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Cinema- - Au Métropolis Empire Sofil

Entre nostalgie et réalité

Deux films à l’approche différente abordent pourtant le même thème. Celui de la réalisatrice Zeina Sfeir qui croque le visage de Beyrouth à travers le profil de son père, coiffeur de profession, ainsi que l’œuvre expérimentale de Roy Badran qui évoque à sa manière la nostalgie d’un temps passé.

Zeina Sfeir, une réalisatrice qui filme le réel.

Zeina Sfeir présente, dans le cadre de « Scrapbook », son film « Beirut 3al Mouss » ou « All about my father ». Un documentaire qui enrichit le travail de cette cinéaste bien ancrée dans la vie réelle.
« Beirut 3al mouss » : Parlez-nous un peu du film et du choix du titre.
Beirut 3al Mouss est un film qui rend hommage à mon père, un des meilleurs coiffeurs de sa génération ayant travaillé dans les plus grands hôtels de Beyrouth. À travers cette histoire, je fais un clin d’œil également à l’histoire de Beyrouth avant et durant la guerre. Pour cela, ce film porte le titre Beirut 3al mouss, un titre qui a été choisi par Edmond Haddad, un grand ami auquel je suis infiniment reconnaissante. Il a réussi à créer un jeu de miroirs où l’histoire de mon père reflète celle de Beyrouth.

Pourquoi votre père ? Et comment avez-vous pu, à travers une personne – qui a été dans l’ombre durant toutes ces années –, retracer l’histoire de Beyrouth ?
Bien qu’il ne fût pas célèbre, mon père était un homme qui a réussi à se tailler une place au soleil. C’est pourquoi, admirative de son parcours, j’ai voulu lui dédier ce film. D’autre part, papa est un personnage en soi, un narrateur qui a côtoyé, durant sa vie professionnelle, toutes les grandes figures de la politique libanaises arabes et c’est a partir de son vécu que je retrace l’histoire de Beyrouth.

Quid du tournage et des difficultés à filmer votre père ?
Comme mon père ne pouvait pas supporter une ambiance d’équipe, je me suis servie de ma petite caméra et de mon micro cravate (offert par mon frère) pour filmer. Le tournage s’est étalé sur une période de cinq ans où nous étions souvent en tête à tête. J’avoue que c’était parfois fatiguant parce qu’il ne pouvait pas supporter plus de deux heures de tournage par jour. Certains moments spontanés et improvisés ont été bien exploités grâce à Karine Doumit, ma monteuse, qui a su créer une ambiance et donner un rythme spécifique au film.

Quels sont vos choix de plans et de cadrage ? Et qu’en est il de l’espace ?
J’ai choisi mes plans et mes cadrages en fonction de ma perception de mon « home » depuis mon enfance. En contre-plongée et à travers les portes. Et comme je suis une personne qui voue un attachement aux lieux, j’ai tourné le film dans mon appartement, dans l’espace de mon père qui ne sort plus depuis quelques années.

Que représente la fin du film pour vous ?
Une fin qui nous ramène au début du film, mais avec beaucoup plus de désespoir puisqu’ elle évoque la fin du travail de mon père et de sa vie professionnelle. J’ai réalisé dix documentaires, mais c’est la première fois que je ressens une certaine angoisse.

Êtes vous tentée par une fiction ?
Tentée oui, mais prête, je ne le crois pas. Réaliser des documentaires me fait découvrir la vie, chose qui n’est pas évidente dans une fiction. Cette dernière fait de vous une technicienne et une professionnelle alors que le documentaire vous fait apprécier l’aspect humain des choses.

Quel sont vos projets pour l’avenir ?
En ce moment je prépare un documentaire ; une commande sur les fresques du Liban. Je suis presque à la phase finale.

« A Play Entitled Sehnsucht »,
de Badran Roy Badran

Avec Vartan Meguerdichian, Adoni Maalouf et Cyril Bassil.

Produit par Céline Abiad et Beiroots Productions, ce film, réalisé par Badran Roy Badran (et qui a nécessité cinq ans de travail), va au-delà d’une simple œuvre filmique. Il s’agit d’une expérience cinématographique intéressante et d’une démarche artistique qui puise son inspiration dans le genre noir et fantastique.
Sehnsucht signifie, en allemand, le « désir ardent, souvent douloureux » de manque, mais également une « nostalgie » quand les sentiments exprimés sont tournés vers le passé.
Né à Beyrouth durant la guerre civile et ayant vécu dans cette ville de blessures et d’angoisses, c’est à l’âge de 23 ans que Roy Badran commence l’écriture de ce film, une des premières œuvres expérimentales du Moyen-Orient. « Il reproduit le mal dont souffre le Liban actuel, un sentiment de destruction à travers le personnage de cet astronome décédé dans un hôpital psychiatrique en 2008 », dit le cinéaste. L’astronome a-t-il oui ou non existé ? On se le demande, mais on dit que Badran aurait observé, durant deux ans, un astronome enfermé dans un asile.
L’auteur-réalisateur a essayé de transposer à l’écran ces sentiments de traumatisme, d’isolement ainsi que cette nostalgie d’un passé idéal. Il les traduit à travers des images concrètes dévoilant les situations vécues par cet astronome libanais convaincu d’avoir vu une planète exploser...
S’inspirant de l’expressionnisme allemand, Badran revisite les films qui ont fait l’âge d’or de cette période (Nosferatu de Murnau) et plonge le spectateur dans un univers quasi irréel et intérieur.
Les œuvres expressionnistes mettent souvent en scène des symboles. Il s’oppose ainsi à l’impressionnisme et ne s’attache pas à représenter l’objectivité, mais plutôt la projection d’une subjectivité, d’une réalité distordue.
Les effets visuels, le clair-obscur, l’emphase romantique, la fascination pour la mort, la prédilection pour ce qu’on appelle « unheimlich » (étrange, inquiétant) ainsi que la technique d’une théâtralité sont omniprésents dans le film. L’utilisation des ombres a pour fonction d’accentuer un trait de caractère ou de dévoiler la véritable nature d’un personnage.
Si la forme du film est narrative, c’est grâce au recours à l’hypnose que le réalisateur nous fait pénétrer dans ce monde quasi irréel mais qui demeure néanmoins dans la réalité. La musique et le recours à des langues diverses (allemand, arabe ou anglais) donnent à cette œuvre une portée universelle.
Zeina Sfeir présente, dans le cadre de « Scrapbook », son film « Beirut 3al Mouss » ou « All about my father ». Un documentaire qui enrichit le travail de cette cinéaste bien ancrée dans la vie réelle.« Beirut 3al mouss » : Parlez-nous un peu du film et du choix du titre.Beirut 3al Mouss est un film qui rend hommage à mon père, un des meilleurs coiffeurs de sa...
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