Lettre à maman

Maman, je sais que tu souffres. Et je sais aussi que, malgré tes douleurs, tu ne rates jamais la lecture de ton quotidien favori, L’Orient-Le Jour.
C’est sur ton lit d’hôpital, lorsque tu ouvriras les yeux, que tu me liras ce matin.
C’est aujourd’hui que j’aimerai te dire à haute voix : Je t’aime et « je suis là encore, pour un peu de temps vivante sur la même terre que toi » (C. Bobin).
Je serai heureuse, à mon arrivée chez toi, de te retrouver et de te serrer dans mes bras.Toi qui m’as fait cadeau de la vie, cette vie que tu aimes tant.
Et tu fais fi de la maladie et tu lui tournes le dos, et, malgré tout, tu continues à avancer. Rien ne t’arrête.
Ton royaume c’est la vie. Tu refuses de te laisser faire.
Ce matin, tu as désobéi aux consignes (je sais que tu n’aimes pas ce mot), et tu as pris la poudre d’escampette pour aller te faire belle, comme d’habitude, changer de coiffure et même faire des courses de dernière minute, acheter un escabeau qui te manquait à l’hôtel, sachant que tu serais admise dans l’après-midi même à l’hôpital, pour être opérée, encore une fois demain. C’est la quellième, au fait ? J’en ai perdu le compte.
Qu’il pleuve, qu’il vente, avec deux jambes, ou une seule tu fais des projets et tu t’interdis de baisser les bras.
Reggiani le chantait pour toi. Ton pays c’est la vie ; tu l’aimes tant, le temps qui reste.
Tu continues à rire, à boire, à croire, à créer de nouveaux projets tous les jours, à chanter, à aimer. À rire des montagnes de rire. Tu veux des histoires, des voyages.
Quand l’orchestre s’arrêtera, je t’aimerai encore ; quand le temps s’arrêtera, je t’aimerai encore, je ne sais pas où, je ne sais pas comment, mais je t’aimerai toujours.
Belle leçon de vie que tu me donnes là !

Myrna Najjar SERHAL