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Liban

Sleiman : Les relations libano-syriennes sont régies par les accords de 1951...

Photo souvenir pour la délégation libanaise, lors du tour à l’opéra. Photo Dalati et Nohra

Pour la dernière journée à Sydney du président du Liban et de la délégation qui l’accompagne, le soleil s’est levé sur la ville, étendant ses rayons sur l’opéra en forme de gigantesque papillon, et sur le port, mais aussi sur un Michel Sleiman détendu ayant le sentiment que le gros de sa mission a été accompli avec succès.
Après la rencontre élargie de la veille avec la communauté libanaise au stade olympique et la pause confidences qu’il s’est accordée avec les journalistes à dîner, il a pris (un peu) le temps de voir les sites les plus importants de la ville. Accompagné de toute la délégation (sauf le ministre Ghazi Aridi, malade), il s’est donc promené sur le port écoutant les explications du guide spécial sur la construction du pont qui est l’un des hauts lieux de l’architecture moderne. Il a ensuite visité le bâtiment de l’opéra, plus impressionnant encore de près, conçu de façon à être vu de la même façon quel que soit l’angle où l’on se place. C’est un monument célèbre dans le monde entier où chaque année, d’ailleurs, les Australiens commencent par célébrer l’an nouveau avant le reste de la planète. Cet opéra n’a pas de fondations, étant construit sur les échafaudages du pont, un lieu véritablement étonnant donc, qui a ouvert ses portes pour le président libanais, lui permettant d’assister aux répétitions d’un ballet moderne dans une salle et à celles d’un concert de l’orchestre philarmonique de Sydney dans une autre. Ces instants-là étaient magiques, loin de la politique et de ses soucis, un peu dans la prolongation de la conversation franche et détendue de la veille avec les journalistes, lorsque Michel Sleiman avait notamment raconté comment l’aîné de ses petits-fils s’étant plaint que son grand-père ne vient jamais le chercher à l’école, il avait choisi le dernier jour de classe pour cela. Mais en le voyant arriver, l’aîné était gêné devant ses camarades alors que le plus jeune s’était précipité vers lui. Le président avait encore dit qu’il aime faire du vélo, « sans être Janie Longo » et qu’il s’intéresse beaucoup à l’avenir du monde ainsi qu’aux développements technologiques. Et comme la politique n’est jamais bien loin, il avait lancé une phrase qui fera sans doute l’objet de nombreuses interprétations : « Avoir un militaire à la tête de l’État va désormais à l’encontre de l’évolution du monde, assoiffé de démocratie. Mais, au Liban, les militaires ont montré qu’ils sont plus démocratiques que les politiciens, qui, eux, se comportent comme de vrais militaires ». Le président est ainsi, il lance des « petites phrases » qui n’ont l’air de rien, mais qui marquent les esprits. Il a aussi, en passant, mentionné ses contacts réguliers avec le président Bachar el-Assad, révélant que lorsque les diplomates occidentaux l’ont sondé sur une éventuelle participation du Liban aux conférences des amis de la Syrie, il avait répondu : « De quels amis s’agit-il ? Nous autres, nous sommes les amis de tous les Syriens... ». À ceux qui lui demandaient s’il ne fait pas preuve d’un excès d’optimisme en assurant que la stabilité du Liban ne sera pas menacée, le chef de l’État a déclaré qu’il existe deux sortes de médecins, le pessimiste qui dit au malade qu’il va mourir et qu’il ne peut pas le traiter et l’optimiste qui lui dit qu’il va le traiter et qu’il peut guérir. Ce dernier est gagnant sur tous les tableaux : si le malade guérit, on dira qu’il est excellent, et si le malade succombe, on dira qu’il a fait de son mieux, alors que dans le cas du pessimiste si le malade s’en sort on dira qu’il est un incapable, et s’il meurt, que telle est la volonté de Dieu... Une logique implacable en somme, à laquelle il faut ajouter une bonne dose de conviction forgée grâce à sa lecture des développements politiques.
Recevant le matin les journalistes australiens d’origine libanaise, il avait aussi défendu la politique du maintien à l’écart des événements de Syrie, ajoutant qu’en le faisant, le Liban se place lui-même à l’abri des incendies qui embrasent la région. Il a encore expliqué que le Liban a refusé aussi de participer à une réunion en faveur du régime syrien à Téhéran. Michel Sleiman a rappelé que la neutralité positive était une revendication dans le passé. Qu’est-ce qui a donc changé pour qu’elle fasse désormais l’objet de critiques ? Au sujet du rôle de l’ambassade de Syrie au Liban, il a rappelé que cela faisait 60 ans que les Libanais la réclamaient. S’il y a une évolution démocratique en Syrie, elle aura un rôle plus important. Le chef de l’État a aussi souligné le fait que les relations libano-syriennes sont régies par les accords de 1951, non par le traité de coopération de 1991. Il a confirmé en outre avoir introduit avec le président de la Chambre un article relatif au vote des émigrés dans le projet de la prochaine loi électorale, en espérant fortement que ce sera possible en 2013. Au sujet des armes du Hezbollah, Michel Sleiman a estimé qu’il fallait aborder la question sous son angle positif, tant qu’il y a une occupation israélienne d’une partie du territoire.
