Dans le cadre du Forum arabe de l’investissement qui s’est clôturé hier, une conférence-débat a eu lieu avec le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, qui a expliqué au cours de son intervention les raisons pour lesquelles le Liban restait relativement épargné de la crise de la dette qui sévit en Europe. « La clé qui nous a évité de plonger dans les crises financières qui secouent le monde depuis 2008, c’est la nette séparation qui existe au Liban entre les banques commerciales et les banques d’investissement », a souligné à cet égard M. Salamé. Il s’est également attardé sur la structure du système financier libanais qui contrôle et restreint, entre autres, les opérations d’achat d’obligations, « ce qui limite considérablement les risques financiers », a ajouté Riad Salamé.
Une autre explication selon lui de la relative stabilité du Liban est que la crise qui sévit en Europe est intrinsèquement liée à l’euro et que le Liban dépend très peu de cette monnaie. « Le taux de dollarisation des dépôts dans le pays a atteint désormais 66 % dont 10 % seulement ne sont pas en dollars », a expliqué le gouverneur de la BDL.
Il a par ailleurs rappelé quelques chiffres témoignant de la bonne santé du secteur bancaire. « Aujourd’hui, 30 % des dépôts sont sous forme d’actifs liquides (...). En outre, les dépôts devraient augmenter de 7 à 10 % en 2011 », en dépit des tensions locales et régionales. Rappelons à ce sujet que ces dépôts avaient accusé une importante baisse au premier mois de l’année (-1,1 milliard de dollars), avant de repartir à la hausse au cours des mois suivants. « L’activité d’emprunt est également en hausse de 15 % en rythme annuel, ce qui témoigne encore une fois de la résistance du secteur bancaire libanais » aux différentes turbulences financières dans le monde, a ajouté M. Salamé.
Le gouverneur de la BDL a également évoqué l’importance des réserves en or et devises dans la protection du Liban face à la crise. Dans un entretien accordé il y a deux jours à l’agence Reuters, M. Salamé avait expliqué que la Banque centrale ne toucherait pas à ses réserves en or, et ce malgré une croissance de 3 % prévue fin 2011, largement inférieure aux 7 % de 2010. « Aujourd’hui, le pays possède des réserves en or avoisinant les 17 milliards de dollars, ce qui le place en deuxième position dans le monde arabe », a indiqué M. Salamé. Il a également rappelé que les réserves du pays en devises ont atteint quelque 33 milliards de dollars.
Comment faire face à la crise financière ?
« En dépit de ces bons indicateurs, le Liban n’est pas complètement à l’abri des effets de la crise à long terme, et pour y faire face, le Parlement a adopté une nouvelle loi qui régit les marchés financiers », a souligné M. Salamé. Outre le renforcement du mécanisme de contrôle, il est très important que cette loi soit rapidement appliquée « pour assurer au pays des rentrées de capitaux plus importantes et faire du Liban un centre d’attractivité financière ».
Un autre projet de loi favorisant le partenariat public-privé (PPP) devrait voir bientôt le jour, a en outre fait savoir M. Salamé. « La BDL soutient pleinement ce projet car elle considère qu’il est susceptible d’améliorer considérablement l’infrastructure libanaise. »
À la fin de son intervention, Riad Salamé s’est prêté à une série de questions/réponses avec le public, inquiet en grande partie des répercussions des révoltes arabes sur l’économie libanaise. À ce propos, le gouverneur de la Banque centrale a assuré que la baisse de la croissance cette année au Liban n’était pas due à la conjoncture régionale, mais plutôt à la situation interne du Liban durant le premier semestre 2011 et aux difficultés à former un gouvernement. « Dans les pays voisins secoués par des soulèvements populaires, les banques libanaises ne devraient pas non plus affronter de problèmes majeurs quant à leurs résultats annuels », a ajouté M. Salamé, s’appuyant sur des études effectuées par la commission de contrôle bancaire (CCB).