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Onze journalistes arabes à Berlin pour un meilleur dialogue entre l’Orient et l’Occident

Le courage du peuple allemand qui a reconstruit son pays et bâti l’Europe

Le bunker de la Reinhardtstrasse : construit par Hitler pour protéger les Berlinois durant la Seconde Guerre mondiale, il a été transformé en entrepôt de bananes en provenance de Cuba dans l’ancienne Berlin-Est. Après la réunification, l’espace a été redécoré en boîte de nuit. Aujourd’hui, il abrite une collection privée d’art.

Les francophones que nous sommes ont appris bien de choses à l’école. Des années plus tard, on se souvient encore vaguement des cours d’histoire. Certaines notions se sont bien incrustées : l’Anschluss rattachant l’Autriche à l’Allemagne nazie, l’annexion de la Pologne, l’État français de Vichy, l’appel du général de Gaulle depuis Londres, le débarquement des Alliés en Normandie, le plan Marshall pour la reconstruction de l’Europe et ensuite la Communauté économique du charbon et de l’acier...
Ceux qui ont une bonne mémoire visuelle se remémorent aussi certaines images que l’on qualifie d’historiques, celles en noir et blanc du président français François Mitterrand et du chancelier allemand Helmut Kohl, se tenant la main à Verdun et rendant hommage aux soldats français et allemands tombés durant la Première Guerre mondiale. Il y a aussi les photos du mur vacillant de Berlin au niveau de la porte de Brandebourg avec des milliers d’Allemands faisant la fête.
Les francophones que nous sommes ont appris une seule version de l’histoire, celle des vainqueurs. Dans nos livres, l’histoire s’est achevée avec la capitulation de l’Allemagne et a repris avec la construction de l’Europe.
Quelles idées les adultes que nous sommes ont actuellement de l’Allemagne ? Une importante industrie avec des noms aussi prestigieux que Seimens, Bosch, Miele, BMW, Mercedes, Porsche et Volkswagen, et un pays au-dessus de la crise, capable de racheter les dettes de toute l’Europe.
Un voyage en Allemagne était nécessaire pour comprendre que les Allemands, qui ont perdu deux guerres, ont été occupés et divisés, ont reconstruit leur pays sans jamais se plaindre et ont réussi en peu de temps à redevenir la première puissance économique d’Europe.
On oublie souvent que nombre de villes allemandes, dont Berlin, avaient été à 85 % détruites par l’aviation alliée. Nos livres d’histoire ne montrent pas les Allemands, hommes et femmes, victimes du froid et de la faim, reconstruisant leurs villes les mains nues.
Devant la puissance économique de l’Allemagne, l’on oublie souvent la souffrance d’un peuple divisé par un rideau de fer, portant en son sein la trace effroyable de la guerre froide, un mur qui a séparé les habitants d’une même ville, parfois les membres d’une même famille, durant 38 ans. L’on oublie également le courage et la force du peuple allemand qui a reconstruit son pays et qui a bâti l’Europe.
Discrets par nature et portant en eux, sur au moins deux générations, la culpabilité et la honte des camps de concentration, les Allemands ne se sont jamais plaints devant les étrangers, que ces derniers soient des voisins européens ou des peuples venus de pays plus éloignés.
À part le film La Vie des autres, sorti en 2006 et qui a remporté divers prix, dont l’oscar du meilleur long métrage étranger, la littérature et d’autres formes d’arts destinés aux étrangers, c’est-à-dire traduits, n’évoquent pas le quotidien – l’endurance et la souffrance – des Allemands après la guerre.
Il semble que la jeune génération allemande, celle qui était âgée de quelques années à la chute du mur, veut changer les choses. Cette génération, qui a grandi dans une Allemagne réunifiée, ne souffre plus des séquelles de la Seconde Guerre mondiale et ne se sent pas coupable des atrocités commises sous le IIIe Reich.
C’est cette génération qui traduira peut-être des livres sur le quotidien allemand après la Seconde Guerre mondiale et qui rapportera ainsi, haut et fort, la version de ceux qui ont perdu la guerre.
Peut-être ainsi d’autres peuples ayant vécu des guerres et se trouvant devant l’impossible tâche de se reconstruire pourraient apprendre, ne serait-ce qu’un peu, de l’expérience allemande...
 

 

Pat. K.

Les francophones que nous sommes ont appris bien de choses à l’école. Des années plus tard, on se souvient encore vaguement des cours d’histoire. Certaines notions se sont bien incrustées : l’Anschluss rattachant l’Autriche à l’Allemagne nazie, l’annexion de la Pologne, l’État français de Vichy, l’appel du général de Gaulle depuis Londres, le débarquement des...