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L’économie libanaise et le régime confessionnel

Il paraît que l’économie libanaise étouffe sous le régime confessionnel (OLJ, 24/08/2012, p.8). Tiens donc ! Et comment se fait-il alors que le Liban ait survécu si brillamment pour avoir eu droit au label de « Suisse du Moyen-Orient » – il faut bien le reconnaître – depuis Béchara el-Khoury (et même avant) jusqu’à Élias Sarkis, avec une monnaie nationale inébranlable, un pouvoir d’achat 500 fois plus élevé, une dette publique carrément nulle, une économie florissante et en plein essor, une inflation sous contrôle et un salaire moyen en rapport avec le coût de la vie ? En comparaison avec le temps présent et l’époque de l’occupation ottomane, le chômage était alors à ses plus bas niveaux, le petit commerce était roi, l’émigration insignifiante et la vente de biens immobiliers à des étrangers n’avait rien de massif ou de phénoménal. Et pourtant, pendant toutes ces longues décennies, nous étions bel et bien sous un régime confessionnel.
Non ! Les personnes que ce système horripile voudront bien nous obliger en consentant à mettre un bémol à leur son de cloche, car la question mérite d’aller un peu plus en profondeur dans la réflexion sur la relation de cause à effet. Il leur faudra tout d’abord et indéniablement apprendre à accepter le prochain tel qu’il est et tout le reste suivra, en particulier le fait de réaliser l’essence du pacte interconfessionnel dans le but précité. Car le rejet de ce pacte, sous tous les prétextes en vogue actuellement, laisse entrevoir le filigrane d’une incapacité – ou peut-être d’un refus, dans certains cas extrêmes – de comprendre autrui sur ce à quoi il ne peut renoncer.
Ce n’est pas du régime confessionnel que souffre l’économie libanaise, mais de la période trouble contre laquelle le pays se débat depuis 1975 jusqu’à présent avec de plus en plus de variantes qui viennent s’ajouter au fil des ans. Loin de réduire ces causes à néant, l’abolition du confessionnalisme ne fera que compliquer les choses et alourdir la note car, comme nous venons de le démontrer en préambule, ce système n’est pas responsable des dégâts que d’aucuns s’entêtent à vouloir lui attribuer.
Partout dans le monde, le redressement économique a toujours été très difficile dans les périodes d’après-guerre. Et que dire des cas où la situation n’est toujours pas décantée ? Faire donc campagne contre le régime confessionnel en l’accusant de tous les maux devient alors comparable à une grossière erreur de diagnostic qui risquerait d’être fatale pour le patient. Du temps de Louis XIV, on soignait les malades en leur faisant subir une saignée, pensant très consciencieusement – oserait-on en douter ? – qu’elle était un remède à large spectre, idéal pour une panoplie de pathologies ; mais les patients ne s’en remettaient pas pour autant. Quelque part, Molière avait sans doute raison de ne pas trop faire confiance au corps médical de l’époque. À voir les médecins réunis autour de lui, défendant leur science avec conviction et dispensant généreusement leurs soins avec détermination et assiduité, le pauvre souffrant avait déjà un pied dans la tombe malgré toutes les forces qu’il lui restait.
À l’instar de ces braves médecins d’autrefois, certes dévoués, voilà que « les Hippocrate » de service trouvent aujourd’hui que le régime confessionnel est responsable de la guerre de 1975, qu’il a anéanti l’économie du pays, et que patati et que patata ; comme s’il n’y avait jamais eu de conflit un peu comparable ailleurs, sous régime non confessionnel, tel qu’en Jordanie en 1970 par exemple ; et comme si l’économie libanaise était la seule à être en difficulté actuellement. Pauvre Liban ! Et dire qu’il doit s’efforcer lui-même, malgré ses multiples douleurs, de convaincre ces grands analystes, férus d’économie politique, que ce ne sont pas les équilibres garantissant la communauté de vie d’une mosaïque religieuse – qui font d’ailleurs partie intégrante des causes déterminantes du pacte national et qui ne sont que le strict reflet de l’esprit de la Constitution – qui lui ont causé tant de tort et qu’en revanche, la suppression de ces équilibres lui feront encore plus de mal sans rien lui apporter de positif pour sa santé économique.
Il paraît que l’économie libanaise étouffe sous le régime confessionnel (OLJ, 24/08/2012, p.8). Tiens donc ! Et comment se fait-il alors que le Liban ait survécu si brillamment pour avoir eu droit au label de « Suisse du Moyen-Orient » – il faut bien le reconnaître – depuis Béchara el-Khoury (et même avant) jusqu’à Élias Sarkis, avec une monnaie nationale...

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