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Nos Lecteurs ont la Parole

Mort d’un juste

Par Dr Maria BASSIL
Il est décidément des morts beaucoup plus insoutenables et intolérables que d’autres. Celle survenue en ce funeste 19 octobre, par sa symbolique, nous fait atteindre des sommets himalayens de révolte et de dégoût.
Wissam el-Hassan, un homme de l’ombre dont beaucoup ne connaissaient même pas le visage, travaillait inlassablement pour préserver l’essence même de notre vie, la priorité absolue pour une existence digne : notre sécurité.
Il a veillé jalousement et farouchement sur le bien-être de chacun d’entre nous. Cet homme modeste et secret qui glanait les succès sur le plan professionnel et national sans vouloir pour autant se frotter à la lumière n’a pu, comble du destin, assurer sa propre sécurité. L’énormité de sa tâche et sa dangerosité ne l’ont jamais fait reculer mais contre toute attente, les forces du mal ont encore une fois fini par triompher du bien.
Il a payé de sa vie le fait d’avoir déjoué les différents complots odieux et machiavéliques ourdis contre son pays.
En un mot, Wissam el-Hassan a été lâchement assassiné car il fut simplement... efficace. Terriblement efficace. Il a été assassiné car il représentait une menace tenace et un cauchemar permanent pour nos ennemis. Il faisait en effet partie d’une race de fonctionnaires en voie de disparition : intègre, loyal, courageux et surtout furieusement libanais, ni chiite, ni chrétien, ni sunnite, mais Libanais tout simplement.
C’est écœurant de reconnaître qu’il n’a pas été assassiné pour son appartenance communautaire, pour ses idées politiques, une quelconque implication dans des dérives mafieuses ou autres magouilles financières. Il l’a été car il représentait un rempart national contre le terrorisme d’État. Ce régime assassin qui a juré notre perte depuis 30 ans et qui n’a eu de cesse depuis, pour parfaire son travail de sape, que de nous voler, oui voler, les meilleurs d’entre nous : les plus passionnés, les plus entiers, les plus courageux, les plus idéalistes, les plus héroïques, les plus charismatiques et les plus intransigeants sur les principes fondamentaux de l’État de droit et ses valeurs. Où et chez qui peut-on retrouver de sitôt la verve et le verbe haut d’un Gebran Tueni, le génial cerveau informatique et le dévouement d’un Wissam Eid, la fougue d’un Pierre Gemayel ou la pensée et la vision unique de Samir Kassir ?
Wissam el-Hassan n’est en fait que le dernier (jusqu’à quand ?) de ces héros qui font honneur à notre pays et qui très souvent définissent son histoire. Ces hommes, les meilleurs d’entre nous, n’étaient pas prédisposés à être des martyrs. Ils n’étaient pas formés pour tomber, comme on dit, au champ d’honneur. Ils l’ont fait avec leurs moyens les plus nobles : leur plume, leur savoir et leur intelligence, leur dévouement, leur amour et leur foi en leur patrie. Ils l’ont fait sans aucune contrepartie, sans réfléchir et sans calculs mesquins pour d’éventuels bénéfices collatéraux et personnels. Ils l’ont fait pour qu’on puisse rester dans cette sublime et unique terre d’Orient et témoigner. Il est de notre devoir à tous d’être à la hauteur de ces destins hors du commun, de ces vies fauchées en pleine force de l’âge. Il ne faut pas qu’il y ait prescription sur les sacrifices et la mémoire de ces héros...
Être à la hauteur, en ces temps (à nouveau) fondateurs, c’est rester vigilants, mobilisés à fond, en alerte maximale et permanente. C’est rester unis quelles que soient les circonstances et à tous les niveaux, l’esprit critique, le verbe haut et acerbe mais et surtout unis... toujours unis. Formidablement unis. L’heure n’est pas aux désillusions ni aux regrets, remords et autres reproches. Ceux-là viendront après, lorsque la bête et ses assassins seront hors d’état de nuire.
Être à la hauteur, c’est surtout ne pas trahir le rêve de ces justes, tombés pour nous, et veiller à saluer bien bas leur mémoire.
Il est décidément des morts beaucoup plus insoutenables et intolérables que d’autres. Celle survenue en ce funeste 19 octobre, par sa symbolique, nous fait atteindre des sommets himalayens de révolte et de dégoût. Wissam el-Hassan, un homme de l’ombre dont beaucoup ne connaissaient même pas le visage, travaillait inlassablement pour préserver l’essence même de notre vie,...

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