrome romain de Beyrouth

Le dernier fait d'armes de Tammam Salam concerne le patrimoine libanais.

En avril 2012, Tammam Salam s’engage, en tant que député, sur le dossier de l’hippodrome romain du centre-ville de Beyrouth. A cette époque, le site risque d'être détruit par la construction d'un projet de centre commercialo-résidentiel.

Alors que le ministre de la Culture Gaby Layyoun autorise la construction du centre sur le site, tout en assurant que le projet intègrera l’hippodrome, le député Salam lance un cri d'alarme, et expose les raisons pour lesquelles le site archéologique doit être maintenu en l’état. Il met l’accent sur sa valeur historique et archéologique avant de rappeler les décisions qui avaient été prises par la Direction générale des antiquités puis par les ministres successifs de la Culture – dont lui-même – pour assurer le maintien en l’état du site.

 

Approche en douceur

Aujourd'hui, Tamamm Salam, en tant que Premier ministre pressenti, est appelé à s'attaquer à des dossiers autrement plus compliqués que celui de l'hippodrome romain : organiser la tenue des législatives et maintenir la stabilité dans un Liban en mauvaise posture, sur le plan économique mais également sécuritaire, alors que la crise syrienne menace de contaminer le pays du Cèdre.

 

L'homme a-t-il la carrure nécessaire?

"En tant que gestionnaire des affaires, je le vois à l'image du président Michel Sleiman, je pense qu'il va lui aussi privilégier une approche en douceur. Tammam Salam suit une politique de la modération, loin de l'intégrisme", estime le responsable politique interrogé.

 

"Tammam Salam est un homme très patient et très honnête. Il est diplomate, c'est un homme qui peut chercher à arrondir les angles, prendre tout le temps de négocier, mais qui ne reniera pas ses principes. Il est du genre à définir ses lignes rouges et à ne pas aller au delà, c'est un homme prêt à défendre ses principes et convictions jusqu'au bout,  souligne également, interrogé par Lorientlejour.com, un député qui l'a côtoyé de près. Il n'est pas du genre à s'accrocher à un poste, pour le poste, s'il réalise, après avoir déployé tous les efforts nécessaires, qu'il ne peut accomplir la mission qu'on lui a confiée".


 

 

 

"Un modéré" doté d'un "sens de la diplomatie", un homme "affable, apôtre du passage en douceur"...
 
C'est en ces termes que les personnalités qui le connaissent de près présentent Tammam Salam, dont la candidature a été avancée jeudi soir par le 14 Mars et le leader druze Walid Joumblatt -dont le bloc au Parlement le met en position de faiseur de rois-, pour prendre la succession...
commentaires (5)

Un bon retour aux sources. Inchallah Antoine Sabbagha

Sabbagha Antoine

17 h 06, le 05 avril 2013

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Commentaires (5)

  • Un bon retour aux sources. Inchallah Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    17 h 06, le 05 avril 2013

  • Saeb Salam l'Abou Zahra... mais NON GOUPIL ! Bonne chance à Tammam Salam.

    SAKR LEBNAN

    15 h 37, le 05 avril 2013

  • Il a un avantage considérable ...car c'est encore nous ! qui devront nous faire des cheveux....

    M.V.

    15 h 14, le 05 avril 2013

  • Le slogan que Saeb Salam répétait inlassablement: التفاهم والتفهم : "se mettre d'accord" et "comprendre l'autre". C'était un leader patriote. Son fils Tammam a reçu la même éducation familliale. Espérons qu'il saura naviguer le bateau avec une équipe compétente s'il est premier ministre évidemment.

    jean-Pierre EL KHOURY

    13 h 32, le 05 avril 2013

  • et l'oeillet alors!

    GEDEON Christian

    13 h 19, le 05 avril 2013

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