Interrogé sur l’attitude du Liban si Israël attaquait l’Iran, le président Sleiman a affirmé que le Liban condamnera certainement l’agression et qu’il se tiendra politiquement aux côtés de l’Iran. Mais sur le point de savoir s’il a intérêt à intervenir militairement et s’il en a les capacités, il a ajouté qu’il faudra étudier la question le moment venu. Michel Sleiman a encore affirmé qu’il faut lutter contre la corruption et que c’est presque « un péché de laisser le Liban pendant 5 ans sans loi sur le budget ». Il a exprimé son accord pour la formation d’une commission parlementaire, voire judiciaire pour enquêter sur les fonds dilapidés, « ceux dont parlent le général Michel Aoun et les autres », a-t-il précisé. Le chef de l’État a aussi évoqué la sécurité alimentaire et la nécessité de châtier ceux qui jouent avec la santé des Libanais. Il a émis le souhait que l’on ne revienne pas, sur le plan électoral, à la loi de 1960 et il a enfin exposé les projets de développements dans le Nord, assurant qu’il tient à rouvrir l’aéroport de Kleyate, ajoutant qu’il rejette « totalement les propos irresponsables » sur son éventuelle utilisation comme base pour l’opposition syrienne.
Il s’est aussi expliqué sur la position centriste qui signifie, selon lui, l’indépendance et l’autonomie dans la décision et les choix. Mais cela ne signifie pas que l’on se tient au milieu entre la corruption et la transparence, par exemple... Selon lui, le centriste est libre. Mais il a ajouté que la formation d’un bloc parlementaire centriste n’a pas encore réussi car la loi électorale actuelle ne le permet pas. Le chef de l’État a aussi fait l’éloge des émigrés, surtout les jeunes, déclarant qu’il est fier d’avoir fait ce voyage dont il retiendra essentiellement la présence des jeunes. « Nous sommes forts, a-t-il dit, mais nous devons organiser notre force. »
Michel Sleiman et l’ensemble de la délégation se sont ensuite rendus au couvent Saint-Charbel où ils ont été reçus par des enfants entonnant l’hymne national, fiers de dire qu’ils ont appris l’arabe à l’une des dix écoles libanaises de Sydney. L’évêque maronite de Sydney et l’abbé Tannous Nehmé, venu spécialement de Beyrouth pour l’occasion, ont aussi accueilli officiellement la délégation libanaise, avant de célébrer un service religieux spécial en l’honneur du chef de l’État. Chacun d’eux a prononcé un discours dans lequel il a insisté sur l’importance de préserver la formule libanaise, tout en rendant hommage au rôle du chef de l’État dans ce cadre. L’église a beau ne pas être grande, elle était pleine à craquer, de jeunes, de vieux, d’enfants qui n’en croyaient pas leurs yeux de voir le président du Liban en chair et en os. Notre consœur de la MTV, Denise Rahmé, était aussi très sollicitée, les Libanais d’Australie ne recevant pas la chaîne MTV sur place. Les gens se poussaient du coude pour voir, tenter de reconnaître et commenter...
Situé dans un quartier dit libanais, dans une zone résidentielle, le couvent Saint-Charbel attire les émigrés libanais de toutes les confessions. D’ailleurs, à quelques mètres, un supermarché Hamzé offre tous les produits libanais. Son propriétaire originaire du Akkar fait travailler sa femme et son gendre égyptien, doté d’une barbe longue dans le style islamiste. En même temps, il surveille sa seconde famille restée au Liban sur Internet. Ancien de l’armée, dans laquelle il a passé huit ans, il en est parti dans des circonstances peu claires, sur lesquelles il se veut discret, mais il n’a pu s’empêcher d’accrocher sur son supermarché une banderole de bienvenue au général Achraf Rifi... Comme quoi souvent on a beau être loin du pays, on en reproduit les mêmes schémas et les distances n’atténuent ni les allégeances ni les rancœurs. Une question taraudait pourtant les journalistes : quel est le secret de l’attachement de ces émigrés au Liban, alors qu’ils affirment pour la plupart qu’ils n’y reviendront probablement pas, sauf pour de courtes visites ? Interrogé, le chef de l’État a répondu qu’il ne se faisait pas trop d’illusions sur la volonté des émigrés surtout en Australie, où ils sont bien intégrés et où il n’y a pas de crise économique, de rentrer au Liban. Il ne le leur demande d’ailleurs pas. Mais il est convaincu qu’ils doivent quand même représenter une force pour le pays d’origine. Larmes, cris, engueulades, rires et applaudissements, l’église du couvent Saint-Charbel n’a sans doute jamais connu une telle cohue. Le désordre libanais en Australie, c’est donc possible et il y a de quoi donner le tournis au coordinateur de la sécurité et à ses adjoints...
Pour la dernière journée à Sydney du président du Liban et de la délégation qui l’accompagne, le soleil s’est levé sur la ville, étendant ses rayons sur l’opéra en forme de gigantesque papillon, et sur le port, mais aussi sur un Michel Sleiman détendu ayant le sentiment que le gros de sa mission a été accompli avec succès.Après la rencontre élargie de la veille avec la...
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Au couvent Saint Charbel, à Sydney, les Libanais sont là, ébahis par la "visite historique" en Australie du président du Liban. "Larmes, cris, engueulades, rires et applaudissements, l'église n'a sans doute jamais connu une telle cohue". C'est "le désordre libanais", émigré lui aussi. C'est le Liban et c'est sympathique. Par ailleurs le président du Liban parle de la "neutralité positive" du Liban officiel par rapport à la Syrie (?) Il a à ses côtés un ministre des Affaires étrangères qui est plus ministre des Affaires étrangères de Syrie que le ministre syrien du même portefeuille, Walid el-Moallem; ça aussi c'est le Liban et c'est beaucoup moins sympathique, car ça donne au monde une idée que ce pays ne sera jamais un pays sérieux.

