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Nos Lecteurs ont la Parole

I - Situation et destin du Grand Liban

Par Salim F. DAHDAH
Le 1er septembre 1920, il y a quatre-vingt-douze ans, le Grand Liban était proclamé par le général Henri Joseph Eugène Gouraud, représentant l’autorité mandataire française sur la Syrie. Son tracé a consisté à créer, sur le territoire de l’Empire ottoman déchu, une frontière séparant un État syrien d’un autre libanais, annexant à l’ancienne moutassarafiya (circonscription autogérée dans l’Empire ottoman) du Mont-Liban, Beyrouth, les régions de Tripoli, du Akkar, du Hermel et de la Békaa, ainsi que de Rachaya, Hasbaya et le Liban-Sud. Cette géographie avait alors été souhaitée par le patriarcat maronite, soucieux de la « viabilité » du futur État libanais, qui ne pouvait être assurée sans les ressources agricoles des territoires ainsi rattachés. Mais dès lors, tous les régimes syriens qui se sont succédé, y compris le dernier d’entre eux, l’État baasiste, ont souvent considéré ces annexions comme des amputations de la Syrie historique.
À cette date anniversaire, l’Orient, berceau des civilisations et des religions, vit dans un vacarme assourdissant, une tempête violente souffle et bouscule tout sur son passage, les peuples de cette région du monde sont abasourdis par la rapidité et la brutalité des évènements qui les secouent ; ils fuient et se réfugient loin des foyers de violences, en attendant la fin de ses tornades, après quoi certains reviendront à leurs « bleds » et les autres s’implanteront ailleurs, emportant avec eux leurs civilisations, leurs richesses et leurs misères.
Mais depuis 1920, trois nouvelles donnes sont venues en effet bouleverser toutes les réalités géopolitiques de l’Orient, à savoir :
1- La création de l’État d’Israël et ses conséquences dramatiques sur la stabilité du monde, illustrées par la guerre interminable israélo-arabe.
2 - L’apparition dans les sous-sols de certains États de la région de très importantes ressources énergétiques, vite transformées en sujets de tiraillements entre les grands décideurs internationaux et en moyens de pression incontournables pour imposer leurs pouvoirs, leurs desiderata et leurs objectifs régionaux.
3 - Une démographie qui sort de ses limites géographiques actuelles et s’implante de plus en plus en Occident à la recherche d’une meilleure qualité de vie et de plus de stabilité.
Malgré tous ses développements et son ouverture au monde, l’évolution de cette partie du globe n’a pas beaucoup progressé depuis un siècle. L’Occident est paradoxalement un des principaux facteurs de son ralentissement. Au lieu de chercher à résoudre les déséquilibres structurels qui le minent en profitant de l’énorme potentiel humain, culturel et énergétique qu’il offre, l’Occident l’a plutôt utilisé comme une soupape de sécurité, il s’est limité en gros à y exploiter ses espaces et ses ressources pour satisfaire ses propres intérêts économiques et stratégiques ainsi que ceux de ses alliés, et ce, au travers d’un processus alternatif et souvent violent, de démembrement et de remembrement régional.
Après l’effondrement de l’URSS, la consécration du pouvoir uninominal des USA sur le monde, l’introduction en force de l’ère de la globalisation (une des conséquences de ce nouveau pouvoir) et la mainmise sur les sources énergétiques régionales et leurs voies de distribution, l’Orient a vécu plus embrigadé que jamais, car les États qui le composent doivent accepter les cadres qui leur sont imposés sans quoi ils risqueraient de payer le prix de leurs dérapages. Nous ne citerons pour preuves que le processus vécu par le monde arabe, où coups d’État, guerres, déstabilisations et transferts de populations permanents ont été le pain quotidien de ses peuples, chaque fois qu’il s’est agi de défendre et satisfaire les intérêts géostratégiques des principaux décideurs internationaux et régionaux.
Mais est-ce que la globalisation et la libre circulation des hommes et des biens ne sont-elles pas devenues un handicap à la perduration de ce type de rapports entre l’Orient et l’Occident ? Le temps n’est-il pas venu pour ce dernier d’anticiper les conséquences futures d’une démographie galopante en provenance des pays d’Orient, qui risque, en se propageant chez lui, de bouleverser probablement ses équations socio-économiques? Le XXIe siècle y marquera certainement des changements de comportements dus à l’évolution des sociétés dans le monde et plus spécialement de celles d’Orient, du fait des nouveaux moyens de communication et de réaction dont ils disposent depuis l’apparition des réseaux sociaux et de leur influence grandissante dans la vie des individus et des citoyens.
(À suivre)
Le 1er septembre 1920, il y a quatre-vingt-douze ans, le Grand Liban était proclamé par le général Henri Joseph Eugène Gouraud, représentant l’autorité mandataire française sur la Syrie. Son tracé a consisté à créer, sur le territoire de l’Empire ottoman déchu, une frontière séparant un État syrien d’un autre libanais, annexant à l’ancienne moutassarafiya...
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