Après avoir « juré comme avocats d’exercer nos fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité » et après avoir affronté au fil des années de féroces tentatives visant à bafouer notre serment, à écraser notre « dignité », manipuler notre « conscience », étrangler notre « indépendance », mépriser notre « probité » et notre « humanité, » sommes-nous toujours déterminés à défendre et à protéger notre serment ? Non pas par crainte de sanctions disciplinaires, mais par conviction intime que vivre dans un monde civilisé et une société ayant des valeurs n’est pas devenu chimérique. Des valeurs éthiques et déontologiques, humaines et universelles en tant que rempart ultime face aux dérives planétaires.
Face à ceux qui, seuls ou en bandes organisées, commettent crimes et délits, violent les êtres et les textes et échappent systématiquement à la justice en instaurant la jungle du plus fort comme modèle social. Face à ceux qui, sous le joug de la tyrannie, réduisent leurs peuples au dénuement extrême en les maintenant préoccupés par la seule nécessité de se nourrir pour les rendre inaptes à dénoncer leurs exactions et leurs règnes illimités. Face à ceux qui sans le moindre scrupule dilapident, détournent et séquestrent des dépôts bancaires, fabriquent un vocabulaire insolite, imposent des classifications nébuleuses et des méthodes de blocage inédites, machiavéliques, discriminatoires brisant des vies et plongeant des familles entières dans la précarité et la tourmente, et qui dans la foulée matent toute protestation légitime, établissent des combines et un système occulte parallèle, ignorent leur devoir de restitution des dépôts et comptent sur une décharge de responsabilité malgré leurs malversations. Face à ceux qui, au nom de mentalités rétrogrades, brutalisent les femmes, juste parce qu’elles n’ont pas eu d’autre choix que de naître de sexe féminin, et s’acharnent à les déposséder de leurs droits les plus élémentaires. Face à ceux qui perpétuent les clivages internes et les inégalités sociales, à ceux qui déstabilisent l’ordre mondial et à ceux qui condamnent leurs populations à rester impliquées dans des conflits armés sans fin, comme si le passage sur terre n’était pas suffisamment compliqué et éphémère pour s’obstiner à le rendre plus amer et à l’abréger en allant sans garantie de retour combattre vainement. Face à ceux qui, usant de l’autorité de leur statut, réussissent malgré leurs abus à être portés aux nues par des peuples irresponsables ou désabusés, inconscients ou lâches, et se targuent ensuite d’être protégés avec leurs acolytes par une prérogative octroyée « de jure » appelée immunité édictée pourtant non pas pour être assimilée à l’impunité, mais pour garantir le libre exercice de fonctions officielles sans risque de pressions et d’ingérences.
En présence de tels criminels, despotes, hors-la-loi et délinquants en col blanc qui ne font que se reproduire clonés par milliers, et à l’heure où les tribunaux semblent avoir été éclipsés par des plateformes virtuelles de lynchages sociaux guidées par des meneurs avides de scoops creux, animées par des foules déchaînées à pensée unique, il est temps, par devoir international, de rebattre les cartes. Il est temps de braver simultanément vanité, servilité, cupidité, passivité, désespérance, obscurantisme et intimidations. Il est temps de déclencher un déclic planétaire et de synchroniser des actions collectives à l’échelle mondiale, affranchies de toute allégeance, pilotées avec audace, vigueur et constance, capables une fois pour toutes de rectifier le tir. Pour qu’enfin les auteurs de tous ces actes ignobles soient arrêtés et jugés, condamnés et dépouillés de leur « dignité », de leurs titres, grades et qualités, puis mis définitivement hors d’état de nuire. Et pour qu’au terme de la présente plaidoirie, soient consolidées à tout jamais, au nom de notre serment, « la dignité et l’indépendance » des esprits et des nations libres, avec « conscience, probité et humanité ».
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