Halim Abou Chacra

03 h 10, le 20 avril 2012

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Commentaires (2)

  • Au couvent Saint Charbel, à Sydney, les Libanais sont là, ébahis par la "visite historique" en Australie du président du Liban. "Larmes, cris, engueulades, rires et applaudissements, l'église n'a sans doute jamais connu une telle cohue". C'est "le désordre libanais", émigré lui aussi. C'est le Liban et c'est sympathique. Par ailleurs le président du Liban parle de la "neutralité positive" du Liban officiel par rapport à la Syrie (?) Il a à ses côtés un ministre des Affaires étrangères qui est plus ministre des Affaires étrangères de Syrie que le ministre syrien du même portefeuille, Walid el-Moallem; ça aussi c'est le Liban et c'est beaucoup moins sympathique, car ça donne au monde une idée que ce pays ne sera jamais un pays sérieux.

    Halim Abou Chacra

    03 h 10, le 20 avril 2012

  • Ainsi donc : "Le chef de l’État a aussi souligné le fait que les relations libano-syriennes sont régies par les accords de 1951, non par le traité de coopération de 1991" ! ! ! Tout ça pour ça ? ! Que se passe-t-il ? Que devient donc la "Wéhhdatt el Massâr wal Massîr" ? H1N1 ? Wâïynak "ya zalamé" ? Vous les laissez faire ? Ça ne va pas, non ? Et "Sœur Syrie" ? Vous la lâchez ? N’iiiimporte quoi ! Yâ hassérté ëélaïké "ya moukâwamé" ! Et qu’adviendra-t-il de "Nassré, le plénipotentiaire PN SS" ? Manquera-t-il à quelqu’un au fond ?,… celui-là….!

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    22 h 42, le 19 avril 2012

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